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[verso-hebdo]
14-11-2013
La chronique
de Pierre Corcos
Un film sensationnel
1974 : une date dans l'histoire du cinéma, d'un certain aspect du cinéma. C'est l'année de sortie du film Earthquake (« Tremblement de terre ») de l'Américain Mark Robson. On se souviendra de ce film non point tant parce qu'il constitue l'un des premiers films catastrophe - inaugurant une série que l'on sait ininterrompue -, mais parce qu'on y exploita le « Sensurround » pour la première fois... Ce type d'effets spéciaux consistait en la diffusion, synchronisée à l'action filmique, de vibrations sonores de fréquence très basse. Le but consistait bien sûr à procurer aux spectateurs certaines sensations fortes. Le tremblement de terre passait en quelque sorte de l'écran à la salle ! On retiendra ici le mot de « sensations », il sert de fil directeur à tout ce qui suit.
En 1981, dans son film Polyester, John Waters expérimentait le cinéma odorant, qui se proposait de fournir des sensations... olfactives aux spectateurs durant le film. Lorsqu'un numéro apparaissait sur l'écran, le spectateur (renifleur) devait gratter, sur une carte qui lui était fournie avant la projection, la pastille correspondante, et soudain une odeur s'exhalait, la même que dans la scène du moment... Aussi bien le sensurround que le cinéma odorant ne furent longtemps exploités, mais cette volonté cinématographique de produire des sensations supplémentaires et/ou plus fortes aux spectateurs ne s'est jamais démentie.
Le cinéma stéréoscopique, visant à donner la sensation du relief à partir d'images planes est, ne l'oublions pas, très ancien. Dès 1922, le film The Power of Love, pensé, créé avec le souci de procurer une sensation de relief, prévoit des lunettes spéciales pour le public. Mais, bien avant, est-ce que le fameux et historique court-métrage L'Arrivée d'un train en gare de La Ciotat, réalisé par Louis Lumière et présenté aux curieux en janvier 1896, ne visait pas à donner la sensation que le train fonçait dans la salle ? La façon dont le réalisateur mit en place sa caméra, utilisa la profondeur de champ, l'indique clairement... Effet spécial réussi ! Question : est-ce que cette constante recherche de sensations fortes à donner aux spectateurs n'est pas présente dès les origines du cinéma, dès Lumière ou Méliès ?... Et nous voici, plus d'un siècle après, avec le cinéma 3D envahissant, et une oeuvre singulière comme Gravity, film américano-britannique du réalisateur mexicain Alfonso Cuaròn.
Avant d'aller plus loin sur le film, il est intéressant de revenir brièvement à la sensation, à ce qu'est une sensation.
A la différence de la perception, construite, structurée par le langage, la mémoire et l'intelligence pratique, influencée par l'imaginaire, la sensation, elle, ressentie et vécue immédiatement par un sujet, est une donnée élémentaire fournie par nos récepteurs sensoriels. Une réaction physiologique de l'organe sensoriel stimulé. Réaction incontrôlée, donc plus susceptible qu'une perception d'être anxiogène et/ou jouissive... Il y a des sensations externes (thermiques, visuelles, tactiles, etc.) mais aussi internes (cénesthésie).

Gravity génère d'étonnantes sensations de relief (3D) bien sûr mais, ce qui est vraiment nouveau, des sensations internes d'apesanteur, d'immersion vertigineuse, provoquant ivresse mais aussi angoisse... Pendant cette heure et demie de drame dans l'espace intersidéral, le « spectateur » (quel devient son statut, à part la vision ?) va peu à peu, foetus tournoyant dans un immense utérus étoilé, perdre la sensation interne de stabilité que donne la pesanteur terrestre. Se sentir flotter, sans droite ni gauche ni haut ni bas, sans repères dans « le vide éternel des espaces infinis »... Interrogé par une journaliste dans le journal Le Monde, Alfonso Cuaròn nous confie : « Nous voulions donner aux spectateurs l'impression qu'ils flottaient avec les personnages. Nous avons soumis aux principes de la micro-gravité non seulement les acteurs, mais aussi la caméra qui porte le point de vue du spectateur. En rotation permanente, elle avait sa propre inertie. Nous l'avons programmée pour qu'elle se comporte comme si elle flottait dans l'espace... ». Ainsi, le corps, le mental des créateurs et des spectateurs ne devaient plus se vivre à partir d'un point de vue stable, structuré par une perspective et un horizon. D'où, avec ces nouvelles techniques (également sonores), ce mixage de prises de vue réelles et d'effets spéciaux numériques, et enfin ce changement de la syntaxe cinématographique, une certaine façon de repenser le cinéma.

2013 : Gravity. Passons outre le scénario classique de film catastrophe et à suspens, avec ces figures héroïques sempiternelles et son psychologisme formaté, et ne retenons que ces nouvelles sensations internes produites. Oui Gravity, à ce compte-là, est stricto sensu un film sensationnel.
Pierre Corcos
14-11-2013
 
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Verso n°136

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