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[verso-hebdo]
21-04-2022
La chronique
de Gérard-Georges Lemaire
Chronique d'un bibliomane mélancolique

Mille ans de mangas, Brigitte Koyama Richard, Flammarion, 234 p., 35 euro.

Le titre a de quoi surprendre car les mangas sont des bandes dessinées japonaises qui ont eu un grand succès en Occident après la dernière guerre et qui ont donné lieu à des films et à des dessins animés pour la télévision. Il existe des librairies à Paris qui les vendent avec les textes en japonais. Ils continuent à plaire et cette mode ne semble pas devoir diminuer, bien au contraire. Pour déchiffrer ce titre, il faut savoir que ces histoires surtout graphiques et hautement modernes sont issues de la gravure de l'ère de Meiji, mais aussi à des rouleaux illustrés dont la date correspondrait à notre Moyen Âge (l'auteur fait une comparaison avec la tapisserie de Bayeux attribuée à la reine Mathilde remontant au XIe siècle). La plupart des grands livres classiques de la littérature nippone, tel le Genji monogatari. Cette tradition a évolué et s'est prolongée au fil des siècles. Avec l'ère Meiji, l'incroyable diffusion des livres enluminés par les grands xylographes qui ont favorisé pendant cette période un incroyable élan de créativité avec des maîtres possédant dextérité (les planches peuvent avoir dix couleurs !) et inventivité ont frappé les Occidentaux dès que ces oeuvres gravées ont traversé les océans. Si la filiation est évidente et très bien documentée par l'auteur, on ne peut que noter la grande différence entre les oeuvres d'arts et le style des mangas contemporains, qui ressortent de l'art populaire. Mais nous devons nous souvenir que les estampes étaient en leur temps considérées comme de l'art populaire. Cela devrait nous faire réfléchir ! En tout cas, le livre est on ne peut plus intéressant et son illustration abondante rend les choses très claires.




Les Cerisiers en fleur par les grands maîtres de l'estampe japonaise, Anne Sefrioui, un coffret + un livret, Hazan, s. p., 24, 90 euro.

On ne saurait trop nous étonner de voir tant de cerisiers en fleur dans les paysages japonais de l'ukiyo-é. Ils ont depuis longtemps une valeur symbolique importante car ils représentent l'avènement du printemps. Cela a même donné naissance à une pratique qui est celle du hanami, la contemplation des fleurs de cerisier -, une coutume vieille de plus de mille ans. Aujourd'hui, cette effloraison est considérée comme une fête nationale, à l'instar de la chute des feuilles de l'érable à l'automne. Leur présence dans les estampes est par conséquent une donnée iconographique incontournable. Elle suggère aussi des valeurs esthétiques et religieuses. Utagawa Kunisada et Utagawa Hiroshige des XVIIIe et XIXe siècles, pour ne citer que deux de ces illustres maîtres de la xylographie japonaise, ont aimé traiter ce thème au milieu d'une composition. C'est faire entrer dans l'oeuvre non seulement la beauté et les coloris de ces fleurs, mais aussi y insinuer une poésie pleine de charme et d'émerveillement : la nature est ici un bon génie qui vient au secours de l'artiste qui tient à donner une connotation heureuse à sa création. Le plus souvent, on voit les cerisiers s'épanouir majestueusement au sein d'un paysage, ou dans une scène présentant des jeunes femmes portant des kimonos magnifiques. Ils apparaissent aussi dans des fêtes auxquelles participent des foules euphoriques, ou encore dans d'autres situations, toujours joyeuses et d'une grande beauté. Cet album est une petite merveille, qui rend hommage au génie artistique de ces graveurs hors-pair, et qui nous permettent de mieux comprendre l'esprit profond de l'art et de la culture des Japonais.




Monet / Rothko, sous la direction de Cyrille Sciama, musée de Giverny / Editions Flammarion, 112 p., 35 euro.

Depuis un certain temps, les conservateurs des musées français se croient obligés, même au Louvre, de faire figurer des artistes contemporains des lieux consacrés aux siècles passés. Et puis est venu le temps des jumelages, souvent des plus absurdes entre un maître d'autrefois et un artiste contemporain. Dans le cas présent, on a décidé de mettre en parallèle l'oeuvre du maître des lieux et des oeuvres de l'artiste américain Mark Rothko. Ce dernier est abstrait, mais certainement pas dans une perspective proche de Monet à la fin de sa longue vie. La seule analogie qu'on puisse établir entre ces deux peintres, c'est le fait qu'ils ont bénéficié chacun d'un lieu spectaculaire pour présenter leurs oeuvres : la salle du sous-sol du musée de l'Orangerie à Paris pour les Nymphéas de Monet que ce dernier a obtenu grâce à Georges Clémenceau, et la chapelle de Houston (Texas) pour Rothko. Profane pour le premier, religieux pour le second, leur création a été faite pour mettre en valeur leur audace et leur grandeur et aussi avec la volonté de les sacraliser. On lit avec beaucoup d'intérêt e long article de Cyrille Sciama sur l'introduction de l'abstraction dans l'art impression - ce n'est en réalité qu'une visée virtuelle et chez Monet, un grave problème oculaire a accéléré cette tendance comme on peut le voir dans la collection du musée Marmottan.
Quoi qu'il en soit, il ne sert à rien de s'attarder sur le thème cette confrontation, mais il convient plutôt de savourer ces grands moments de la peinture. Espérons qu'on abandonne sous peu ce genre d'exposition et contentons-nous ici de jouir de la contemplation de ces deux maîtres. Remarquons que les Nymphéas ont été peintes pendant les années où Vassili Kandinsky « invente » l'art abstrait et publie son essai, Du spirituel dans l'art. Ce catalogue recèle une excellente et très utile documentation et des réflexions pouvant faire comprendre de quelle façon l'abstraction a pu se développer à partir d'une recherche antérieure (Kandinsky a pu voir la suite des Meules de Monet et n'a pas compris de quoi il s'agissait, pensant que c'était un paysage abstrait).




Discours sur la première décade de Tite-Live, Nicolas Machiavel, « Le Goût des Lettres », préface de Claude Lefort, traduit de l'italien par Toussaint Guiraudet, édition établie par Annick Pélisssier, 616 p., 15, 50 euro.

Comme l'a observé avec justesse Claude Lefort dans sa remarquable préface, on a fini par faire de Nicolas Machiavel (de son vrai nom Nicolò di Bernardo dei Machiavelli, 1469-1527) le théoricien du machiavélisme, et cela dès le dernier tiers du XVIe siècle. Le succès du Prince (Principatibus), achevé en 1513 et publié en 1532 à Rome a fait oublier ses autres ouvrages, comme L'Art de la guerre et ces Discours. Sa pensée a eu une grande influence après sa disparition et il demeure encore de nos jours une référence incontournable pour les études historiques et politiques. Les Discours, eux, écrits entre 1520 et 1526, parassent également posthumes, en 1531. C'est la somme de son expérience du bon et du mauvais gouvernement et de l'organisation de la vie sociale et politique dans les cités-Etats. Pourquoi s'est-il attaché à la figure de Tite-Live ? Sans aucun doute pour ses idées républicaines, car Machiavel était très admiratif de ce qu'a été Rome avant l'avènement de l'Empire.
Le premier tiers de ce vaste ouvrage est consacré à cette question. A ses yeux, Rome demeure le paradigme sur le plan politique et Tite-Live a été capable de montrer à quel point le système antique est exemplaire - même pour les hommes de la Renaissance. Après quoi, il a esquissé une histoire de l'évolution des sociétés jusqu'à son époque. Il a pris en considération trois genres de gouvernements : le monarchique, l'aristocratique et le populaire. Il examine ensuite trois catégories de mauvais gouvernements : le despotique, l'oligarchique et le démocratique. Après quoi, il s'est demandé quel type de gouvernement pourrait, de son temps, être concevable et juste.
En revenant sur la question du pouvoir à Rome, il s'est posé la question : une république du peuple ou une république tenue par les nobles ? La question est délicate car les nobles tiennent à maintenir leur domination alors que les classes populaires s'efforcent de se hisser jusqu'à une relative liberté. Il étudie aussi d'autres manières de gouverner et a pris pour exemple Sparte et Venise. C'est dire à quel point il a tenu à observer ce phénomène sous le plus d'angles possibles, cherchant chaque fois à montrer les défauts, mais aussi les effets bénéfiques de chaque modèle. Il n'a pas hésité à s'en prendre à l'Eglise (il a songé surtout à Jules II et à Clément VII) et il a aussi critiqué les dictateurs romains après avoir expliqué la nature des différends entre le peuple et le Sénat. Enfin, il a tenté de définir ce que serait une république désirable. Le lecteur ne peut qu'être surpris par la modernité de ses considérations sur le peuple roman et sur les jeux complexes qui s'instaurent entre sénateurs et tribuns du peuple en fonction de règles d'équilibres plus ou moins inhérentes à ce genre d'équilibre. Son idée de la politique est empreinte de sagesse et on doit voir dans cet ouvrage autre chose qu'une recherche historique ou une philosophie abstraite de l'art de gouverner : c'est une vision de la politique qui pourrait encore s'appliquer en notre siècle et qui demeure donc une source inépuisable de réflexions sur nos systèmes, qui sont encore plus divers et complexes que ceux qui ont existé du vivant du génial Machiavel.




La Belle Anglaise, la vie de « Perdita » Robinson, Lucien de L'Anzay, Les Belles Lettres, 348 p., 21, 50 euro.

Née fin 1756, fille aînée de Nicholas Darby, un riche capitaine de marine marchande et négociant de Bristol (il faut savoir que c'était la seconde ville importante en Angleterre pendant la seconde moitié du XVIIIe siècle), elle a eu une éducation soignée. Elle a fait ses études primaires dans une pension, où elle a a appris l'arithmétique, l'écriture et la musique. Elle a toujours eu une éducation soignée et était traitée avec attention chez ses parents. L'avenir se présentait pour le mieux pour elle jusqu'au jour où la flotte de son père a été capturée. Ruinés, les membres de la famille Darby se sont installés à Londres. Mary est envoyée dans une autre institution.
Précoce, elle est quasiment une jeune femme accomplie passé l'âge de 13 ans. David Garrik, l'un des hommes les plus en vue dans le monde théâtrale lui propose de jouer dans Juliette dans la tragédie de Shakespeare. La femme du capitaine Darby, Hester, a ouvert une école pour jeunes filles dans le quartier de Chelsea. Mary tombe amoureuse à l'âge de quinze ans d'un jeune homme à peine plus âgé qu'elle et qui n'a pas encore de situation : il a renoncé à l'avocature. Mais c'est un héritier. Sa mère la pousse à l'épouser, ce qu'elle finit par faire. Le jeune couple déjà bien instable s'est alors installé dans le Beconshire. Ils ont eu une fille, Maria. Mais son mari qui dépensait sans compter, est emprisonné pour dettes, Mary le suivi dans sa cellule de la Fleet Prison avec leur petite fille. Elle y a écrit des poèmes qui seront publiés en 1775.
On a proposé à son époux un emploi lui permettant de sortir de prison, ce qu'il a refusé, et ce fut Mary qui accepta l'offre pour sauver son couple. Libérée, elle fait la connaissance de Georgiana Cavendish, duchesse du Devonshire, à qui elle avait envoyé son livre. Les deux femmes sont alors devenues amies et la duchesse va l'aider dans son ascension sociale et culturelle. Elle a renoué avec le théâtre et est remontée sur les planches avec succès. Elle a tenu quelques rôles shakespeariens et puis a joué dans des pièces de Sheridan. Elle a joué aussi dans une adaptation de The Winter's Tales en tenant le rôle principal de Perdita, ce qui lui a valu son surnom. Elle est remarquée par le duc de Galles (le futur Georges IV) et elle est devenue sa maîtresse. Il a été le grand amour de sa vie. Elle aussi devenue la coqueluche de la bonne société londonienne, pour sa beauté, son talent et son intelligence. Joshua Reynolds, Thomas Gainsborough, George Romney et d'autres peintres illustres ont fait son portrait. « Perdita » Robinson est aussi apparue alors comme un arbitre du goût et une extravagante. Elle a continué à écrire des poésies et aussi des oeuvres romanesques, qui ont souvent été publiées posthumes, auxquelles il convient d'ajouter des drames et mêmes des écrits politiques.
Le prince de Galles s'est séparé d'elle en 1781. A cette époque, elle a été surnommée la Sappho anglaise car sa littérature a connu un certain succès. Elle est décédée en 1800 et a laissé des mémoires que sa fille fera paraître. L'auteur a su faire un portrait très pertinent de cette femme hors du commun, très talentueuse, et a aussi dépeint avec beaucoup de science les milieux artistiques et intellectuels de Londres, qui ont été un peu mis dans l'ombre à cause de la philosophie des Lumières et de la Révolution française. C'est remarquable d'érudition et c'est aussi bien écrit : on a l'impression de lire un beau roman historique et non une étude érudite. Il faut vraiment découvrir cette Mary Perdita Robinson dont je n'ai pu que souligner quelques aspects de son existence si riche. Ce livre mérite sans conteste d'être sur votre table de chevet tant il est passionnant.
Gérard-Georges Lemaire
21-04-2022
 
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Verso n°136

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