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[verso-hebdo]
15-03-2018
La chronique
de Pierre Corcos
Avant tout un documentaire...
Pourquoi tant de polémiques autour du documentaire L'Insoumis de Gilles Perret, sur la campagne de Jean-Luc Mélenchon ? Au point qu'une salle avait déprogrammé le film, et qu'une partie de la critique a éreinté cette oeuvre... Est-ce à cause du personnage, clivant, ou alors de ses projets politiques dérangeant certains pouvoirs (il rappelle que 90% de la presse appartiennent à 9 milliardaires), ou enfin d'une difficulté à saisir le genre documentaire ?

Faut-il rappeler ce truisme qu'un documentaire, c'est d'abord un film ?... Il est en effet fréquent que son sujet fasse plus parler de lui que de l'acte filmique le représentant. Or, ce qu'on peut apprécier dans ce documentaire, en tant que tel, vaut tout de suite d'être mis en relief. Et ici par exemple cette éloquente variation des plans - allant de larges panoramiques pris de très haut (effets de foules) à ces gros plans intimistes sur des visages (impact psychologique), en passant par tous les travellings évoquant l'homme « en marche » (mais ce fut le slogan de... Macron) - crée un rythme contrasté, que renforce l'alternance maîtrisée des scènes publiques, en plein air, et des scènes « privées » (équipe resserrée) en intérieur. Une autre alternance, au niveau du son, mérite d'être citée : Gilles Perret a su remarquablement émailler de séquences silencieuses, à connotation méditative, sereine, un film de campagne globalement marqué par discussions vives et clameurs. Par ailleurs, le documentariste est ici présentifié - ce qui reste un choix - par le fait que Mélenchon se confie, s'adresse à lui. On retient cette contre-plongée sur le candidat en fond de ciel gris, et surtout cette séquence originale, poétique où l'on contemple les toits de Paris sous un ciel lumineux tout en écoutant la voix en off de Mélenchon... En documentariste maître de son médium, Gilles Perret a, dans L'Insoumis, largement dépassé la fonction strictement informative des reportages, souvent formatés, pour reprendre quelques esthétiques contemporaines, propres au cinéma du réel.
Qu'un bon documentaire ait une fonction mémorielle, serve aux historiens, tombe sous le sens (il suffit de revoir le documentaire « François Mitterrand " la conquête du pouvoir » (1995), de Michèle Cotta, pour se rendre compte à quel point, au-delà d'un portrait complexe, c'est tout un ensemble socio-historique qui émerge, riche de sens), et celui de Gilles Perret rappellera aux générations futures cette campagne présidentielle surprenante (tous ceux qu'on attendait furent balayés, et les « hors-système », dont Mélenchon, s'imposèrent), le poids croissant de la télévision et sa mise-en-scène d'une politique-spectacle, l'instantanéité des réactions, des résultats et des informations via internet sur les smartphones, la réactivité permanente que cela induit ; également cette première en matière de communication politique que fut l'hologramme de Mélenchon, lui permettant d'être le 5 février à la fois à Lyon et à Paris... Ce documentaire saisit pour l'Histoire cette émouvante minute de silence, que le candidat fit observer sur le Vieux Port de Marseille à des milliers de personnes réunies, en mémoire des disparus en Méditerranée. Par touches successives, il inscrit surtout dans nos mémoires, en ce début de 21ème siècle, la crise montante des grands partis de gouvernement rétamés par leurs échecs et leur soumission aux pouvoirs économiques, la montée des populismes, et la fracture durable de la gauche, son affaiblissement en Europe.
Des prises de vue réalisées au coeur d'une expérience vécue : le documentaire est aussi cette présence perceptive du réalisateur qui parvient à « présentifier » un réel... Pendant deux mois et demi de campagne, Gilles Perret a accompagné le candidat Mélenchon, recueillant de fortes confidences (notamment dans le train), assistant à des scènes cocasses (le choix d'une veste pour l'expérience de l'hologramme, un discours inattendu sur le fromage Comté, etc.), montrant aussi la solitude impressionnante d'un homme qui doit, par les seules ressources de sa parole, exalter des foules immenses. Il s'agit aussi pour le documentariste d'être là au moment où les émotions débordent : colère de Mélenchon après un passage sur France 2 ressenti comme un traquenard, joie quand il perçoit la montée régulière des intentions de vote en sa faveur, au point qu'il croit en sa présence au second tour. Émotion esthétique également, lorsqu'il se retrouve à Rome, et qu'il avoue à quel point il se sent familier avec l'Italie, ses paysages, son architecture... Enfin, donner toute sa présence vivace à la passion politique habitant cet homme, du matin au soir, contribue à l'efficacité de L'Insoumis.
Ce documentaire esquisse un portrait. On y voit un « tribun du peuple » (sic), un homme intransigeant (« je ne pardonne pas », avoue-t-il), défini par le politique et l'éthique (« c'est important de se faire des devoirs »), pour qui la pensée, l'écriture, l'engagement restent essentiels (« je me vis comme un intellectuel engagé »), un être d'une lucidité grave, stoïque, traversée de moments de candeur. À sa façon de réfléchir, d'accorder de l'importance aux mots, on pressent la formation philosophique, littéraire, l'expérience professorale. Mais il est aussi et bien sûr un vieux routier de la politique : « trente-deux ans de P.S. derrière moi ! », grommelle-t-il. Enfin, le documentaire commence et s'achève par l'écriture, la relecture minutieuses d'un discours par Jean-Luc Mélenchon.
Sans doute est-ce là aussi le regard spécifique, enrichi par les images, de Gilles Perret sur son modèle, tant il est vrai que le documentaire, comme le définissait Jean Vigo, reste toujours « un point de vue documenté ».
Pierre Corcos
corcos16@gmail.com
15-03-2018
 
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Verso n°136

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