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La bibliothèque de l'amateur d'art
par Gérard-Georges Lemaire


Tu vois ce que je veux dire, Pierre Tilman, Villa Tamaris.252 p.

Pierre Tilman fait partie de cette catégorie d’artistes qui se trouvent à mi-chemin entre les arts plastiques et la poésie visuelle et comportementale. En somme, c’est un artiste qui échappe volontairement aux définitions classiques, mais aussi à celles qu’on a forgées ces derniers temps. Le copieux catalogue de l’exposition qui s’est tenue à la Villa Tamaris de La Seyne-sur-Mer met en évidence la richesse de sa recherche. Pour ce qui est du langage, on se rend compte qu’il aime bien les calembours et les traits d’esprits un peu lourds (je songe au poème sur la mer bleue). Sa grande métaphore, c’est la colonne de fourmis. Ses tableaux sont souvent des papiers accumulés qui sont parfois posés par des soldats ou des jouets en plastique. On y retrouve un peu de Jean-François Bory et un peu de Julien Blaine. Je dis cela sans malveillance car il n’imite ni l’un ni l’autre, mais produit des situations permettant de faire des analogies permettant de le situer dans la constellation des arts contemporains. Mais plus que ses textes et que ses « performances ” (d’inspiration un peu maigre), je préfère ses grandes installations, où il condense toutes ces pratiques, sans les rendre homogènes, mais en leur attribuant une valeur plus vaste et un impact considérablement plus grand. Je crois, je suis persuadé, que Pierre Tilman devrait poursuivre ce qu’il a fait avec Le Mur des mots (2008)  : c’est dans ce genre de réalisation qu’il trouve et son identité et aussi sa force.

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Mais peut-on vivre sans illusions ? Pierre Nahon, La Différence, 160 p., 16 €.

La galerie Beaubourg a été l’une des cinq, six galeries parisiennes qui ont compté pendant les années 80. Tout le monde se souviendra de la publicité que Pierre et Marianne Nahon s’offraient dans Art Press avec leurs profils et leurs seuls prénoms ! Ce couple de marchands spécialisés dans le Nouveau Réalisme et la figuration narrative a défrayé la chronique avec différentes affaires tragi-comique (comme le démantèlement d’une œuvre de Joseph Beuys – une série de tableaux noirs -, avec la bénédiction du grand critique Lamarche- Vadel !), mais surtout avec le reportage réalisé pour la chaîne de télévision Arte, qui a fait rire une bonne moitié de la France. En lisant ce nouveau livre de souvenirs, je suis surpris que Pierre Nahon, avec le recul, ne comprenne toujours pas ce qui a tant fait rire dans ses remarques ou les discussions avec les artistes. Dans un livre où il y a bien aspects touchants et sincères (bien sûr, les années passées dans un collège chrétien pendant la guerre, comme tant d’autres enfants juifs, caché pour ne pas être mis dans les trains dirigés vers Auschwitz, mais aussi ce qu’il raconte de la guerre d’Algérie et de ses aberrations), ne serait-ce que son apprentissage de la littérature et de l’art, ses souvenirs du lycée, etc., je suis toujours stupéfié du peu de distance et d’autocritique dont il fait preuve. Et c’est dommage que ce livre ait été un peu fait à la va- vite, car l’histoire de sa famille est bien intéressante. Plutôt que d’avoir écrit tous ces livres où il s’est laissé aller à l’autocélébration, pourquoi n’a-t-il pas eu le courage de composer une véritable autobiographie et de voir les poutres qu’il avait dans son œil de commerçant d’art ? Une dernière chose : il m’a dédicacé ce livre en me disant : « à charge de revanche « - mais de revanche de quoi ? A vous de me le dire !

 

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