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[verso-hebdo]
29-10-2015
La lettre hebdomadaire
de Jean-Luc Chalumeau
Les visions incarnées d'Ernest Pignon-Ernest
Une grande rétrospective Ernest Pignon-Ernest est annoncée pour 2016 au MAMAC de Nice, la ville natale de l'artiste. C'est ce qui justifie la réédition par Gallimard de l'album Extases publié en 2008, avec des textes d'André Velter, pour accompagner la présentation des dessins monumentaux d'Ernest Pignon-Ernest dans différents prieurés et chapelles de France. Cette réédition porte un nouveau titre : Pour l'amour de l'amour (figures de l'extase n'est qu'un sous-titre), et contient une figure de plus : Louise du Néant s'ajoute à Marie Madeleine, Hildegarde de Bingen, Angèle de Foligno, Catherine de Sienne, Thérèse d'Avila, Marie de l'Incarnation et Madame Guyon. Ces changements marquent peut-être une inflexion dans la manière dont l'artiste conçoit son travail. En effet, le texte de la quatrième de couverture indiquait en 2008 : « Comment représenter ce qui ne peut se voir ? Comment faire image de chairs qui aspirent à se désincarner ? Comment capter les traces, les effets, les lumières, les ombres, les soupirs ou les cris d'expériences ineffables ? Comment restituer des traits de tels transports, de tels excès, de telles effractions sublimées ? » Or, sur la nouvelle quatrième, il est ajouté ceci : « Pour Ernest Pignon-Ernest, qui a toujours fait du corps l'objet et le sujet de ses explorations, la rencontre avec les grandes mystiques chrétiennes ne pouvait relever que d'un questionnement passionné, dans lequel sensualité et spiritualité avaient toute leur part, et d'un défi artistique. »

Spiritualité, mais aussi sensualité en effet, car ces saintes sont nues, très partiellement insérées dans d'impeccables drapés. Même Louise de Bellère du Tronchay, bien née mais morte d'épuisement et d'inanition sous le nom de Louise du Néant. Laissons de côté, devant ces dessins sublimes, les références à Caravage qui ont tant servi (de toute façon, la sainte Catherine d'Alexandrie de ce dernier est somptueusement vêtue), et observons qu'à travers leurs variations, ces nudités sont une : l'artiste a demandé au même modèle, la danseuse Bernice Coppieters, à qui l'ouvrage est dédié, d'incarner le mystère nuptial qui existe entre Dieu et l'humanité et que portent ces saintes en proie au vertige de l'extase mystique. Qu'on l'entende bien, cet artiste d'exception, qui tient à préciser  : « ce n'est pas un acte de foi qui a décidé de l'aventure singulière, délibérément hors cadre, qui se manifeste dans ce livre... » Non, Pignon-Ernest n'est pas un homme de foi, mais tout se passe comme s'il répondait à l'appel de Dieu formulé poétiquement par Saint Jean de la Croix : « Une épouse qui t'aime, ô mon Fils, j'aimerais te donner/Pour qu'elle sache les biens que j'ai en un tel Fils/Pour que de ta grâce et de ta vigueur en moi elle se réjouisse... »

Or les images immenses de Pignon-Ernest, installées au Musée d'Art et d'Histoire de Saint Denis ou dans la chapelle de La Salpêtrière, indiquent que le Verbe consent. Il sait qu'il infusera à son épouse une clarté telle que celle-ci entrera dans la connaissance du Père. En cette épouse, le Père et le Fils seront glorifiés : « De ton amour, ô Père, elle sera tout entière embrasée, poursuit Jean de la Croix, c'est en éternel délice qu'elle exaltera ta beauté... » La création porte au plus profond d'elle-même la marque de la féminité : ce que montrent les dessins de Pignon-Ernest. C'est que, jaillit de l'amour de Dieu, la création a vocation, à l'exemple de ces saintes qui lui montrent le chemin, à n'être que docilité émerveillée : toutes manifestent un oui inconditionné à un désir.  Pour l'amour de l'amour  exprime, par le moyen d'un art de dessiner porté au comble de l'accomplissement, ce que pressentait Gertrud von Le Fort à propos du thème de la féminité au long de l'histoire de la création : « Pareil aux harmonies d'un prélude en mineur, il vibre au-dessus de la fiancée et de l'épouse aimante (...) Partout où la femme est le plus profondément elle-même, elle n'est plus elle-même, mais elle est offerte : partout où elle est offerte, elle est aussi épouse et mère. » ( Die ewige Frau. La femme éternelle, éd. du Cerf 1946). Ernest Pignon-Ernest n'est pas un homme de foi, c'est entendu, mais sa rencontre avec les saintes constitue bien, non seulement un défi artistique brillamment relevé, mais aussi une magnifique leçon de théologie. Une leçon accompagnée, en parfaite symbiose, par les textes d'André Velter qui lui aussi a compris ces saintes : « Elles sont de chair et d'écharde, d'esclandre et d'alarme, et d'âme à bras-le-corps. Elles sont des visions incarnées... ».
Pour l'amour de l'amour, Ernest Pignon-Ernest et André Velter, relié plein papier, 176 pages, 100 illustrations en couleurs. Gallimard, 35 euros.
Ajoutons la parution simultanée, chez Acte Sud, de Dans la lumière déchirante de la mer, par Ernest Pignon-Ernest qui rend hommage à Pier Paolo Pasolini (apparu dans son oeuvre dès 1980), avec un texte de Karin Espinosa et un poème d'André Velter. Ouvrage relié, 90 illustrations quadri, 25 euros.
J.-L. C.
verso.sarl@wanadoo.fr
29-10-2015
 
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Verso n°136

L'artiste du mois : Marko Velk

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