avec le soutien éclat ou éclat
hotel de beaute
ID : 50
N°Verso : 66
Les Artistes et les Expos
Titre : Les tableaux Tounes Boules (turn cut) d'Arthur Aeschbacher
Auteur(s) : par Gérard-Georges Lemaire
Date : 11/01/2013


Galerie Arthème, Paris octobre-novembre 2012

Les tableaux Tounes Boules (turn cut) d'Arthur Aeschbacher
par Gérard-Georges Lemaire

Sa démarche, si elle n’est pas strictement formaliste, n’est pas non plus iconoclaste. C’est une spéculation sophistiquée qui s’attache aux relations qu’entretiennent les mots et l’espace, entre les lettres et l’invention d’un univers abstrait où elle devient la clef de sa poésie.
Telle poésie est muette, comme il se doit. Elle est faite pour l’œil. Mais, pour parler des ouvrages récents, le mot « Pacifico » résonne dans notre crâne comme le mouvement lancinant et fascinant de vagues de pensées, de réminiscences, de recoupements emprisonné dans un coquillage féerique abandonné sur la plage du vieil Océan de Lautréamont. Pour lui, c’est un leitmotiv, un fil d’Ariane également. Il lui sert à exécuter des variations dont le jaune est le la du spectre des couleurs. Ce jeune et ce mot se voient attribuer une autre vie : une vie esthétique, c’est-à-dire une vie plus intense, plus profonde, plus riche et plus fantasque, tout en demeurant le nom d’une marque de bière connue ; une vie d’un autre genre pour révéler ce que les apparences nous disent à demi-mot et que nous n’entendons et voyons encore moins.

II

Des ciseaux et des lettres (sens dessus dessous)

Arthur Aeschbacher a eu recours à ce que William Seward Burroughs appelait « les techniques littéraires de Lady Sutton Smith ». L’auteur du Festin nu faisait allusions aux méthodes mises au point dans une chambre du petit hôtel, rebaptisé par la suite Beat Hôtel, situé rue Gît-le-Cœur dans le Paris de la fin des années cinquante et du début des années soixante par Brion Gysin, poète, romancier, parolier, peintre. Il s’agissait du cut-up (des pages d’un journal étaient divisées dans le sens de la longueur puis chaque moitié était associée avec une autre demie page ayant subi le même traitement), le fold-in (c’est le même principe, par pliage) et les permutations (cette fois, les mots d’une phrases sont intervertis pour donner une signification nouvelle à la phrase). Il a bien connu Gysin et ses « trouvailles » l’ont passionné. Il en soutiré un autre mode de métamorphose, non du mot, mais de la lettre, qu’il a appelé Turn Cut. Il découpait la lettre en traçant des ronds ou des bandes et la faisait pivoter selon un mouvement rotatif. La lettre déformée était souvent encore lisible. Mais son impact optique était d’une nature nouvelle. Aeschbacher a développé cette méthode depuis un certain temps, et l’a radicalisée dans des œuvres relativement récentes.

 

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