Les artistes et les expos
C. Q. F. D. : Jean-Noël Laszlo
par Gérard-Georges Lemaire

Par la suite, ses menées le rattachent une fois de plus aux futuristes : l’édition. Mais Laszlo n’est pas un éditeur dans le sens traditionnel. Il faudrait plutôt parler d’inventeur de livres –le livre devenant partie intégrante de l’œuvre ou se révélant l’œuvre elle-même. Son aventure éditoriale débute avec un ouvrage intitulé non sans humour Tout long Editions. Comme son nom l’indique (en plus du jeu de mots sur la ville de Toulon où vit l’artiste), c’est un ouvrage en bois, comme une boîte, ayant un format tout en longueur et entièrement visée. On ne peut pas s’empêcher de penser au livre boulonné créé par Fortunato Depero en 1929. La même année, il produit un autre livre, les Voyelles, réalisé en collaboration avec Jean-François Bory. Chaque voyelle correspond à un artiste comme Robert Indiana (pour le A), Tom Philips (le E), Jean-Paul Albinet (le I), Hervé Télémaque (le O), Roy Lichstenstein (le U). Plus tard, il s’emploie à fabriquer un poème d’Alain Jouffroy, De point en point, qui se présente comme un poème valise, au sens propre comme au figuré puisqu’il est placé dans une petite valise, le titre comprenant un aphorisme du poète. En 2006, il achève les ? sont des crochets de Pierre Tilman. Il s’agit de vingt signes typographiques correspondant à vingt réponses qui utilisent à chaque fois une des lettres du titre, avec un crochet qui est placé en guise de point d’interrogation. Avec l’Y Le Lazlo, fait en collaboration de J.-F. Bory, l’épaisseur du papier a permis l’inscription en creux des lettres. Le volume consiste en une collection de mots commençant par un y. Quant aux voyelles, elles font échos au poème d’Arthur Rimbaud.

Nous sommes en 2008 : il met en œuvre un recueil d’Henri Chopin (le dernier), le Silence de l’ouïe, avec des poèmes typographiques et le timbre du silence de Lazlo. La même année, il achève les consonnes de Jean-François Bory, avec une alternance de textes sur calques et d’impressions sur plusieurs papiers différents. Enfin, pour le Goût du neuf de Daniel Birga, il utilise neuf couleurs qui sont la manifestation de neuf éléments.

A travers toutes ces expériences livresques, Jean-Noël Laszlo se révèle un artiste singulier puisque ce qu’il crée peut être aussi bien une œuvre pleine et entière, telle qu’on l’entend en général, qu’une œuvre à plusieurs mains (au moins quatre). Quoi qu’il en soit, ses ouvrages ne peuvent être que sous le signe de l’invention, l’auteur qui accepte d’être édité par ses soins lui fournissant la matière première de ses manipulations extravagantes et savantes. Et il convient de comprendre qu’un fil rouge permet de suivre le cours de ses pensées, car c’est ce fil qui conduit du mot à la lettre et de la lettre à la poésie dans toute sa vérité.

Gérard-Georges Lemaire

Les quatre dernières expositions personnelles de Jean-Noël Laszlo:
2010 Galerie Jean-François Meyer - Marseile
2009 Musée Arthur Rimbaud - Charleville-Mézières
       Galerie du tableau - Marseille
2008 Musée départemental Stéphane Mallarmé - Vulaines-sur-Seine

mis en ligne le 06/10/2010
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