Les artistes et les expos
Les vingt ans des FRAC
par Jean-Luc Chalumeau



L’opération « les 20 ans des FRAC » (Trésors Publics : 20 ans de création dans les Fonds Régionaux d’Art Contemporain) qui a commencé en juin 2003 et qui se terminera en décembre peut être dite « la plus importante manifestation d’art contemporain jamais réalisée en France » comme le proclame la communica- tion du ministère de la Culture. Le chemin parcouru depuis juin 1982 (date du début de la mise en place effective des FRAC par Jack Lang et Claude Mollard, ce qui leur fait donc plutôt 21 ans !) est en effet considérable. Avant leur création, l’ensemble des acquisitions officielles en France ne dépassait pas 300.000 francs. En 1982 l’Etat donna un coup d’accélérateur historique en distribuant 22 millions aux premiers FRAC, les régions n’ap- portant encore que 4 millions. Depuis, on est parvenu à un meilleur équilibre, beaucoup d’élus locaux se prenant au jeu, de telle sorte que de nombreux FRAC ont prospéré (pas tous). Mais, au début, que de controverses aussi bien localement qu’au plan national ! Pierre Daix observait à la télévision, en mai 1985, que les FRAC « sont contestés, attaqués, défendus. En tout cas ils existent ». En 2003 ils existent plus que jamais, ne serait-ce que parce qu’ils suppléent un marché de l’art défaillant, et ils ne sont plus guère contestés.

Les 15 expositions organisées à Nantes, Strasbourg, Avignon et Arles démontrent que les responsables des acquisitions n’ont pas manqué les plasticiens de toutes générations considérés aujourd’hui comme importants.Par exemple, pour n’en citer que un ou deux par ville, Claude Closky et Bruno Peinado à Nantes, Dominique Gonzales-Foerster à Strasbourg, Claude Lévêque et Gerhrad Richter à Avignon, Philippe Ramette et William Wegman à Arles…

Le catalogue « Trésors Publics » est un beau livre présentant quelque deux cents artistes dont des oeuvres ont été achetés par les FRAC. Chacun a droit à une fiche accompagnée d’une repro- duction. L’ensemble fait preuve d’un bel éclectisme… à un détail (de taille) près : aucune place n’est faite, ni dans ce cata- logue, ni dans les 15 expositions, aux artistes de la Nouvelle Figuration en France alors que tous figurent dans la collection d’au moins un FRAC. Ils ont certes été achetés depuis vingt ans, mais il a été décidé de ne pas montrer leurs oeuvres… L’ostracisme dont ils sont une fois de plus victimes réveille fâcheusement un soupçon souvent exprimé : il existerait bel et bien un « art officiel » en France, ou tout au moins, chez nos fonctionnaires de l’art, un dédain persistant pour une généra- tion d’artistes pratiquant une peinture figurative engagée dans les faits sociaux et la politique. Dommage.


Jean-Luc Chalumeau
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