Ce n'est que de sexe et de désirs que parle finalement le spectacle Fantasmes de Demoiselles de René de Obaldia. Voici le jeu des petites annonces pour une rencontre amoureuse, érotique... On s'ennuie ferme au bureau, et chaque secrétaire de projeter la petite annonce idéale au bout de laquelle, poisson étincelant, nacré, frétillant sous l'hameçon, le mâle de rêve s'extrairait des flots grisâtres du quotidien. Ah, il y en a vraiment pour tous les goûts ! Et les fantasmes hétéroclites, innombrables, sont offerts au public qui se gondole... Mais de quoi l'on rit au juste ? Est-ce la créativité explosive d'Obaldia, imaginative, littéraire, qui nous réjouit autant que la variété pléthorique des voies d'accès à la jouissance ? Est-ce au contraire la monomanie du sexe se piégeant dans son leurre, qui déclenche un comique de répétition ? Ou encore cette folle hystérie féminine suscitant, comme une défense contre une sourde anxiété, le rire ? Ou enfin, plus gravement, profondément, est-ce, une fois le capot de la bienséance soulevé, toute les "machines désirantes" (Deleuze et Guattari) turbinant devant nous qui déclenchent ce rire de la confrontation brutale, désespérante et éblouissante au réel ?... La mise en scène enlevée de Pierre Jacquemont feint, comme il se doit, de rester légère, et les comédiens jouent à merveille le transformisme. Mais on n'est pas dupe : lister les fantasmes en un délirant catalogue, jouer avec eux comme s'ils n'étaient que des mécaniques diversement agencées, c'est tout sauf superficiel, et, même si l'on ne fait qu'en rire, ça va beaucoup plus loin que moult tragédies larmoyantes sur l'amour impossible ou le malheur d'être né !