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A propos de " Hardcore "
La contestation poIitique est-elle soluble dans l'art et inversement
A propos de " Hardcore " : La contestation poIitique est-elle soluble dans l
par Humbert Fusco-Vigné
L'exercice demandé à chacun de nous est d'exprimer sans ambages notre point de vue sur cette exposition. Je suis sensible aux arts et donc très attentif grâce à VERSO, à leurs manifestations contemporaines. Ma grand-mère disait à propos de tout : " ils ne savent plus quoi inventer ". J'ai envie d'épouser sa formule à propos d'Hardcore. Le Palais de Tokyo a toujours été mon musée préféré à Paris. Je l'aime et ce qui y est organisé fait honneur aux arts de tous les temps, y compris le nôtre, avec, pourquoi pas, ses nouveaux hangars en forme d'usine à scandales. On y est merveilleusement reçu et c'est bien animé. Mais Hardcore, est-ce de l'art, même contemporain ?Je ne le crois pas. Comme pour Warhol à New York dans les années soixante, ce sont autant de trouvailles impulsives, délirantes et désordonnées. Elles sont souvent intéressantes ou amusantes, parfois émouvantes et provocantes, mais rarement plaisantes au regard de l'Art. L'esprit qui souffle ici est du niveau de l'abomination des graffitis qui nous envahissent toujours plus et qui associent la nullité graphique à la désolation créatrice. Les œuvres, vidéos (cf Mc Do), cyber-porno et autres carcasses brûlées de voitures sur fond de bannière américaine sur la lune ou de mur éventré comme par une bombe, nous rappellent ces manifestations spontanéistes soixante huitardes—verbiage compris—revisitées par les protestations contre les excès d'une mondialisation américanisante ! On en a vu d'autres. Encore un effort mesdames messieurs les artistes, et surtout du travail SVP, fussiez-vous " hors la loi " comme l'écrit Emmanuelle Lequeux de notre confrère Beaux Arts magazine, ou encore " activistes, en prise avec les problèmes de société " comme dit, dans Art Actuel, notre consœur Diane Gaudin. Ou alors, devenez anarchistes, c'est un autre boulot !

Tout comme on ne fait pas, sauf exception géniale, de bonne littérature avec de bons sentiments, on ne fait pas de bonne politique en expulsant de soi n'importe comment, au nom de " la politique ", n'importe quelle manifestation supposée artistique. Et cela surtout quand on se nourrit en priorité de fantasmes personnels et de provocations plutôt qu'en référence à des problématiques et à leurs solutions. Sauf peut-être, chez Hardcore, dans l'esprit guévariste de naguère, avec cette unité mobile sans grâce, écolo-artisanale, de production d'huile pour diesels, légalement interdite, à partir de graines de tournesol et de colza ! Car s'il y a des créations qui touchent chez Hardcore, elles ne relèvent pas vraiment de l'art. N'est pas Gérard Fromanger qui veut. Il fut sensible, comme tant de ses contemporains, dont nous étions, au gauchisme politique d'il y a trente-cinq ans. Il est devenu un grand créateur en rebondissant sur des thèmes de notre temps mais en sachant les conjuguer aux motifs artistiques éternels des civilisations humaines. C'est ça l'art selon moi-même contemporain. Je ne dis pas que le sien ne fut pas un peu " à la mode ", il m'en voudrait mais il y a eu un peu de ça, parfois, dans la dimension " politique ” de ses créations. Son œuvre a acquis une variété et une plénitude qui le classe désormais parmi les meilleurs. Chez Hardcore, c'est la clochardisation événementielle d'un certain gauchisme artistique qu'il nous faut digérer. Le transit gastro-intestinal de ce misérabilisme créatif se révèle difficile et se cherche une issue. Ça ne prend pas.

Non, cher Jérôme Sans, codirecteur de mon cher Palais de Tokyo, ce n'est parce que l'Art sera moins confiné dans son propre champ et sera davantage en relation directe avec la réalité qu'il sera meilleur. Ni l'esthétique ni les manifestations artistiques ne peuvent être politiques, sauf dans les régimes totalitaires ou en période de totalitarisme artistique. Ce n'est surtout pas parce que notre monde est devenu absurde que les manifestations de l'art contemporain doivent le devenir.
Humbert Fusco-Vigné
mis en ligne le 01/09/2003
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