Les artistes et les expos
les cartes célestes et terrestres de Rossella Faraone
par Gérard-Georges Lemaire
      Il n’en reste pas moins vrai que des peintres, soit par nostalgie, par les nécessités intrinsèques de leur travail, n’en continuent pas moins à utiliser des modes de fabrication de leurs couleurs appartenant à une ère révolue. Mais ce n’est sont que des survivances ou des démarches isolées. D’autant plus que les artistes depuis le début du siècle passé n’ont pas cessé d’introduire des matériaux nouveaux, du papier journal et du papier de tapisserie dans les collages de Georges Braque et de Pablo Picasso dès les années dix, jusqu’aux objets les plus hétéroclites – les matériaux des décharges chez Antoni’ Tapiès, les voitures amenées à la casse pour César ou pour Claes Oldenburg, les affiches déchirées avec Villeglé et Arthur Aeschbacher, les restes de repas avec toute la vaisselle salle pour Daniel Spoerri, l’ardoise dans le cas de Raoul Ubac, les morceaux de sucre et le chocolat chez Aldo Mondino, la liste en serait interminable. En somme la peinture s’est souvent dispensée de son médium originel.

      Rossella Faraone appartient à cette nouvelle catégorie de peintres qui travaille sans l’aide de la peinture. Jusqu’à présent elle a choisi de faire ses compositions qu’avec des pierres. Il convient ici de dissiper toutes sortes de malentendus qui pourraient naître dès qu’on songe au monde minéral. Elle n’est pas sculptrice et entend bien demeuré dans le champ pictural, même si ses œuvres sont excentriques de ce point de vue (mais très relativement au su et au vu de ce que nous savons de l’art moderne !) Elle ne s’intéresse pas au bas-relief ni à la ronde-bosse, même si ses travaux présentent des volumes provoqués par la nature de la matière première qu’elle manipule. Elle peut bien entendu joué sur l’épaisseur et l’irrégularité des surfaces qu’elle prémédite. Mais ce n’est là qu’un des traits singuliers de sa démarche.

      Son savoir faire, sa technique extrêmement sophistiquées pour tirer des pierres ce qu’elle a en tête, elle les fait dériver de son métier qui est la joaillerie d’art. Pour elle, les saphirs, les rubis, les émeraudes, les onyx n’ont plus aucun secret. Qu’on ne croit pas cependant qu’elle s’est contentée de transposer une technique dont elle maîtrise tous les aspects dans ce nouveau domaine d’expression, qui n’en serait alors que le pur et simple prolongement. Dans l’exercice de l’art, elle oublie les lois de sa profession, qui déjà requiert des connaissances poussées et une pratique subtile, pour ne conserver que sa profonde intimité avec les pierres de valeur. En fait il n’est pas aisé de passer d’un artisanat qui a déjà une dimension artistique à l’art pur, c’est-à-dire qui exclut toute fonction et toute valeur d’usage.

      Peu d’artistes ont utilisé la pierre. Souvenons-nous tout de même que nos lointains ancêtres ont laissé l’empreinte de leurs mains, dessinés les animaux et les chasseurs sur la paroi de leurs cavernes - comme on peut le voir à Lascaux en Dordogne, peintures rupestres remontant à environ 14 000 ans avant notre ère, Altamira, près de 10 000 ans avant notre ère, et à Cingle de la Mola en Espagne, créations remontant à près de 7000 ans avant notre ère - ou sur le flan de massifs rocheux.

Les artistes et les expos : Mireille Loup. Autoportrait, autofiction : le je(u) et le masque par Xavier Lambert
mis en ligne le 06/10/2010
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