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[verso-hebdo]
03-09-2015
La chronique
de Pierre Corcos
Arles,médium photographique
Art, le medium photographique a commencé à être perçu comme tel à la naissance, en 1965, de la première collection publique de photographies dans un musée des beaux-arts français : ce fut au Musée Réattu, à Arles. Jean-Maurice Rouquette, conservateur, et Lucien Clergue, photographe, osèrent ce projet d'institutionnalisation, qui tout à la fois préparait le festival des Rencontres Photographiques d'Arles, la création de l'École nationale de photographie, et surtout la reconnaissance de la photographie comme 8ème art !... Arles découvrit alors, avec des yeux enfin dessillés, Adams, Avedon, Beaton, Doisneau, Izis, Maar, Ray, Strand, Weston. Ils ne sont plus du coup techniciens ou artisans photographes, mais tout simplement artistes. L'accrochage, au fil des salles, montrait la variété stimulante, créative des démarches photographiques, suggérant ainsi la dimension esthétique en germe dans cette pratique. Paysages, portraits, scènes réalistes, natures mortes, architectures... Des collectionneurs furent approchés, comme Hélène Cingria, Jérôme Hill. Le Musée propose une collection permanente de 123 oeuvres et des expositions temporaires. Et celle qui démarre ce mois de juillet-là fut consacrée à Cartier-Bresson, Doisneau, Vigneau. Ce fut un grand succès... Il est bon, cinquante ans plus tard, à l'occasion des Rencontres de la Photographie 2015 à Arles (édition dédiée cette année à Lucien Clergue), de se rappeler, avec quelque émotion, le rôle éminent que la ville a joué dans la reconnaissance de l'art photographique.

La 46ème édition des Rencontres de la Photographie d'Arles est aussi la première de son nouveau directeur, Sam Stourdzé... 35 expositions sur 20000 mètres carré, 3500 photographies : une programmation offrant quelque idée de la scène photographique contemporaine, son état des lieux. Peut-être la première appréciation générale positive sera-t-elle, pour nombre de visiteurs, la qualité des explications, commentaires, toujours précis, clairs, évitant cette répulsive et dissuasive langue de bois qui a contribué à la réputation ésotérique de l'art contemporain. Une deuxième remarque, neutre : on trouve dans cette édition, et c'était le voeu de Sam Stourdzé, une tentative de lier la photographie et d'autres arts, comme le cinéma, la musique, l'architecture. Oui, pourquoi pas ? Cette « histoire de la photo » par les pochettes de disque, dans l'immense exposition Total Records, est à la fois émouvante et amusante. D'un autre côté, on pourrait soutenir que la photographie mérite d'être vue, longtemps encore, dans sa démarche esthétique propre et sans apport extérieur, pour être, toujours davantage, reçue comme un art à part entière... Enfin, une réserve tout de même sur la part trop importante accordée à la civilisation U.S. dans ce qu'elle a de plus hégémonique, trivial, consumériste et vulgaire (qu'apportent vraiment les photographies du Néerlandais Toon Michiels sur le kitsch des enseignes lumineuses américaines ? Et le photographe Stephen Shore, porté aux nues, ne s'est-il pas complu dans une emphase de la banalité made in U.S.A. ?), tandis que des parties immenses de la planète se trouvent minorées ou échappent à l'investigation des photographes...

Réserve mineure par rapport au durable choc de l'exposition Les Paradis, rapport annuel de Paolo Woods et Gabriele Galimberti... Cette enquête, sur les lieux opaques où se dissimule l'argent « sale », le produit d'exploitations, pillage, extorsion diverses, l'argent échappé au fisc et échappant à l'économie « vivante » (32000 milliards de dollars tout de même, dissimulés dans les fameux paradis fiscaux !), entretenant donc la « crise », tient par l'extrême précision de sa documentation du rapport-charge. Et par la justesse de son traitement plastique (aucun flou, aucune fuite, aucune ombre, et rien que les couleurs glacées, aseptisées du seul paradis que la civilisation capitaliste ait pu générer : celui de l'argent), cette suite de photos témoigne d'une maîtrise totale de la forme convergeant avec le propos... Il serait peut-être déconseillé aux âmes enclines à la désespérance et au pessimisme d'aller voir, tout de suite après, l'exposition MMM à l'église des Frères-Prêcheurs. En effet, la musique inventive de Matthieu Chedid, en fond sonore, ne parvient pas à dissiper le malaise que suscitent à la longue les photographies de Martin Parr ( cf. Verso Hebdo du 24/4/2014), si exactes, cruelles et sarcastiques, sur les « individus moyens » actuels, conformistes, abrutis, kitschisés, consuméristes, indifférents et narcissiques (les permanents « selfies »...), ne voyant plus le monde entier que sous l'apparence d'un immense supermarché du visible, dont les éléments seraient à stocker machinalement dans leur smartphone-caddie. Entre les « puissants », leurs paradis fiscaux, et les « impuissants », leur boulimique indifférence, on peut tracer un segment dur, épais, qui semble exclure toute ligne de fuite novatrice... Le visiteur ne trouvera guère plus de consolation au travail dérangeant d'Ambroise Tézenas sur le « dark tourisme » (I was here, tourisme de la désolation), interrogeant l'obscénité de certains regards qui se délectent - en voyages organisés dans quelques lieux de sinistre mémoire et par appareils de photos interposés - des catastrophes ou des horreurs subies par d'autres humains.

Mais, comme d'habitude, ce qui finit par l'emporter dans ce festival de photographie - simplement parce qu'il s'agit d'art, donc de créativité, recherches et trouvailles -, c'est la joie devant les singularités plurielles et le champ toujours dilaté des possibles. Et, comme d'une exposition à l'autre, on visite nécessairement des cloîtres, églises, palais, chapelles, musées ou friches industrielles, on se rend compte qu'on (re)découvre Arles et son patrimoine en même temps. Le soleil escorte ces promenades. On aurait du mal à en être mécontent...
Pierre Corcos
03-09-2015
 
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Verso n°136

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