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Chroniques des lettres
Chronique de l’an V (4)
Chroniques des lettres : Chronique de l’an V(4) par Gérard-Georges Lemaire
par Gérard-Georges Lemaire
IMAGES DE LA MODERNITÉ
L’Action restreinte, l’art
moderne selon Mallarmé,
Jean-François Chevrier
Editions Hazan
On sait quels liens Stéphane Mallarmé a pu entretenir avec les arts de son temps. Ses relations avec Edouard Manet et Odilon Redon ont été profondes et ont laissé des traces significatives Dans l’énorme catalogue de l’exposition du musée de Nantes baptisée L’Action restreinte, l’art moderne selon Mallarmé, présentée par Jean-François Chevrier, il est question de l’art moderne du XX ème siècle beaucoup plus que des contemporains de l’auteur de Divagations. L’auteur nous avertit que cette manifestation et par conséquent cette publication est « une relecture de l’art moderne selon Mallarmé». Comme ce dernier est décédé en 1898, l’entreprise peut sembler hasardeuse – et elle l’est. Sans doute cela fait-il partie de cette nouvelle approche de l’histoire de l’art qui consiste justement à nier l’histoire ; personne n’est obligé de suivre le cours de la chronologie qui présente bien des pièges. Mais de là à annoncer que «Fernand Léger est le moins mallarméen des quatre grands peintres cubistes » il y a une marge – un gouffre. De plus, Léger n’a jamais été tout à fait cubiste. Ce qui pose un autre problème. Broodthaers et bien entendu Duchamp, père le l’Église réformée de l’art, sont omniprésents, comme une multitude de grands et de petits saints de la modernité, tous adoubés (rétrospectivement par l’écrivain). Et quand on lit, entre mille choses tout aussi absurdes les unes que les autres, que « pour Mallarmé comme pour Artaud, le vide reste une expérience du gouffre et du néant», les bras vous en tombent. Est-ce un exercice oulipien ? Une parodie? Une farce? Il faut l’espérer.
Un design américain
David A. Hanks et Anne Hoy
Flammarion


L’histoire du design est celle d’un conflit permanent entre les nécessité de la production industrielle et le désir de créer des objets ayant une valeur esthétique. De ce conflit sont nées bien des désillusions, mais aussi de réussites indéniables. C’est le cas du style paquebot, appelé Steamline en anglais. Le très beau livre de David A. Hanks et d’Anne Hoy, Un design américain, explore l’immense territoire de ce style aux Etats-Unis exclusivement. Il a vu le jour pendant les années trente et qui a eu des développements les décennies suivantes et, en fait, jusqu’à nos jours. Son principe de base est l’aérodynamique.

L’aviation autant que la marine et les chemins de fer en sont les principaux moteurs. Il a fallu alors trouver un équivalent dans tous les autres secteurs d’activités et les auteurs montrent avec humour des sous-vêtements « streamlined » et même un cercueil conçu dans cette optique. L‘architecture s’est vite adaptée au milieu des années trente à ce style tout en courbes qui évoque la vitesse et lui attribue une connotation particulièrement sophistiquée. Richard H. Mandel est l’un des créateurs les plus remarquables dans ce domaine. Raymond Loewy, qui va imposer sa marque de fabrique dans les années cinquante, crée déjà des objets et du mobilier de bureau dans cet esprit. Des projets les plus futuriste jusqu’au calendrier de bureau ou à l’agrafeuse, le monde du travail est converti à ce nouveau mode de représentation du monde. Et c’est la même chose pour l’univers domestique.

Après la guerre, ce style va subir une ultérieure mutation et grâce à l’esthétique de l’automobile va se populariser. Ce livre ne fait sans doute pas la somme de tout ce qui a été entrepris dans cette optique, mais permet d’en comprendre les grandes orientations. Il fera autorité en la matière.

L’ART CONTEMPORAIN EN QUESTION
Paix
Clara Halter & Jean-Michel Wilmotte,
Editions Cercle d'Art
Fait-on de l’art avec de bons sentiments? La colombe de Picasso peut laisser planer un doute. Bien sûr, Guernica demeure un modèle absolu d’art qui véhicule un message puissant. Mais est-ce le message qui compte dans cette grande « fresque » en noir blanc et gris ? Les textes qui accompagnent ce livre luxueux consacré à l’oeuvre récente de Clara Halter (la paix est onéreuse semble-t-il) démontrent à quel point les considérations sur les relations entre l’art et les idéologies ou celles qui peuvent unir l’art et les grandes causes humanitaires sont ambiguës.

Clara Halter conçoit des monuments à la paix. Et tout un chacun de fustiger les monuments aux morts. Et pourtant, ce sont de facto d’indispensables lieux de mémoire pour ne pas oublier ceux que la guerre a arraché à la vie. Ils ne sont pas nécessairement une apologie des conflits armés et ils témoignent plutôt de leur atrocité. Il peut paraître naïf de célébrer la paix car cela revient à dire qu’elle serait exceptionnelle. La guerre serait un état constant du monde et la paix un état rare qui mérite d’être commémoré.

Quoi qu’il en soit, il me semble difficile de voir la question d’une manière aussi simpliste que l’artiste qui pense qu’il suffit décrire le mot paix dans toutes les langues de l’univers pour avoir fait le tour de la question. Tout cela est très propret, très bien pensant, très fédérateur (mais fédérateur sur quoi ? sur un concept kantien ?) et, d’un point de vue purement esthétique, très peu exaltant. Enfin, les lecteurs jugeront sur pièces en feuilletant Paix, et en lisant Philippe Dagen, Chantal Béret, Bernard-Henri Lévy.

OUTILS DE TRAVAIL
Symboles du pouvoir
de Paola Rapelli
Symboles et cultes de lÕEglise
de Rosa Giorgi
Editions Hazan
Dans la collection « guide des Arts – Repères iconographiques – », Hazan vient de faire paraître deux titres indispensables pour les amateurs de peinture ancienne. Le premier, Symboles du pouvoir de Paola Rapelli, permet de se familiariser avec les grandes familles régnantes européennes, de l’Antiquité à Napoléon III, ainsi qu’avec les insignes du pouvoir. En somme, rien de ce qui a été la politique de Rome à la fin du XIX ème siècle n’est laissé de côté, ce qui n’est pas indifférent car, bien sûr, les paramètres ont bien changé en ce domaine.

Et puis si ‘lon peut reconnaître un Cesare Borgia ou un Laurent de Magnifique, saurait-on distinguer un Visconti ou un Sforza ? Les Symboles et cultes de l’Eglise de Rosa Giorgi est encore plus indispensable car il ne s’agit pas tant de faire le distinguo entre tous les papes (n’importe qui y perdrait son latin), mais entre les vêtements des différents ordre, la spécificité des costumes religieux, les objets rituels. La symbolique chrétienne nous est familière.

Mais beaucoup de choses ont été représenté différemment au fil de l’histoire et méritent bien des éclaircissement. C’est là un guide bien conçu, bien que certaines explications sont parfois un peu courtes. Je donne : un seul exemple : l’évolution des habits ecclésiastiques des clercs, diacres et sous-diacres ne sont pas analysés avec assez de précision. Mais l’ensemble est plus qu’honorable et en tout cas est nécessaire pour tout amateur et même pour tout historien d’art.

Un dernier mot. Tout collectionneur se doit de posséder deux ouvrages essentiels pour se retrouver dans le dédale des cotations plus ou moins fantasques de l’art d’aujourd’hui : L’Akoun 2005 et La Côte des photos (Editions la Côte de l’Amateur). Ces répertoires sont réalisés avec beaucoup de soin et permettent de se faire une idée du prix moyen et des prix les plus élevés des oeuvres picturales ou photographiques en France.

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mis en ligne le 28/08/2005
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