Dossier Claude Jeanmart
Questionner l'humain Entretien avec Claude Jeanmart
par Daphné Brottet
mis en ligne le 18/04/2012

Cette mise en commun de ces moyens souvent considérés comme antagonistes, m’a permis une grande variété de nuances techniques et plastiques. Elle a aussi le grand avantage, grâce à ce métissage, de dissimuler les effets techniques spectaculaires. Peu de gens savent que tout est réalisé, au final, sur ordinateur, et c’est très bien ainsi. Le regard se concentre sur le sens de l’image et non pas sur les prouesses techniques pourtant bien réelles. J’ai principalement choisi des textes très brefs, pour avoir plus de marge d’imagination. S’il y a peu d’indications il faut créer les décors, trouver les tenues, situer l’action. Mais dans mon travail, tout n’est pas dit, et donc tout n’est pas montré. Et dans ce qui est montré, une part est enfouie comme dans un effet de palimpseste. Certains fragments s’adressent à certains spectateurs, qui pourront les décoder plus que d’autres. Je n’attribue aucune valeur particulière aux outils informatiques ; ils sont des outils, comme le sont les crayons et les pinceaux.

Vous avez enseigné les arts appliqués, le graphisme et les techniques liées à la photo et à la vidéo à des étudiants de différents niveaux et horizons culturels et sociaux. Cette expérience professionnelle a-t-elle interféré dans vos choix esthétiques?

Pendant mes années d’enseignement, je me suis toujours efforcé de ne pas parler de mon travail personnel avec les étudiants, pour ne pas les influencer, et pour ne pas me laisser influencer à mon tour. Une année cependant, une étudiante est revenue du centre de documentation, avec un numéro de la revue Beaux-Arts, où l’on voyait une photo d’une de mes toiles, exposées à la Fiac. Surprise, questions, Certains élèves particulièrement attirés par la peinture, m’ont ensuite demandé mon avis, sur ce qu’ils réalisaient en dehors même de l’école.
L’enseignement en classe préparatoire, auprès d’étudiants qui avaient choisi les activités artistiques, m’a beaucoup stimulé, après les années riches mais épuisantes en lycée et collège. Le temps consacré à ma production personnelle a fortement gagné en importance ; la création a pris le pas sur la pédagogie. Je me suis plongé dans les questionnements théoriques pour éclairer les propositions et pistes artistiques en direction de mes élèves. J’ai développé les recherches en vidéo, photo et images numériques, techniques pour lesquelles la génération de mes étudiants manifestait une grande appétence. J’ai pu me recentrer sur la peinture et sur les créations mixtes, dans lesquelles l’outil informatique que je maniais depuis 1979 prenait toute sa place.
Parallèlement, ma rencontre avec Jordi Cerda, et son travail très conceptuel a donné lieu à des co-productions toujours soutenues par une réflexion théorique.

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