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Morteyrol,
le peintre « pop-new figuration »
La peinture figurative
par Pierre Tilman
Partant du fait que Bernard Morteyrol est un peintre figuratif, j’ai rédigé les dix-sept propositions suivantes qui lui sont dédiées et qui constituent une approche de son travail mais également de celui des artistes qui se préoccupent, en apportant chacun sa propre réponse, des mêmes types de questions :

La peinture figurative est une réflexion sur le monde dans lequel nous vivons, sur la réalité qui est la nôtre (matière, nature, ville, objets, hommes et femmes…)

La peinture figurative est une réflexion sur nos appréhensions physiques et mentales de la réalité, sur nos sensations, nos perceptions, les mécanismes de notre vision et de notre cerveau…

La peinture figurative est une réflexion sur notre culture qui est fortement liée à l’oeil, langage visuel, images, clichés, stéréotypes…

La peinture figurative est une réflexion sur les outils, les systèmes, les codes de représentation et de lecture, dessin, couleur, perspective, photo, cinéma, vidéo, ordinateur…

La peinture figurative est une réflexion sur notre imaginaire, le jeu et le plaisir, le rêve, le fantasme, le symbole, l’énigme, le mystère, l’illusion…

La peinture figurative est une réflexion sur notre société et ses limites, ce qui est accepté et qu’il est permis de montrer et de voir, ce qui est refusé et qu’il est interdit d’exhiber, de révéler et de regarder…

La peinture figurative est une réflexion sur la liberté, l’utilisation et la manipulation des images et par les images, idéologie, propagande, stratégie, information, médias, presse, télé, informatique…

La peinture figurative est une réflexion sur l’aspect financier et l’impact économique des images, marchandise, publicité, consommation…

La peinture figurative est une réflexion sur l’art, son histoire, son évolution, ses tendances, ses recherches et sur les oeuvres des autres artistes passés et présents…

La peinture figurative est une réflexion sur la tradition et la nouveauté, sur le lien avec les valeurs constantes et le doute, la révolte, la rupture, la remise en question…

La peinture figurative est une réflexion sur ses propres frontières, ses propres définitions et qui peuvent d’ailleurs varier avec le temps. C’est ainsi que, selon les époques et les critères culturels, elle peut rejeter ou admettre certaines formes – jugées anecdotiques ou mineures – d’imagerie, l’illustration, la décoration, l’art populaire ou certains aspects du réalisme conventionnel, pompier, académique…

La peinture figurative est une réflexion sur les conventions morales et les jugements esthétiques : sur le goût, le sens de la beauté et de la laideur, sur la grandeur, le sublime, la réussite plastique et sur les thèmes qui semblent les plus quotidiens et de moindre importance, sur la banalité, sur ce qui a l’air d’être bancal, mal fait, sur l’impureté…

La peinture figurative est une réflexion sur son statut, sa fonction et sur son utilité. A-t-elle quelque chose à dire, un message à faire passer, un contenu, un signifiant à comprendre, un engagement à affirmer ? Doit-elle émouvoir ? Ou se situe-t-elle dans l’agencement stylistique des couleurs et des formes, dans l’autopréoccupation du langage qui se construit et se déconstruit ?

La peinture figurative est une réflexion sur l’histoire. Une peinture d’histoire est-elle possible ? L’artiste doit-il être le témoin de son époque ou doit-il se tenir à l’écart ? Et s’il ne rend pas compte de l’histoire, peut-il au moins raconter ses histoires ?

La peinture figurative est une réflexion sur le spectacle, sur la vérité et l’illusion, sur l’authenticité, sur la narration, sur la fausseté et le mensonge, sur la mise en scène, sur la théâtralité, sur le montage des séductions et des impacts destinés à capter les yeux du regardeur…

La peinture figurative n’est pas une réflexion uniquement sur l’espace comme cela paraît évident mais bien une réflexion sur le temps. L’expérience que font les artistes de la pratique de la peinture implique un rapport particulier avec le temps. Le geste de la main qui consiste à appliquer la couleur sur la surface du tableau inscrit la trace du mouvement et de la durée. Cela donne une vie à la peinture qui la distingue de formes mécaniques dans lesquelles le temps se dépose d’un seul coup et uniformément.

Le temps qui se trouve conservé dans l’espace du tableau demande un certain temps pour être perçu par le regardeur. Une oeuvre peinte n’est pas toujours facile à déchiffrer, à ressentir et à mémoriser. Actuellement, cela devient encore plus difficile à cause des médias. L’attention n’est plus que de quelques secondes. Un, deux, trois, et hop, on passe à une autre image, il faut aller vite dans le monde de la communication ! La peinture est marginalisée, sa place n’est plus au centre. Et même si ce n’est pas son but, même si elle ne le veut pas vraiment, elle est en résistance.

Pierre Tilman
mis en ligne le 06/09/2008
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