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Les DVD
Mais que fait la police ?
Les DVD par Guillaume de Boisdehoux


Mourir à Madrid
Frédéric Rossif (1963)
Éditions Montparnasse

Soixante-dix ans, déjà et que reste-t-il de cette guerre effroyable que fut la Guerre Civile Espagnole? Le DVD 2 du coffret, «Spanish Holocaust», le montre bien : il reste chez la droite espagnole contemporaine, héritière de Franco et des Nazis, la très nette volonté et le souci omniprésent de FAIRE OUBLIER ce qui s’est passé. Et ce qui s’est passé est, soixante-dix ans après, toujours aussi effroyable. Reprenons: en 1931, élections libres, dans un pays de 20 millions d’habitants touché à 50 % par la pauvreté. Plus de la moitié du pays appartient à moins de 20% de la population. Le salaire moyen vaut 3 kilos de pain. L’Église, j’y reviendrai, est partout et très puissante. C’est à la majorité absolue que la gauche gagne, une gauche unie, en un Frente Popolar. C’est la démocratie. Le roi abdique, une République naît.
Une Démocratie? Comment? Attention, ce doit être une erreur. Vous êtes sûr ? Ces pauvres, illétrés pourraient souhaiter la démocratie ?
Allons! l’Église, les bourgeois et l’armée n’aiment pas ça, pas du tout. De l’armée, que peut-on attendre? RIEN, on sait. Un général n’est jamais qu’un militaire qui a tué, ou essayé de tuer, ou ordonné de tuer plus longtemps que ses subordonnés. D’ailleurs en Espagne à l’époque, il y a un général pour 100 trouffions, un peu comme ici aujourd’hui, ils sont même plus, un étoilé pour 85 hommes. Et l’Église? On pourrait, naïvement, imaginer que le « message du Christ », à base d’amour, de respect des faibles et des pauvres, du rejet de la violence, aurait guidé l’Église espagnole, si présente. Tu parles! Avant que sa Saleté le Pape (c’est exprès) de l’époque fasse preuve de son immense courage en fermant sa grande gueule devant les Allemands pendant la joyeuse guerre mondiale qui allait suivre, il s’entraîne en coopérant, sans la moindre hésitation, non seulement avec la noblesse et la bourgeoisie espagnoles (ça a toujours été comme ça, ça ne changera pas, des ex-MRP français à la branche «chrétienne» du Front National), non seulement, en vertu de l’alliance sacrée entre le sabre et le goupillon, avec l’armée, sur le modèle hiérarchique de laquelle elle est, elle-même structurée, mais avec les Nazis sans lesquels Franco et sa bande de fascistes n’auraient jamais «gagné» cette guerre. Un million de morts. Il faut voir les images de ces curés, courageusement affublés de grandes cagoules pointues afin de respecter leur anonymat, les fumiers, comme ceux du Ku-Klux-Klan, d’autres «Chrétiens» tellement attachés aux « valeurs » de l’Occident, oui, tiens, le parti de Léotard, Longuet, Madelin en 1968 dans les mêmes années soixante, filmés par Rossif dans les années soixante.
Édifiante, la « Sainte Église » ! C’est à donner envie de vitrifier le Vatican une fois pour toutes !
Et cette guerre n’en fut pas une «ordinaire ». Les Allemands y expérimentèrent diverses joyeusetés qui les rendirent célèbres lors des réjouissances à venir, dont le bombardement de civils à seule fin d’intimidation, le «carpet bombing» (tapis de bombes) sur des villes vidées de leurs hommes, n’atteignant que les femmes et enfants et vieillards, enseignant aux phalangistes les pratiques des fosses communes où furent entassées les fusillés désignés au hasard (10% de la population d’un village, par exemple). Une sorte de répétition générale, Danke Schön Franco.
Outre ces faits immondes et la coopération très active de l’Église à ces massacres, 60 ans après, la droite espagnole, avec le joyeux Aznar, bien connu pour sa soif de vérité lors des attentats de Madrid de 2003 qu’il attribua, erreur funeste, à l’ETA, avait coupé les subventions aux associations qui, se substituant au service public, essayaient de découvrir où avaient été entassés des milliers de corps dans les fosses communes. Les «vainqueurs», les fascistes, ont profité, et profitent encore, par leurs descendants, des prébendes habituelles, pensions, bureaux de tabac, guichets de loterie (ONCE en Espagne) pour ses anciens combattants. Les autres, vaincus, encore ces dernières années, n’ont pas le droit de demander un certificat de décès pour leur père, mère, oncle, tués d’une balle dans le dos – admirons le courage des tireurs- et jetés pêle-mêle dans ces fosses communes. Ici, le DVD 2 est terrible. On voit des bourgeois de nos jours « regretter que le Diable inspire ces femmes et hommes à remuer le passé ».
Déclaration faite à la sortie de la messe.
Une devinette: comment différencier une foule de pauvres d’une foule de riches, Frente Popolar ou supporters de Franco? les dents! Les seconds pouvaient se payer le dentiste et bouffaient correctement, pas les pauvres. C’est toujours comme ça.


Ni Putes Ni Soumises
Margherita Caron
MK2

Preuve de la vitalité de la démocratie, de la capacité à réagir de ceux que certains, en les marginalisant, vouent aux barbus complices d’un état policier, lui-même allié du Front National dans ses idées les plus extrêmes, ce film est, avant tout, émouvant, bouleversant même. Pour vous dire, j’ai voulu adhérer le lendemain pour être Ni Pute Ni Soumise.
Que les faux culs racistes de la LDH et autres organisations, d’extrême gauche, faussement angéliques et bien pensantes arrêtent de tenter de nous culpabiliser : les Islamistes font tout pour ramener la femme au rang de bête. Je cite Wafa Sultan, psychologue, Syrienne vivant aux USA, sur Al Jezira, le 21/02/06 : « Le clash dont nous sommes témoins autour du monde n’est pas un clash de religions, ou un clash de civilisations.
C’est un clash entre une mentalité qui appartient au Moyen-Âge et une autre mentalité qui appartient au XXIe siècle.
C’est un clash entre la civilisation et le retour en arrière, entre le civilisé et le primitif, entre la barbarie et la rationalité.
C’est un clash entre la liberté et l’oppression, entre la démocratie et la dictature.
C’est un clash entre, d’une part les droits de l’homme, et d’autre part la violation de ces droits. C’est un clash entre ceux qui traitent les femmes comme des bêtes et ceux qui les traitent comme des êtres humains.
Les civilisations ne clashent pas, elles sont en compétition Les Musulmans sont ceux qui ont commencé ce clash des civilisations. Le prophète de l’Islam a dit : « J’ai reçu l’ordre de combattre les gens jusqu’à ce qu’ils croient en Allah et Son Messager. »
Quand les Musulmans ont divisé les gens entre Musulmans et non Musulmans et appelé à combattre les autres jusqu’à ce qu’ils croient ce en quoi eux-mêmes croient, ils ont commencé ce clash et commencé cette guerre. Je ne suis pas une Chrétienne, une Musulmane ou une Juive. Je suis une personne laïque. Je ne crois pas au surnaturel, mais je respecte le droit des autres d’y croire. On n’a jamais vu un seul Juif s’exploser dans un restaurant allemand. On n’a jamais vu un seul Juif détruire une église. On n’a jamais vu un seul Juif protester en tuant des gens. Les Musulmans ont transformé trois statues de Buddha en poussière. On a jamais vu un bouddhiste brûler une mosquée, tuer un musulman ou brûler une ambassade. Seuls les musulmans défendent leurs croyances en brûlant des églises en tuant des gens ou détruisant des ambassades. Cette voie n’apportera aucun résultat. Les musulmans doivent se demander ce qu’ils peuvent faire pour le genre humain, avant de demander que le genre humain les respecte.»
Bon, faudrait pas non plus qu’on me rapproche du clown vendéen à particule!
Là est le problème aujourd’hui: avoir une idée et ne pas forcément être associé à tous ceux qui partagent cette idée ou une part de celle-ci, refuser et réfuter l’amalgame. Mais avec le vomi de JT de 20 heures qui tient lieu de «culture» voire de «pensée» à de plus en plus de gens, et c’est partout, ça devient dur, très dur! Si vous n’avez pas vu ce film et si vous ne voulez pas mourir idiot, allez tout de suite l’acheter.


Une Romance Italienne
Carlo Mazzacurati
Pyramide Productions
TF1 Vidéo

Avec un titre pareil, comment résister à l’envie de demander ce film aux attachés de presse ! ? Je n’ai pas résisté et j’ai bien fait. Une belle histoire d’amour, bien filmée, dans ce qui est peut-être le plus beau paysage du monde, la Toscane en 1936. La dame (Maya Sansa) qui joue l’héroïne est, comment dire, sublime, magnifique et elle joue bien, ce qui ne gâche rien, tout comme l’acteur principal (Stefano Accorsi).
Après tout, il n’y a pas que l’horreur dans ce monde.


My Summer of Love
Pawel Pawlikowski
Take Partneship
TF1 Vidéo

Contrairement à ce qu’en dit le communiqué de presse, mais selon moi, il n’y a aucune perversité dans ce merveilleux film anglais (le réalisateur vient de Pologne mais son film est tellement anglais que ça ne se voit pas!). Dans une minuscule bourgade anglaise, un frère et une sœur partagent leur vie entre le pub du frangin et l’inaction de la fille en vacances. Quand le frère, «born again», vide les bouteilles de gnôle dans l’évier et devient un de ces allumés qui passent leur temps à dire Allelujah en écartant les bras, la gamine sait que c’est foutu. Elle rencontre une gosse de riches qui s’emmerde autant qu’elle pendant ses vacances et avec qui elle vit un bel amour d’été. Si certains sont choqués par l’image de deux belles jeunes filles s’embrassant (ou deux hommes!), qu’ils changent de revue (et de cerveau s’ils peuvent!).
Pas une once (mesure de poids anglaise, environ 28 grammes) de vulgarité ou de facilité ici. Délicatesse, finesse, humour et qualité caractérisent ce joyau.


Camera Kids
Les Enfants des Bordels
MK2

Mon ami photographe Dominique Boniface, auteur des portraits de couverture de VERSO, m’a raconté une expérience qu’il avait faite avec des enfants de 6 et 7 ans. Après leur avoir expliqué les fondements de la photographie, comment la lumière arrivait sur la surface sensible, il a équipé une classe de CP d’appareils « jetables », simples et de bon marché. Chaque groupe de trois enfants avait un thème. Le résultat fût extraordinaire. C’est l’expérience qu’a tentée une photographe américaine, très américaine hélas souvent, avec les enfants (et petits-enfants) des prostituées du quartier «réservé» de Calcutta.
Passons sur le côté «bons sentiments qui évitent de se poser les vraies questions », assez caricaturalement américain et présent ici et saluons cette initiative, la photographie, par son rapport étrange au réel (il faudrait en parler avec Conti, notre spécialiste maison) pouvant changer la vie des gens. Et, pour ces gosses à qui aucun autre destin que pute ou trafiquant, selon le sexe, est promis, il faut changer la vie, les sortir du bordel, les mener à l’école.
Magnifique.


The Weather Underground
Sam Green & Bill Siegel
MK2

C’est peut-être ici le meilleur documentaire sur les années 60 – 70 que j’ai jamais vu. Il est probable que ces Américains du Student for a Democratic Society (SDS), dont certains sont devenus les Weathermen (gars de la météo, j’y reviendrai) puis les Weather Underground sont responsables de l’attraction vers « leurs » USA de jeunes Européens qui n’y sont arrivés que trop tard, quand ce taré de vieux clown Reagan est arrivé au pouvoir, clôturant ces années 70 en janvier 1980. Pour tuer la décennie, un con tua Lennon le 8 décembre de la même année, The Dream Was Over. Je vois d’ici ceux qui, dans le même souffle, feront appel à la désormais fameuse «dette éternelle de nous avoir libéré des Nazis » et au rappel de « la seule vraie démocratie au monde» s’étrangler à la lecture de ce qui va suivre. Je sais. Mais passez à l’article suivant, peut-être qu’un des hasards de la mise en page vous fera découvrir un jeune espoir de la littérature, Dostoïevski par exemple, ça s’est vu.
Martin Luther King Jr. figure sur la liste des hommes à abattre du FBI. Il est tué en 1968. Les deux frères Kennedy, dont le premier a su faire illusion jusqu’à sa sortie opportune – avant que sa nullité explose au su de tous -, ont été tués.
L’apartheid est la réalité quotidienne aux USA. La pauvreté chez les pauvres équivaut à celle des pays du Tiers Monde. Le massacre organisé de 3 à 5 millions de Vietnamiens est une activité quotidienne qui enrichit les marchands d’armes (comme la guerre d’Irak à la recherche des armes de destruction massivement inventées de nos jours). Peu à peu, cette guerre rend fous ceux qui parviennent encore à penser au-delà du vomi évoqué des JT locaux.
Saluons au passage un grand homme de télévision, Walter Cronkite qui, revenu de là-bas et ne lisant plus seulement son prompteur, dit publiquement, devant des dizaines de millions de téléspectateurs, qu’il faut l’arrêter, cette guerre.
Les manifestations ne mènent à rien. C’est la force de toute dictature molle que de savoir organiser, canaliser et donc banaliser les manifestants qui deviennent ainsi la preuve - et l’alibi - prétendu démocratique. L’Amérique du Nord sait très bien créer sa propre fausse contestation, la vendre comme preuve de sa tolérance. Pendant ce temps, les affaires continuent, l’exportation de la misère et de la guerre ne s’arrêtent jamais, au nom de l’« american way of life ».
Un groupe quitte le SDS pour créer les Weathermen. Le nom vient d’une chanson de Dylan, « pas besoin de la météo pour savoir d’où vient le vent ». Quand les attaques du FBI s’intensifient, dont par l’assassinat dans son sommeil d’un des dirigeants des Black Panthers, ils entrent dans la clandestinité et deviennent «Weather Underground». Voulant passer à la lutte armée, ils perdent trois membres qui préparaient leur première bombe et décident alors de frapper sans jamais tuer ou blesser. Ils y parviennent, avec 25 attentats, locaux de la police, du FBI, du gouvernement, de grosses sociétés exploitant des pays «sous influence», aux régimes légalement élus renversés par les « faiseurs de paix », Kissinger et autres, le Chili par exemple. Trente ans après, la plupart de ces Weather Underground sont vivants. Ils parlent de ces années avec une intelligence étonnante, une vérité frappante, une lucidité admirable. Ils reconnaissent leurs erreurs, leurs errements.
Mais pas un ne regrette, pas même le bouleversant David Gilbert qui, ayant dérapé après les Weather Underground et participé à une action suivie de mort d’homme, purge une peine de «75 ans minimum» dans l’État (démocratique !) de New York. Il sera libérable en 2056. Il parle de tout ça avec plus que du talent, c’est émouvant.
C’est un film magnifique, émouvant, éprouvant aussi, qu’il faut voir.
Certes, rien n’a changé, les riches sont encore plus riches qu’avant et les pauvres encore plus pauvres et drogués (par les riches) mais, puisque révolution il faillit y avoir, ça peut à nouveau arriver.
Attention : ne pas confondre Weather Underground avec «The Velvet Underground», groupe rock de New York lancé par Andy Warhol avec Lou Reed, John Cage et la sublimissime Nico ou «Weather Report», mythique groupe de jazz « fusion » des années 70 de Joe Zawinul et Wayne Shorter, issus de la «Miles Davis academy», ce musicien qui changea LA musique pour toujours et qui vit passer, entre autres, le météoritique et génial Jaco Pastorius, le « Paganini de la Fender fretless Jazz Bass ». Ceci pour plaider, ENCORE, pour la reconnaissance de la musique comme un art par notre revue !


Ma Vie en l’Air
Rémi Bezançon
Mandarin TF1 Vidéo

Finissons sur des fous rires, dont celui quand, les pieds sur la table basse devant l’écran mural avec mon fils dans la même position, nous regardons un père et son fils, dans un canapé et les pieds sur leur table basse, regarder un film ensemble! Ce film est un des rares beaux films qui traite si finement du rapport entre un père et son fils, ici un fils et son père. Le héros, né en vol et sa mère ne survivant pas à cette naissance, se voit offrir un billet gratuit à vie ! Mais il a peur de voler, très peur. Il a aussi peur de décider, de s’engager et ceci donne une vie sentimentale très chaotique.
Plein de tendresse, de rire, d’humour, de finesse.
Excellent, tiens, on va le revoir.


Ces jours qui ont changé le monde
par Le Monde et la BBC
le week-end.

À en juger par le premier opus de cette nouvelle idée promotionnelle, à éviter absolument! Si même la BBC en est à faire des images si racoleuses, c’en est fini. Quel intérêt y a-t-il à voir en très gros plan un œuf en train de frire, sinon de prouver que la caméra peut le faire ! ? Je n’ai pas encore compris le «plus» dans l’évocation du premier vol des frères Wright. Idem pour l’écrasement du dentifrice sur la brosse à dents (je n’invente rien) d’un des chefs de la mission spatiale aboutissant à l’alunissage. Le plaisir de partager ce moment de juillet 1969 avec un enfant est gâché par cette putasserie étonnante pour la BBC mais pas tant pour Le Monde qui s’enfonce dans la reconquête éperdue de ses nombreux lecteurs qui ont compris, enfin, qu’il ne mérite plus son nom. C’est Le Monde qui a massacré le DVD de Fellini en n’offrant pas le choix de la VOST (Version Originale Sous-Titrée), il récidive ici en offrant que la version française ou anglaise, mais pas de VOST. La version sonore française est pathétiquement nulle, avec rapport à l’original, dite par une «actrice » à qui il a manqué les cours de diction ET le petit pois dans la tête pour comprendre ce qu’elle dégoise. C’est affligeant.
C’est Le Monde. CQFD.

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Guillaume de Boisdehoux
mis en ligne le 05/01/2006
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