Les artistes et les expos
En lisant les leçons de ténèbres
de Patrizia Patrizia Runfola :
la célébration de Beaugency
par Justine Lacoste

      Je suis resté en arrêt devant la petite sculpture en ardoise de Silva Beju, qui est faite de plusieurs pièces et qui se termine par la silhouette d’une tête – une silhouette volontairement indécise. La partie la moins élevée de sa pièce est bordée d’une ligne de lumière qui en fait une sorte de statue-reliquaire saturée de mystère. Au fond du chœur, voici les photomontages de Claude Jeanmart. Le terme est sans doute inexact : il s’agit d’œuvres numériques où sont impliqués des collages, des photomontages, des peintures, des photographies, des fragments de fils, et j’en oublie sans doute. Il a imaginé un dispositif par groupes de quatre qui mettent en scène des passages des différents chapitres. Ici, par d’illustrations, mais des extrapolations, à la fois ludiques et graves et qui changent sans cesse de présentation et de forme. Chacun de ces groupes est accompagné d’une citation indiquant le texte traité.
En me déportant vers la gauche, je vois des lavis de Solange Galazzo, toujours aussi charmeurs, et puis trois petites sculptures en céramique grise de Laurie Karp qui explique ceci : « Leçons de ténèbres de Patrizia Runfola a quelque chose d'une vanitas écrite pour moi : l'intense beauté d'une mise en éveil de tous nos sens et tout l'intelligence - jusqu'à exaltation - face à une certitude qu'on va vers la disparition. Une beauté donc teinte de mélancolie, et une mélancolie rendue sublime. Sensations et émotions - le désire, la frustration, la triomphe, l'extase, la rage - sont transmises avec force et sont rendues réelles et palpables. Mais ce sentiment de réalité et vérité est produit paradoxalement par l'évocation de l'étrange, du fantastique, et de l'irréel. Les petites paysages / environnements céramiques que j'ai réalisé suite à la lecture de ce et ses disparitions annoncées sont surtout l'expression des atmosphères j'ai senti. Dans mes pièces on voit des traces de vie : vie humaine (architecture, musique) et de la nature (eau, arbres, terre). Mais tout est minéralisé et désert, tout est figé dans un émail, qui est simultanément noire et sombre, argentée et brillante. » Après ces pièces délicates et précieuses, énigmatiques et savoureuses, vient la série de dessin à l’encore de Nathalie Du Pasquier. On y voit l’auteur comme Alice dans le livre de Lewis Carroll, de dos, face à un muret, ou encore allongée sur un canapé ou enfin assise devant un bureau incliné. C’est une manière de faire coïncider l’auteur et sa narratrice dans un seul et même personnage de conte dans un style qui est proche de celui des ouvrages destinés aux enfants. Mais son dessin n’a rien d’ »enfantin » : il a la grâce et le charme magique des dessins de John Tenniel qui a illustré divinement Alice in Wonderland.

      Au terme de ce périple, me voilà enrichie de ces mille et un modes de traduire dans le langage des arts plastiques ces Leçons de ténèbres, une fiction d’une beauté renversante.

Les artistes et les expos : En lisant les leçons de ténèbres de Patrizia Patrizia Runfola : la célébration de Beaugency par Justine Lacoste

mis en ligne le 14/01/2011
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