Bibliothèque de l’amateur d’art

par Gérard-Georges Lemaire

mis en ligne le 01/09/2011

Nils Udo est un des grands artistes du Land Art. Mais cette mise en boîte dans une catégorie aussi précise est gênante et ne lui rend pas justice. Le champ de son investigation est bien la surface de la Terre, mais il le fait toujours dans un sens très particulier. Ce bel album, qui rassemble un choix de ses photographies en couleurs, qui montrent quelques unes de ses créations in situ dans des paysages d’une beauté fabuleuse. Son travail consiste essentiellement à souligner le caractère incongru et superbe de ce que la Nature peut produire. Ses œuvres se fondent parfois avec le monde minéral ou végétal et ne font parfois que souligner et exalter leur beauté. Ces mises en scène de l’espace ne font qu’exalter la géométrie pure de la Création qui puise ses ressources dans la réalité matérielle et que nous voyions souvent comme le fait du divin.
Photographies, Nils Udo, Gourcuff Gradenigo, 60 p., 12 €.

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A ses débuts, Véronique Bigo s’est passionnée pour les ruines. En 1986, Pierre Klossowski lui a consacré une belle présentation où il disait : « Quand Rilke, refusant toute signification historique que leur donnerait la science, ne considère que l’être absolu de ses fragments en tant que fragments : ils sont, et cela est tout. Comment ne pas y reconnaître, aujourd’hui, le point de départ de l’expérience que réalise Véronique. » Bien avant cette date, l’artiste a disséminé dans l’espace des fragments d’architectures et de sculptures antiques. Ses tableaux (des reliefs en réalité) ressemblent alors à des boîtes que les archéologues utilisent pour présenter leurs découvertes. Puis elle s’est intéressée de plus près aux membres fracturés de ces œuvres abîmés par le temps : elle l’exprime avec des toiles où le caractère lacunaire des pièces est mis en évidence. Cette phase de sa recherche est fondatrice car si son désir va ensuite se déplacer et s’attacher à d’autres objets, le protocole demeure le même (le sujet et le fond sont presque toujours traités avec la même teinte ou rendus dans un registre restreint de beiges, de noir et de gris). Elle imagine des objets d’ameublement dans l’esprit du design radical des années 80 à Milan, mais aussi du mobilier ancien et des choses connexes, comme, par exemple, Le Dernier manuscrit de Proust d’A la recherche du temps perdu (1993), des sacs à main en tous genres, des carafes, des bouteilles, des casques, des couteaux. Puis elle se tourne vers la botanique et focalise son attention sur des fleurs, ou plus exactement sur une partie de la plante. Elle introduit peu à peu de la couleur (jusque là limitée à quelques traces subsidiaires). Entre temps, dès 1993, elle a abordé d’autres rivages plastiques. Ils ont une connotation conceptuelle. Elle conçoit le Sac de J. Beuys, le Sac de Mme Klein, qui constituent plus qu’une parenthèse : c’est le point de départ d’une spéculation nouvelle. En effet, elle utilise ses « sujets » d’une façon plus fantasque, comme la paire de chausses qu’elle associe à Piero della Francesca, comme l’aile angélique et plusieurs choses destinées à la protection de la tête. Son univers s’enrichit sans cesse est se remplit d’une multitude de pièces vestimentaires qui oblitèrent le corps. A travers cette anthologie de textes et de reproductions, on peut récapituler les principales étapes de la quête originale de Véronique Bigo.
V. Bigo, peinture Méta-physique, histoire de tache, collectif, Villa Tamaris centre d’art/La Nerthe, 240 p.

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