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[verso-hebdo]
06-09-2018
La chronique
de Pierre Corcos
Arles, les arènes de la photographie.
Du début juillet à la fin septembre, Arles devient la capitale indiscutée de la photographie. Des photos, on en trouve dans ses musées, églises, caves, couvents, chapelles, cloîtres, maisons désaffectées, sur ses murs en affichage sauvage, dans moult galeries, bref dans le moindre recoin. Ces 49èmes Rencontres de la Photographie drainent de nombreux professionnels et amateurs (bardés d'appareils impressionnants), notamment venus d'Asie. La semaine d'ouverture, fête perpétuelle avec ses concerts, lectures, événements, projections et multiples vernissages, invite à ne pas se reposer. La photographie y dialogue avec d'autres arts, avec les sciences humaines également. Le pari de Sam Stourdzé, directeur des Rencontres d'Arles, est tenu : suggérer que la photographie reste le médium le mieux placé comme témoin de son époque, en la mettant en perspective avec un passé récent.

36 expositions de photographies, avec chacune leur commissaire, un festival « Voies off » qui monte en puissance, qualité, et toujours cette précision, cette clarté des commentaires de présentation qui évitent globalement la langue de bois, fréquente, de l'art contemporain. Et, comme chaque fois, quelques grands thèmes groupant des photographes différents... Juste un mot pour exprimer une lassitude à l'égard du thème américain (« America great again »), récurrent mais d'autant moins justifié que l'« american dream » perforé de toutes parts, prenant l'eau avec Trump, intéresse moins aujourd'hui sans doute que ce qui se passe en Turquie (15 photographes turcs qui ne pourraient exposer sous Erdogan), en Chine (Feng Li et son ordinaire insolite, Yingquang Quo et son enquête stylisée sur les mariages arrangés chinois), en Pologne (Lucas Olivet), à Cuba (M.C. Brown) ou en Tchétchénie (Olga Kravets, Maria Morina et Oksana Yushko). Cependant, trois des photographes de la série américaine peuvent être aussi convoqués dans un projet de critique sociale : l'immense Robert Frank déconstruit l'imagerie officielle ou fétiche des magazines « main stream » par ses photos subjectives, décalées, ludiques, dégagées de l'information et télescopant des réalités différentes. Cette rétrospective « Sidelines », finalement l'un des sommets du festival, nous démontre qu'à la liberté du photographe répond, par une relative polysémie de la photo, la liberté d'interprétation du regardeur. Depardon, quant à lui, est encore plus extérieur aux stéréotypes américains, jusqu'à risquer une « non-signifiance » à effet critique indirect. Mais c'est Paul Graham (« la blancheur de la baleine ») qui, en surexposant à l'extrême des photos de misère sociale, traduit plastiquement l'invisibilité des exclus, des opprimés ; et Laura Henno qui, en photographiant sous une lumière mordorée, des marginaux et miséreux dans le désert californien, semble en appeler à une rédemption spirituelle. Comme d'habitude, la Fondation Manuel Rivera-Ortiz, nous sensibilise (« Hope ») à de vastes problèmes de société, comme l'accueil problématique des migrants, que Patrick Willocq, par exemple, met en scène positivement dans de grandes photos rutilantes et utopistes. Pour ajouter un mot sur cette dimension sociocritique, Matthias Olmeta, dans son ironique « Traité de paix », compose différents tableaux méditatifs et désespérés de l'horreur (crimes de guerre, génocides, tortures) par un collage charbonneux et carrelé.
Il faut ajouter à cette dimension sociocritique incontournable de la photographie, sa dimension mémorielle : la remarquable exposition « 1968, quelle histoire ! » documente, grâce à des archives de la préfecture de police de Paris, de Paris-Match, de diverses agences photo, le cinquantenaire de cette immense révolte collective, précoce et avortée ; Christoph Draeger et Heidrun Holzfeind se plongent, eux, dans une communauté (« Le projet Auroville ») fondée alors, et qui perdure. Alfred Latour (« Cadrer son temps »), qui était aussi peintre et graveur, nous rend un Paris des années 30 émouvant par son détail et rigoureux par sa composition. Bien entendu, la photographie sert à l'investigation d'une réalité humaine encore plus surprenante que la fiction : dans « Le dernier testament », Jonas Bendiksen a rencontré sept hommes dans le monde, convaincus d'être le Messie redescendu sur terre... Cela nous vaut d'ahurissantes photographies qui nous interpellent sur ce pathétique besoin de croire, mais aussi d'être à n'importe quel prix reconnu ; dans « le village Potemkine », Gregor Sailer s'est attardé sur les « Villes-leurres » aux fonctions multiples ; dans « H+ », Mathieu Gafsou a traduit en photos déroutantes, le « transhumanisme »... Etc. La photographie peut également s'interroger sur elle-même, en suivant une démarche réflexive, comme c'est le cas dans « The hobbyist » : la photographie est ici analysée en tant que hobby.
Voilà donc un programme pléthorique dont on rend compte ici partiellement. Entre les expositions du « In » et celles de « Voies off », la promenade dans les galeries, éphémères ou permanentes, laissait aussi entrevoir des sensibilités émergentes : la nature, redécouverte par l'oeil photographique, et sans doute honorée par une sensibilité écologique montante, ouvre à d'éblouissantes épiphanies. Gérard Niemetzky, dans « Mortelles Natures », revisite la nature morte en se focalisant sur le dessin tourmenté, subtil du végétal, tandis que Francis Grosjean (« Nature Divinity ») déifie cinq éléments de la nature en les transformant en figures totémiques. Laure Pubert rend hommage à la nuit. Le corps humain a encore ses thuriféraires photographes... Manières sans doute de répondre à ce futurisme technologique qui fut l'une des marques de ces 49èmes Rencontres de la Photographie.
Alors, la photographie ne connaît pas la crise ? Sans doute pas au vu de ces expositions innombrables et variées... Ce serait plutôt les photographes dans leur majorité qui, précaires, concurrencés, encore mal vendus, la connaissent bel et bien !
Pierre Corcos
corcos16@gmail.com
06-09-2018
 
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Verso n°136

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