Dossier Esther Ségal
De grâce et de lumière
par Claude Mollard

La religion aussi : Satan vécu comme un révélateur, celui qui fait paraître la lumière. Sans lui pas de divin, pas de lumière. Mais sans lui pas d’humain non plus : la petite ancêtre des hommes, de plus de trois millions d’années, identifiée dans le désert africain, n’a-t-elle pas été baptisée Lucy ? Faire l’homme : Lucy-faire…

La mystique révèle l’au-delà de Satan, de Judas, des traîtres ! Elle permet aussi de réunir le divin et l’humain, le premier dieu, les premiers hommes. Vus de son éther, de son point de vue d’Esther, les hommes sont faits de la même matière, du même bois, de la même terre, de la même énergie, de la même lumière. Car la lumière se nourrit de son ombre. Pas d’enfer ! Pas de condamnation ! Que des jeux d’ombres et de lumières, que des jeux d’hommes et de dieux, des jeux d’hommes et de dames.

Etre du passage, de passage aussi sans doute. Mais ne pas être sage, ne pas craindre le danger : elle rend possible le courant qui passe entre un espace et l’autre, elle est l’être du seuil, celui qui veille sur la porte, celui qui construit ou franchit les portes. Elle est gardienne des portes. L’ange n’est-il pas l’être qui apparaît sur le seuil des portes ? De là, l’ange gardien et l’artiste en ange-gardien…

Inébranlable est la conviction d’Esther SÉGAL dans cette vérité de la lumière unique et réelle, celle qui illumine tous les hommes et tout des hommes. Une lumière qui viendrait du père qui désigne le fils et l’abandonne avec son fardeau : apporter la lumière au monde et en mourir. Mais aussi en ressusciter dans un halo de lumière et de mouvements d’ailes d’anges. Pourquoi ne pas apporter la lumière tout en restant vivante ?

Où qu’elle se tourne et se retourne, le réel retrouve son halo de blanc et d’éther. Esther SÉGAL crée des séries sans fin, pour tester les limites de ses essais. Et , toujours, la même conclusion s’impose ; la lumière est une et les hommes qui baissent trop la tête ne la voient pas. Son rôle d’artiste multiple n’est-il pas de les inciter alors à lever la tête pour devenir des êtres libres ?

Donner à lire avec ses dessins, ses photos, ses paroles, ses écrits de tout son corps et de tout son esprit. Pour apprendre à déchiffrer le monde. Apporter aux êtres enchaînés dans la caverne qu’il suffit de comprendre que les victimes sont trop souvent des boucs émissaires. Etre alors celle qui apprend à rester dans le monde de l’ailleurs, du côté de la lumière, pour enseigner que les ombres sont fraîches et utiles, que le noir est absolu ou n’est pas.

Ainsi d’Esther. Ne pas se taire : dire, proclamer son témoignage sur terre, sous toutes les coutures, sur tous les tons, pour que le noir engendre le blanc, matrice de toutes les couleurs, et nous entraîner dans son monde irréel, mais plus vrai que le nôtre. Dans la grâce de sa lumière.

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Dossier Esther Segal : Esther Segal ou l'âme au bout des doigts par Gérard-Georges Lemaire
mis en ligne le 26/01/2010
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