Les artistes et les expos

Dessin sans dessein au MUBA de Tourcoing

par Amélie Adamo

mis en ligne le 28/12/2011

       Soulignons ici la présence d’Orlando Mostyn Owen (né en 1973), dont nous connaissions surtout le travail de peinture, représenté en France par sa galerie parisienne. Plusieurs dessins sont ici rassemblées, et montrés au public pour la première fois. Relevant d’une fraîcheur singulière, celle de l’expérimentation, et d’une plasticité propre au médium de l’aquarelle, ces dessins portent toutefois un peu de ce qui constitue la force de sa peinture. Dans ses vues urbaines ou scènes de bord de mer, femmes et enfants surgissent dans l’éclat d’une mémoire solaire méditerranéenne qui demeure néanmoins toujours travaillée par l’angoisse. L’ambiguïté des formes, qui agissent par surimpressions, recouvrements et disparitions, invitent l’œil au voyage, entre peurs et souvenirs, contrées réelles et frontières imaginaires. Des dessins d’Humberto Poblete Bustamente (né en 1966) sont aussi réunis : grâces et baigneuses, croquées par quelques traits de crayon d’où jaillissent, en torsion audacieuse, dédoublement du tracé ou courbes délicieuses, là une hanche, là un sein, ici la sensualité d’une chair en mouvement. Cette économie de moyen permet de regarder autrement l’œuvre de cet artiste dont la peinture (actuellement exposée à la galerie Polad Hardouin) privilégie l’amas et l’épaisseur d’une matérialité qui tend à ensevelir et ronger le motif.
       
Parmi les partis pris les plus étonnants enfin : la présence de dessins d’Eugène Leroy (né en 1910). Tantôt scènes du quotidien ou à caractère historique, interprétée ou imaginée, tantôt scènes aux sujets plus étranges et mystérieux, ces créations réalisées à l’encre et au crayon sont prétextes à de libres expérimentations formelles, ici par hachures noires, là par tracés de couleurs. Ces dessins, issus de la donation Leroy ou récupérés chez des proches de l’artiste, n’ont jamais été montrés. Ils permettent par ailleurs de porter un regard autre sur le peintre dont l’œuvre n’est pas nécessairement et exclusivement à voir comme représentative d’une certaine Ecole de Paris, dans sa veine existentialiste et intimiste. Cela est une manière salutaire de s’écarter de cette tendance - trop souvent imposée par l’Histoire officielle – à limiter la lecture d’une oeuvre, au nom d’une généalogie unique et fictive. Lecture absurdement figée et particulièrement sectaire. Fut-ce pour cette seule raison, l’exposition vaut le détour !

Amélie Adamo

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action d'éclat

« Paysage mental, le dessin sans dessein »,
MUBA de Tourcoing,
du 14 octobre 2011 au 30 janvier 2012.

http://www.muba-tourcoing.fr/