Dossier Groborne
Quelques mots échangés avec Robert Groborne le 15 octobre 2011

par Gérard-Georges Lemaire

mis en ligne le 28/12/2011

Avez-vous connu des heures graves où vous avez conclu que vous aviez fait complètement fausse route ?
Non. Pas vraiment. Mais je sais que mon vrai départ a eu lieu en 1968, donc tard. Cette année là, j’ai eu le sentiment d’être devenu moi-même. J’étais en Bretagne et j’ai terminé une peinture qui m’a fait croire que cette fois j’y étais, que tout d’un coup j’étais passé de l’autre côté. C’était une sorte de catharsis. Avant, j’étais très influencé par Jean Arp, que j’aimais beaucoup, Ben Nicholson, et quelques autres. J’ai fait des formes architectoniques. L'une que j'ai appelée Béthel faisait allusion au rêve de Jacob quand Dieu lui annonce qu’il dressera à son réveil la pierre qui lui a servi de chevet et qu’il devra la nommer Béthel. Je suis, encore aujourd'hui, tenté de donner forme à des architectures rêvées. Dans ma dernière exposition, c’est manifeste.

Toutefois, peut-on dire si ces formes apparaissent ou disparaissent ?
Je ne sais pas. C’est mon côté Hubert Robert (rires). Il y a une géométrie et quelque chose qui se délite. Il y a toujours eu dans mon travail ces deux choses : une géométrie évidente ou sous-jacente et un débrayé apparent, chose qui n’existait pas avant la révélation de Fragonard. L’autre jour, j’ai commencé un relief , j’ai toujours besoin du relief pour avancer. En travaillant une plaque de médium, je l’ai cassée. Au lieu d'abandonner, au lieu de la mettre dans le sens prévu, je l’ai mise dans l’autre sens. Si le médium s’est cassé, c’est qu’il devait se casser. Tout d’un coup, quelque chose arrive que je n’avais pas prévue. Quand je fais des gravures, les états sont très différents du premier. J’aime bien aller au bout de la forme qui, elle, commande. J’aime beaucoup ça. Il me semble qu’il existe une contradiction entre ce qui se construit et ce qui se défait... Je pense aux photographies. Je crois qu’il y a ça dans la photographie. Le spectateur voit quelque chose, mais ne voit évidemment pas ce qu’elle cache. La photographie que j’avais prise dans ta cour montre des plantes, des volets, mais l’histoire proprement dite, il n’y a que toi et moi qui la connaissons. Au fond, je suis plus intéressé par ce qui est caché que ce qui est exposé.

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