avec le soutien éclat ou éclat
hotel de beaute
ID : 100
N°Verso : 69
L'artiste du mois : André-Pierre Arnal
Titre : André-Pierre Arnal : entre le même et l'autre
Auteur(s) : par Gérard-Georges Lemaire
Date : 07/10/2013



André-Pierre Arnal : entre le même et l'autre
par Gérard-Georges Lemaire

C’est la multiplicité des propositions plastiques qui l’a engendrée. Mais si l’on commence à observer chaque série d’œuvres, force est d’admettre qu’elle a été élaborée avec des règles bien définies, même si ces règles incluent l’aléatoire. En effet, Arnal peut aussi bien se servir d’une règle et d’une équerre pour composer des planches de caractère géométrique, qui ont été ensuite découpées et réassemblées selon un ordre qui n’a plus rien de formaliste que les déliasser. En effet, il peut aussi bien utiliser des fragments déchirés et les réunir sur une autre feuille comme on dispose un bouquet. Mais le but recherché n’est pas la pure harmonie, ou une peinture sans peinture comme a pu le faire Matisse à la fin de sa vie avec, par exemple, ses Nus bleus ou Jazz. Il fomente un désordre qui, par ses soins attentifs, trouve son ordre, mais qui n’est pas dictée par les grands canons en vigueur jusqu’à la fin de la période dite « moderne ». Il n’est pas animé par le souci de détruire la peinture, pas plus qu’il n’a l’envie de la réhabiliter - dans sa majesté. Son ambition se situe au-delà de cette problématique. Il imagine une peinture qui reposerait sur d’autres fondements, sans revendiquer le passé ni le renier. De plus, il tient à multiplier ses modes d’approche pour ne pas succomber à la tentation de trouver des formules qui pourraient être reproduites quasiment ad libitum. Ses séries se suivent et ne ressemblent pas. Et pourtant, elles ont souvent un air de famille. A mes yeux, il construit une sorte d’arbre généalogique à partir des résultats obtenus. En sorte que son langage visuel est de ceux qui se déclinent sans fin et qui ne cessent de produire de nouvelles entorses grammaticales.

Il serait bien difficile de dater les ouvrages réunis dans son atelier si l’on n’a pas suivi pas à pas les progrès de son métier. On peut seulement mesurer l’écart avec ses débuts et indexer quelques phases clefs de son parcours. Le reste est intemporel. Et cela fait partie de sa manière de préméditer son prochain coup sur l’échiquier de l’imaginaire de l’art. De plus, il a un malin plaisir à brouiller les pistes. La joyeuse confusion qui règne entre ces quatre murs n’est pas le seul fruit du hasard ou d’un caractère désinvolte ou brouillon. Ce ne sont pas les progrès de ses travaux qui lui tiennent à cœur - il ne se considère pas comme un technicien hors pair ne cessant d’améliorer une pièce qui pourrait être son chef-d’œuvre, mais comme un homme qui chemine dans un univers où il peut se permettre à peu près tout ce qu’il souhaite - mais toujours en respectant des prolégomènes bien définis. Il est le maître de ce jeu, mais en est aussi celui qui en est joué. C’est ce dialogue entre son désir et ce que les aléas des couleurs ou des morceaux de papier qui se présentent à lui qui peut constituer la véritable expression de ce qu’il a l’intention de faire : être et ne pas être là où il se trouve, agir sur ce matériau et être manipulé par ce dernier pour que puissent voir le jour des situations inattendues. Le tendu et l’inattendu, les stratégie de la raison et les stratagème de l’inconscient : c’est c e que nous devons entendre.

 

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