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DVD
La rumeur
DVD par Guillaume Boisdehoux
par Guillaume Boisdehoux
Plume de Cheval, (Horse Feathers, Norman McCleaod, 1932)
L’explorateur en folie, (Cocoanuts, Victor Heerman, 1930)
Soupe au Canard, (Ducksoup, Victor Heerman, 1933)
The Marx Brothers

J’aurais souhaité parler longuement de ces films, tant les Marx Brothers ont fait, depuis… très longtemps, partie de mon univers mental, à mon plus grand bonheur.

Mais la société distribuant ces chefs d’œuvre en France n’est pas digne de cet honneur. Vous savez, c’est la société qui vendait de lUne rumeur a circulé au sein de la rédaction de Verso, et souvent avec l’évocation d’un complot me liant à mes camarades Conti et Simon. Un soupçon d’anti-américanisme, de ma part et celles de mes « complices », serait décelable dans nos articles. Je tiens, pour cette livraison de la chronique DVD de Verso Arts et Lettres, à préciser, et dès l’introduction, qu’une telle rumeur est totalement infondée. Il n’y a, chez moi et je laisse à mes supposés complices le soin de répondre en leur âme et conscience, aucun soupçon d’anti-américanisme.
Et plutôt que de répondre à ces accusations, je renvoie le lecteur de ces lignes à quelques productions audiovisuelles qui, en cette seconde partie de l’année de l’élection (est-ce vraiment le terme à employer ?) américaine, montrent bien mieux que j’ai été injustement accusé de le faire, ce qu’est l’Amérique, soyons précis, les États-Unis d’Amérique du Nord, soyons plus précis, l’administration Bush Junior, (le 43e Président), l’administration Bush Senior, (le 41e Président), la presse américaine, le lobby militaro-industriel américain, et des entreprises telles que Mac Donald’s, Disney et Coca-Cola, sans parler de Carlyle, le célèbre fonds d’investissement dirigé par un certain Carlucci, ça ne s’invente pas.
Que vaut mon opinion, ou la rumeur d’icelle, face à la parole et l’image de Michael Moore dans son Fahrenheit 9/11, du réalisateur de Super Size Me, dont j’ai oublié le nom mais peu importe, on a assez lu sur ce film sans avoir besoin d’aller le voir, et de William Karel, auteur de Le Monde Selon Bush, que Montparnasse Vidéo vient de sortir en DVD ?


Le Monde Selon Bush
William Karel
Montparnasse Vidéo
Je n’ai pas souvenir d’être resté la bouche ouverte pendant 93 minutes et c’est ce qui vient de se passer. J’ai découvert ce film en DVD, et c’est mieux qu’à la télé parce que je peux revenir en arrière et m’assurer de ce que j’ai vu et entendu. Les intervenants sont Norman Mailer dont j’avais prédit qu’il serait un écrivain reconnu, un ancien ambassadeur américain, des anciens membres de la CIA, des historiens, un professeur de Harvard, Stanley Hoffmann. Le constat est effrayant, au sens propre du terme. Je sors de ce film effrayé par le danger que représente ce clown triste à la tête du plus puissant pays du monde.
G.W. Bush est soit un pantin, manipulé par l’aile la plus extrême de l’extrême droite dite « chrétienne », des affairistes qui viennent de quitter la direction des plus grosses entreprises du pays, soit le digne successeur, dans une famille à côté de laquelle celle, mythique, de Don Corleone dans Le Parrain ressemble aux Dugenoux d’en face, de certains des plus grands escrocs que la terre ait portés. Les révélations sur le passé de banquier des nazis du grand père de 43e, le père de 41e, les histoires de pétrole, d’armes, de liens avec la famille régnante en Arabie Saoudite, les mensonges orchestrés, à la manière de ceux de Goebbels (c’est un professeur de Harvard qui le dit), pour devenir, à force de répétition, des vérités, la tentation fasciste affichée par les plans Ashcroft, quelle horreur !
Certes, on sait que le père de Kennedy, ambassadeur à Londres et gros actionnaire de IG Farben, avait recommandé de ne pas bombarder les usines de Zykon B ni les voies de chemin de fer qui menaient aux camps à la main d’œuvre bon marché. L’on se souvient de l’achat, par les Kennedy, des voies de la Virginie à la Mafia pour une élection serrée, de Nixon, « Tricky Dicky », (Richard le Tricheur), ancien membre actif de la Commission McCarthy, mais les Bush atteignent le sommet du cynisme, de l’ignominie, de la prévarication. Comme le dit un des anciens CIA du film, avec Saddam, c’était « bad », ce sera pire. Et même si on savait tout ça, même si la lecture attentive de plusieurs quotidiens, la réflexion, une relative connaissance de l’histoire et de la géopolitique ont existé, ce film est un choc.
Les images et notes, pas forcément aussi harmonieuses que celles des années 60 contre le Vietnam donnent un peu d’espoir à la fin du film : une manifestation comme celles de cette époque, de cette Amérique qui m’avait fait croire, la France vivant sous Marcellin et ses CRS massés tous les jours rive gauche, la radio étant un monopole d’État, qu’une démocratie existait outre-Atlantique. J’y avais cru. Si Bush est réélu, il ne faudra pas être surpris si ce pays bascule. « Le fascisme n’est qu’une détérioration de la démocratie. » (N. Mailer)


War Photographer
Christian Frei
Montparnasse Vidéo
Il m’a paru judicieux, recevant ce DVD, d’inviter mon collègue et ami Conti, expert en photographie, à le voir, le sujet relevant plus de sa compétence. C’est en partageant un grand verre d’eau, avec chacun sa paille, les temps sont durs, que nous avons donc regardé ce documentaire sur la vie d’un photographe de guerre, comme le nom du film l’indique. Pour Conti, le problème du photographe de guerre contemporain vient de l’existence, passée hélas, de ses maîtres, en particulier W. Eugene Smith, qui ne fut pas SEULEMENT photographe de guerre, Capa et Larry Burrows qui revint du Vietnam dans un des ces « body-bags » qu’il avait photographiés. Le premier avait été blessé parce qu’il voulait être près des explosions dans le Pacifique, Capa était mort sur une mine en Indochine, avant que cette contrée devienne le Vietnam. Il disait, je l’ai appris à l’issue de cette projection lors d’un fructueux dialogue avec mon collègue, toujours qu’il faut s’approcher au maximum de l’action, qu’on est jamais assez près quand on photographie la guerre. Et James Natchway dans tout cela ? Il semble loin de l’action, même s’il pense en être très près. Est-ce son ton, l’utilisation « artistique » des photos qu’il a faites, alors qu’en la matière, la photo de guerre, Conti pense qu’on « prend » plus une photo qu’on ne la « fait », le résultat est froid, clinique, et il semble que ce photographe « fasse un boulot » et un boulot qui paye bien. L’affiche le montre dans une position très élégante, pli du pantalon impeccable, souliers noirs bien cirés, assis en face d’un jeune homme armé qui semble chercher à éviter la prochaine praline qui passerait par sa tête, sans casque. L’atelier du photographe, alors que Capa, me dit Conti, envoyait ses pelloches au labo, quitte à ce qu’elles soient sabotées, comme ce fut le cas de celles du débarquement en Normandie, est cliniquement propre. Il gère ses photos, et il semble qu’aucun mort qu’il ait pu photographier ait laissé une impression sur le bonhomme. L’objectif aurait-il été transparent ? Conti me parle de Don McCullin, autre grand photographe de guerre dont l’engagement a été tel qu’il a dû arrêter et faire des magnifiques photos de paysages. On doute que Natchway ressente ça. Mais la mort qu’il semble ignorer chez ses sujets pourrait le rattraper un jour. On ne lui souhaite pas, d’une part, on doute que cela lui arrive, d’autre part. Le DVD est très bien fait, et si je n’avais pas vu le film et n’étais pas ami avec Conti, alors il faut le voir pour comprendre que la guerre, ce n’est pas une abstraction, mais une saloperie.


Les Sentiments
Réalisateur Noémie Lvovsky, Éditeur : ARP Sélection, Distributeur TF1 Vidéo Avec N. Baye, R. Bacri, V. Carré et M. Poupaud
S’il convient ici de ne pas crier au chef d’œuvre, comment alors qualifier un film qui, visionné en fin de journée caniculaire, après plusieurs heures de projection et quand le sommeil gagne l’honnête travailleur de la critique, épuisé sur son canapé – qui pense, aux conditions de travail des critiques de DVD, à l’usure du pouce sur la télécommande ? - qui signe ces modestes lignes, alors qu’on en a marre, un film donc qui fait rire et émeut jusqu’au bout ? Comment faut-il le qualifier ? C’est à vous que je pose la question ! Répondez ! Un bon film. Et un bon film, c’est, finalement, rare, sinon très rare.
Il y a ceux qui considèrent que, puisqu’un film est français, il sera mauvais. À moins de deux tiers d’effets spéciaux, de 12 hectolitres d’hémoglobine à la minute, si son scénario fait (au moins un peu) réfléchir et s’il ne fait pas 134 millions d’entrées dans LA salle du Grand-Duché du Luxembourg le week-end de sa sortie (je blague, je crois qu’il y a deux salles là-bas, mais la plus grande est à cheval sur la Belgique), alors il est mauvais. Ce sont les mêmes qui, tous les mercredis, se précipitent pour voir le dernier navet hollywoodien (les deux derniers mots ne constituant pas forcément un pléonasme) parce qu’ils ne sauraient être pris en flagrant délit de ne pas l’avoir vu avant les autres, ceux qui pensent que de toute façon, c’est mieux ailleurs. Et bien, à ceux-là, je leur dis… (non, je ne serai pas grossier ici, merde !), je leur dis d’aller voir ce type de film, qui se passe d’hémoglobine et de poursuites de voitures, qui est construit en restant frais, qui offre une Nième (mais en aurons-nous jamais assez ?) réflexion sur la vie, l’amour, ce qui compte finalement, tout ce qui compte. Bien entendu, il faut accepter de réfléchir, ce que « ceux dont au sujet duquel que je causais plus haut » ne font plus. Tant pis pour eux. Mais c’est à vous, lecteur adoré (et abonné payant j’espère) de VERSO ARTS ET LETTRES que je m’adresse, pas à eux ! À propos, me demanderez-vous, c’est quoi l’histoire ? Bon, y’a deux couples, un qu’est plus jeune que l’autre et y’a le mec du moins jeune couple, le vieux quoi, qui flashe pour la meuf du plus jeune. C’est tout. Ça fait mal, à tout le monde finalement.


Monsieur Ibrahim et les Fleurs du Coran
Réalisateur : François Dupeyron, ARP/ TF1 Vidéo
Une personne ne m’aurait laissé aucun souvenir si elle ne m’avait prêté le délicieux livre de E.-E. Schmitt. C’est ça la vie et la littérature ! Le film est aussi délicieux que le livre, et je n’aime pas les « adaptations ». Maintenant, il y a les « novélisations » à partir du film.
Une belle histoire, pleine d’émotion, de finesse, pas à l’eau de rose, un jeu extraordinaire du vieil Omar Sharif, une belle plongée dans une époque, pas si lointaine, pendant laquelle les rapports humains semblaient, mais c’est sûrement de la nostalgie, moins brutaux. En tous les cas, on pouvait aller aux putes sans craindre Sarko et sans capote !

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mis en ligne le 02/11/2004
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