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La bibliothèque de l'amateur d'art
par Gérard-Georges Lemaire


Roma, Philippe de la Gernardière, Actes Sud, 308 p.

Ce nouveau roman de Philippe de la Gernardière, Roma, soulève une question insistante et très dérangeante : pourquoi les Français, dès qu’ils se trouvent en Italie, souffrent-ils d’un syndrome de Stendhal qui les pousse à exprimer les idées les plus sottes sur ce pays ? Dans cet ouvre, l’auteur, nous offre un paysage de carte postale, où l’on ne voir guère que la place d’Espagne et la Villa Médicis, on n’y parcourt que des rues bien connues des touristes on y admire sans fin, d’un air compassé des clochers et des cloches. Ce n’est pas la Rome d’Aldo Palazzeschi ni celle de Gadda, mais celle des Français qui n’ont d’autre centre que la Villa Médicis, qui est leur prison intellectuelle et sentimentale ! On n’y croise que l’ombre des grands peintres, de Michel Ange au Caravage et aucun poncif ne nous est épargné. Quand a l’intrigue, elle tourne autour du souvenir d’un film qui a été tourné dans la Ville Eternelle. Les principaux protagonistes se retrouvent et tentent de nouer un passé flou avec présent qui l’est plus encore. Tout est cela est écrit avec un soin un peu maniaque, sans lyrisme et sans non plus quoi que ce soit qui soit original et prenant. En lisant Roma, on ne ressent rien. On est spectateur d’une histoire qui n’en est pas vraiment une et d’évocations qui n’en sont pas vraiment. Bien entendu, il faut peut-être croire qu’il y ait une certaine dose d’ironie dans l’affaire de ce Ciné-Roman, qui évoque l’époque où Robbe-Grillet et Duras faisaient du cinéma (Delphine Seyrig est citée ici) et celle où Fellini a tourné ses chefs-d’œuvre. Roman au deuxième ou au troisième ou même encore au quatrième degré ? Mais il manque toujours le roman, sous n’importe forme ancienne ou moderne, aussi cynique et ironique soit-il !

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La Mémoire du cœur, Guy Goffette, Gallimard, 272 p., 22,50 €.
Géronimo a mal au dos, Guy Goffette, Gallimard, 182 p., 16,90 €.

Guy Goffettte nous offre seize années de chroniques littéraires (1987-2012). Ce n’est pas un ouvrage immense. Et c’est n’est pas non plus un sorte de Bottin mondain, bien au contraire. Il n’est pas porté au commentaire et ne suit pas les traces des es grands aînés du XIXe siècle qui ont dû tirer à la ligne pour parler des œuvres des grands auteurs et de leurs contemporains. Ecoutons-le parler de François Michon : « Lire Pierre Michon équivaut à gravir un escalier derrière une fille gironde. » Cette phrase donne le la de l’esprit qui le guide dans ces notes toujours brèves, toujours incisives et chaque surprenantes. Bien sûr, il nous parle de quelques illustres auteurs du passé – Stendhal, Mérimée, Rimbaud, Claudel) et d’auteurs qui ont déjà marqué notre histoire, comme Thomas Bernhardt ou John Updike. Mais la plupart de ces papiers concerne des auteurs souvent inconnus et qu’il entend bien nous faire découvrir. C’est courageux, car on écrit plus pour sa relation à un nom célèbre que pour nous rapprocher de la prose ou de la poésie d’un Henri Droguet ou d’un Jean-Claude Pirotte. Ce livre est un beau paradigme à offrir à tous ceux qui éprouvent le désir de se lancer dans la critique littéraire : c’est un vrai manuel de savoir vivre en la matière.

Mais n’oublions pas que Guy Goffette est avant tout poète et romancier. Avec son dernier livre, il nous propose des pages très émouvantes. Cela pourrait être un autobiographie. Ou pas. C’est en tout cas une histoire d’enfance, à la fois familiale et initiatique. Au centre, se trouve le père, une figure à double facette qu’il surnomme Géronimo. Nous découvrons une enfance en province, avec ses âpreté et ses illusions, et surtout la personnalité de ce petit garçon qui apprend à vivre avec son entourage comme métaphore du monde. Au fond, c’est un canevas très banal. Toute la magie repose sur la manière dont l’auteur nous narre cette histoire. Ici, nous ne devons pas nous attendre à un roman en coupe réglée, mais à une fiction qui manipule sans doute beaucoup de choses qui ont été réelles, plus ou moins transposées. Peu importe d’ailleurs. Ce qui compte, c’est la finesse de l’optique de l’homme qui écrit ces choses appartenant au passé, sa densité et en même sa façon si légère de poser des phrases qui ont néanmoins un vrai poids. C’est tout l’art de Guy Goffette.

 

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