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[verso-hebdo]
10-02-2022
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La lettre hebdomadaire de Jean-Luc Chalumeau |
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Retour du Sinister Pop ? |
La galerie Templon présente jusqu'au 26 février dans son bel espace de Bruxelles une exposition d' « oeuvres choisies » d'Edward et Nancy Kienholz. Ces derniers sont désignés comme des « figures emblématiques du pop-art américain ». Soit, mais il faudrait préciser que la démarche terriblement agressive et misérabiliste de Kienholz a été particulièrement représentative, avec celle de George Segal, de ce que l'on appelait le sinister pop dans les années 70. Edward Kienholz, né en 1927, est mort en 1994 : avait-il évolué depuis son terrifiant environnement sur le thème de la « maison close » en 1970 ? Les pièces réunies à Bruxelles incitent à répondre plutôt non, et c'est ce qui rend l'exposition intéressante. Fils de fermier dans l'ouest américain, il avait personnellement souffert de la Grande Dépression et en était resté marqué à vie. De l'american way of life, il avait choisi de ne voir en tant qu'artiste que les aspects les plus sombres.
Kienholz s'était fait remarquer, à la fin des années 60, avec son Monument aux morts de la guerre portatif. Il s'agissait de soldats de couleur métallique figés dans une attitude héroïque, conforme aux images de propagande du gouvernement, devant un décor de café où les visiteurs pouvaient acheter des boissons à un distributeur automatique et où une femme dans une baignoire semblait momifiée dans un bain amaigrissant. Kienholz évoquait à sa manière les guerres de Corée et du Viet Nam évidemment détestées. Par la suite, l'artiste a multiplié les mises en scène lugubres, inhumaines, quasi insupportables qui décrivait le nouvel « American Way of Death » La mort était dès ce moment au principe de l'oeuvre de Kienholz, ainsi que la maison close ou l'hôpital avec lesquels il dénonçait inlassablement la médiocrité, la bêtise, la déchéance et la solitude, lots communs de la triste vie des marginaux américains.
Dans les années 80-90, Kienholz travaillait toujours à démythifier l'art par les mêmes moyens, comme en témoigne The Rhinestone Beaver Peep Show Triptych de 1980 visible à Bruxelles, un « assemblage techniques mixtes » particulièrement spectaculaire sur le thème de l'exploitation des femmes et la marchandisation du corps. Dans d'autres oeuvres, Edward et Nancys dénonçaient le consumérisme débridé, le racisme quotidien, le sexisme, les violences structurelles et l'hypocrisie religieuse qui étaient pour eux autant de caractéristiques de l'Amérique. Certains commentateurs ont voulu aller au-delà de l'aspect désagréable et souvent intolérable des environnements des Kienholz : Germano Celant en particulier : « Kienholz n'a pas tenté de sublimer la méchanceté et tragédie de la vie, ses conditions de solitude et trivialité, mais les utilisait comme un moyen de faire briller un univers bas et populaire, dans lequel le gaspillé et le sale, le dépravé et le sale représentaient une beauté nouvelle et surprenante. » Une beauté nouvelle ? Peut-être, mais on peut aussi y voir un témoignage saisissant sur la réalité du déclin de l'Occident en général et de l'Amérique en particulier.
www.templon.com
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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