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[verso-hebdo]
29-09-2022
La lettre hebdomadaire
de Jean-Luc Chalumeau
Quelque part dans l'inachevé :
Hélène Muheim
On entre dans la galerie Valérie Delaunay, et l'on est saisi. Sur les cimaises s'alignent, par ensembles de deux, trois ou quatre, toujours sur exactement la même ligne, d'extraordinaires dessins. On discerne d'abord des montagnes. Path 1 par exemple, réalisé en 2022, présente en effet de hauts sommets avec aiguilles de pierre et glaciers. Ils semblent se refléter dans une étendue d'eau. Mais ce n'est pas cela : pour le regardeur fasciné et un peu perdu, ce sont des arbres et des racines en hiver qui sortent à la base de ces masses telluriques et tendent à les envahir. C'est exécuté avec d'infinies précisions au moyen d'ombres à paupières, d'encres et de poudre de graphite sur papier (70 x 200 cm). Ces oeuvres mystérieuses apparaissent au premier regard comme des figures privilégiées sur un fond ordinaire dont elles se séparent. Chaque oeuvre refuse de se laisser intégrer au monde quotidien. Elle exige que nous reconnaissions son autonomie : notre perception doit instituer pour elle un fond qui lui soit propre. Ces dessins appartiennent exactement au monde de l'art : ils irréalisent le réel en l'esthétisant.

Pas besoin de savoir qu'Hélène Muheim est effectivement née dans les Alpes et d'être informé des péripéties de sa vie. A travers les remous de l'histoire générale, son art semble bien être au principe d'une histoire qui lui est propre. A sa manière, il est le chant de cette histoire, il n'en est pas l'illustration. Il ne signifie pas à la manière d'un livre : il ne s'adresse ni à la volonté pour l'avertir, ni à l'intelligence pour l'instruire, il ne montre que lui-même. S'il y a du « réel » en lui (ces montagnes dont Hélène Muheim s'inspire), c'est pour se mesurer à lui et le refaire. En signifiant, ces oeuvres ne sont pas au service du monde, elles sont à l'origine du monde de l'artiste. Ce qui veut dire que si nous voulons nommer ce monde, nous ne pouvons que nommer sa créatrice et donc désigner une façon singulière de traiter un sujet, de faire servir le sensible à la représentation : bref un style. Il y a bien ici un monde, le monde d'Hélène Muheim, qui est exprimé et non représenté.

Les dessins d'Hélène Muheim, au niveau même de la représentation, se refusent à l'imitation et constituent une création originale par le souci qu'ils ont d'être expressifs : ici, c'est le monde exprimé qui aimante le monde représenté. Les oeuvres d'art véritables, même si elles déconcertent parfois l'entendement (« quoi ! des arbres envahissant le pied d'une montagne ? ») portent en elles le principe de leur unité, une unité qui est à la fois l'unité perçue de l'apparence lorsque l'apparence est rigoureusement composée (c'est le cas) et l'unité sentie d'un monde représenté par l'apparence, ou plutôt émané d'elle, de sorte que le représenté signifie lui-même cette totalité et se convertit en monde. La phénoménologie selon Merleau-Ponty qualifierait les dessins d'Hélène Muheim d'objets esthétiques et noterait qu'ils expriment avec force et précision le monde de l'artiste et qu'ils lui donnent à la fois volume et unité. Ce principe d'unité vient donc à l'objet esthétique de ce qu'il est capable d'expression. C'est à dire de ce qu'il signifie non seulement en représentant mais, à travers ce qu'il représente, en produisant sur qui le perçoit (par exemple moi entrant dans la galerie), une certaine impression, en manifestant une certaine qualité que les mots ne peuvent traduire, mais qui se communique en éveillant ce qu'il faut appeler un sentiment. Rarissimes sont les artistes produisant des objets esthétiques de cette sorte. (« quelque part dans l'inachevé » est le titre de l'exposition, 42 rue de Montmorency 75003, jusqu'au 15 octobre 2022.)

www.helene-muheim.fr
J.-L. C.
verso.sarl@wanadoo.fr
29-09-2022
 

Verso n°136

L'artiste du mois : Marko Velk

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