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[verso-hebdo]
07-12-2017
La chronique
de Gérard-Georges Lemaire
Chronique d'un bibliomane mélancolique

Les Arts primitifs et populaires du Brésil, Benjamin Péret, édition de Jérôme Duwa & Leonor Lourenço de Abreu, Les Editions du Sandre, 216 p., 35 euro.

Benjamin Péret (1889-1959) fait figure de Petit Poucet du surréalisme, à tort ou à raison. Sans doute parce qu'il est demeuré le plus fidèle à ses premiers principes, en particulier l'écriture automatique. Il s'est aussi passionné pour le langage, avec un livre sur les contrepètries, qui lui ont valu longtemps les foudres de la censures et les proverbes (qu'il aime détourner). Il s'est en outre engagé politiquement, comme beaucoup de ses camarades, mais il est le seul surréaliste qui est allée combattre en Espagne dans les rangs du POUM et puis la mythique colonne Durutti.. Mais c'est un événement de sa vie privée qui bouleverse et son existence et ses centres d'intérêts : en 1928, il épouse la chanteuse lyrique brésilienne Elsie Houston. Il réside au Brésil de 1929 à 1931. Il se passionne pour les arts précolombiens, mais aussi pour l'art populaire alors que ses compagnons sont plus attirés par l'art africains ou les arts océaniens. Cette passion ne cesse de le dévorer et ses nouveaux voyages en terre brésilienne ne font que renfoncer ce gour pour collectionner les objets, mais aussi pour les photographies. Pendant la guerre, il se retrouve en exil au Mexique, ce qui lui permet de se familiariser avec une autre culture, s'où il tire ses Airs mexicains en 1952. Plusieurs ouvrages naissent de ce désir de découvrir sans cesse plus ce monde, sans jamais négligé le présent au profit d'un passé déjà lointain. Un an après sa mort paraissent ses Mythes, légendes et contes populaires d'Amérique. Pour ce qui est de la création artistiques, il n'a guère pu publié que quelques articles article, comme « Aspects précolombiens » paru dans la revue Marco Polo en 1956, «Art de fêtes et de cérémonies », publié dans L’OEil en 1958, et «  L'Art populaire du Brésil, » dans Marco Polo (reproduits dans ce livre). Par la suite, on a pu publier un de ses livres projetés pour être illustrés de clichés, comme Dans la zone torride du Brésil. Visite aux Indiens. Ce magnifique ouvrage permet de juger du sérieux de ses investigations et aussi de l'amour qu'il a pu porter à ces objets souvent d'un amusante naïveté, mais aussi d'une grande poésie. C'est une autre façon fantastique de découvrir l'esprit poétique de Benjamin Péret.




Tal Coat, la liberté farouche de peindre, rétrospective, sous la direction de Bruno Ely et de Jean-Pascal Léger, Somogy Editions d'Art : musée Granet, Aix-en-Provence, 184 p., 29 euro.

Tal Coat est un artiste secret et c'est peut-être ce secret qui fascine tant les amateurs. En tout cas il a eu le mérite de passer outre le faux débat entre abstraction et figuration : il a été abstrait, tout comme il a été figuratif, sans le moindre complexe et parfois simultanément. La première oeuvre reproduite dans le catalogue est une interprétation du célèbre tableau de Chardin, La Raie. On peut y comprendre le désir de Tal Coat en 1927 (il n'a que vingt-deux ans) de déplacer plusieurs codes picturaux et de réinterpréter cette oeuvre magistrale. Par la suite, il passe par différentes phases expérimentales, dans le sens où il va se chercher un style en passant par différentes influences et parvenant tout juste à définir un type de personnage stylisé, mais conservant un certain réalisme. Il faut attendre 1930, avec Homme lisant le journal, pour le voir commencer à affirmer une façon de peindre et de rendre un sujet. Mais son cheminement redevient chaotique, avec des passages par le grotesque, qui me paraît une forme d'auto ironie face à ses difficultés. Le Nu aux bas rouges de 1934 n'échappe pas à cette optique, mais affirme quelque chose dans la construction de l'espace par plan chromatiques simplifiés et par la position du modèle. Mais chaque fois qu'il réussit à trouve rune forme d'équilibre, il retourne à ses errances et change même assez radicalement de manière avec, par exemple, les Massacres (1937). Ce plutôt dans le paysage qu'il réussit le mieux à s'affirmer, déjà avec les différents Toits de 1933 et avec son Paysage aixois en 1943. Les natures mortes qu'il exécute pendant la guerre sont l'amorce d'une recherche plus équilibrée (dans la pensée). En fait, son histoire commence avec les Poissons en 1945, qu'il décline jusqu'à l'abstraction. Dès lors, toujours mené par le démon du changement permanent d'écriture, il arrive néanmoins à trouver son chemin, car l'abstraction l'oblige à une certaine décantation. Profil sous l'eau de 1949 est l'une des expressions majeures d'une réduction formelle à partir d'un fond presque monochrome et de quelques traits conjugués, qu'il ne décline pas, mais qui est une sorte de repère dans sa peinture des années suivantes. Il possède désormais un univers qui lui est propre et il continue à lui donner consistante au cours des années 1950. Mais il faut attendre les années 1960 pour le voir créer des toiles puissantes et inoubliables comme Signes dans une falaise rouge (1965), qui possèdent une poésie intense. Tout ce qui suit est merveilleux et dépouillé -, avec une force qui est un paradoxe quand on voit l'économie de moyens qu'il emploie. Cette rétrospective est d'abord l'histoire d'un homme en quête de lui-même et qui échoue longtemps avant de parvenir au but recherché et dont il a sans doute ignoré la teneur.




Montparnasse, l'âge d'or, Jean-Paul Caracalla, « La petite vermillon », La Table Ronde, 176 p., 7,10 euro.

Champs-Elysées, une histoire, Jean-Paul Caracalla, « La petite vermillon », La Table Ronde, 128 p., 7,10 euro.


Jean-Paul Caracalla s'est spécialisé dans les us et coutumes de Paris. Mais il l'a fait non d'un simple point de vue historique ou sociologique : il a tenu à raconter la vie intellectuelle et artistique qui a fait de Paris la capitale du monde dans un passé pas si lointain que cela. C'est est d'autant plus évident dans son Montparnasse, où il relate la vie intense qui a saisi ce quartier au début du siècle précédent, avec ces artistes qui quittent Montmartre, alors l'épicentre de l'art nouveau, pour s'installer dans les anciens établissements artisanaux de Montrouge, dans la partie rattachée à la capitale, pour en faire leurs ateliers. Il nous parle des cafés du carrefour Vavin, qui commence leur carrière mythique avec ces peintres et ces sculpteurs qui ont changé de rive ou qui sont à peine débarqués de contrées orientale de l'Europe ou de la Russie. Il y a aussi les poètes, comme Paul Fort, qui réunit autour de sa tables des dizaines et des dizaines d'écrivains venus des quatre coins du continent, Apollinaire, Cocteau, Marinetti, Léon-Paul Fargue et mille autres. Puis sont arrivés les Américains, du Sud d'abord, puis du Nord. Sans oublier bien entendu les hommes politiques en exil, en particulier les Russes qui se rassemblaient souvent à la Rotonde. Enfin, il y a toute la faune qui évoluait dans cet univers, des modèles et des demi)mondaines, des excentriques et aussi des amateurs d'art et des marchands d'art venus flairer l'air qui tirait dans ce quartier. C'est un bon livre, qui constitue une belle introduction à la vie intense de ce quartier qui vit désormais de cette légende. Ses Champs-Elysées révèlent un autre aspect de l'évolution de Paris au cours du XIXe siècle et pendant le premier tiers du XXe siècle. L'élégante promenade s'est peu à peu transformée avec ses magnifiques hôtels particuliers, celles des nouvelles fortunes, mais aussi celles des cocottes vivant dans un luxe inouïe et puis, avec sa transformation progressive en avenue moderne où le Fouquet's, après avoir été le rendez-vous des pionniers de l'aviation, est devenu le grand rendez-vous mondain et politique (ce qu'il est encore aujourd'hui). Ce livre est passionnant lui aussi. Donc il vous convient de vous plonger dans ces deux petits livres qui renferment l'histoire merveilleuse de la capitale.




Une photographe dans son cocon, Julien Blaine, Editions Fidel Anthelme X, Marseille.

Françoise Janicot est un artiste qui n'a pas été reconnu à sa juste valeur. Maintenant qu'elle vient de nous quitter, comme c'est la coutume, on commence à s'intéresser à son histoire. C'est une triste réalité, qui ne cesse hélas de se répéter. Julien Blaine, qui l'a bien connue, a publié récemment un poème en son honneur, qui condense à peu près toutes les phases de son oeuvre. Il s'est condensé sur l'Encoconnage, quand elle s'enroulait complètement son corps dans du gros cordage et jour, avec sa verve habituelle, avec le bombyx du mûrier et de bien autres papillons: à son sens, c'est une réminiscence de son enfance. Il évoque aussi son long parcours de photographe. Il n'a omis qu'une chose : son oeuvre de peintre, que personne, à de rares exceptions près, n'a pris en considération. Mais peu importante : ce n'est pas un portrait objectif et exhaustif : c'est une image qui est resté bien ancrée dans sa mémoire et dans son coeur, qu'il a su avec son mode poétique si particulier, nous faire partager sans le moindre pathos. Il faut saluer Julien Blaine d'avoir fait ce geste, un geste de créateur qui rend hommage à un autre créateur qui nous a quitté, qui vaut bien de longs discours.




Béatrice Casadesus, Sébastien Gokalp, « Polychrome », Ides et Calendes / Ville de Rambouillet, 128 p., 24 euro.

Cette artiste n'est pas inconnue. Depuis longtemps, sa valeur est reconnue. Mais elle ne fait pas partie de ces créateurs à la mode. Si elle a commencé par la figuration (elle a été transportée par l'oeuvre de Georges Seurat, qui la convainc d'abandonner la sculpture, sa première passion). Mais si la figure réapparaît ponctuellement dans son travail, on peut tout de même avancer qu'elle évolue dans les territoires de l'abstraction. Elle n'est pas une lointaine disciple de l'Ecole de Paris. Il serait d'ailleurs assez difficile de la classer dans une quelconque catégorie. Elle recherche une abstraction quasiment débarrassée du signe. Elle se limite souvent à des lignes qui accentue ou contrecarrent la couleur dominante de la toile. Elle n'a pas recours qu'à un seul principe de définition de ses oeuvres : elle peut tout aussi bien employé de minces lignes verticales irrégulière comme une trame répétitive, qui semble avoir été placée au-dessous de la surface colorée. Elle peut aller à un genre de peinture presque monochromes, comme dans la suite intitulée Mer de mues (2010). Même si les différences sont peu perceptibles à première vue, force est de constater que ses tableaux connaissent des variations importantes au fil du temps. Tout se joue chez elle dans la sensibilité tonale et dans le jeu formel presque imperceptible. Il y a a chez cette femme un désir de se dire à travers un langage qui est le moins déchiffrable possible. Elle veut, par le seul jeu de la peinture manifester des sentiments, des sensations, des pensées, sans que le spectateur doive les rechercher ailleurs que dans la jouissance rétinienne. Bien sûr, les choses ne sont pas si simples. Mais c'est le fondement de sa démarche.




L'Art culinaire, Apicius, traduit du latin et présenté par Jacques André, Les Belles Lettres, 304 p., 17 euro.

De Marcus Gavius Apicius (vers 25 avant notre ère - 37 de notre ère) , on sait qu'assez peu de choses vérifiables, sinon qu'il était riche et avait des relations avec Tibère. Son histoire, ou plutôt sa légende, commence après sa mort. En effet, Tacite l'évoque, Sénèque en fait le paradigme de la corruption, Martial parle de sa fortune, puis Apion d'Alexandrie écrit un livre à son sujet, le Luxe d'Apicius (malheureusement disparu), Athénée en parle dans le Banquet des sophistes (vers 294). Pline l'Ancien est le seul à évoquer ses dons culinaires. Tertullien le considère comme le fondateur d'un art culinaire. Et saint Jérôme l'associe à une autre figure, celle de Poxamas. Son ouvrage ne voir le jour qu'aux alentours de 385. De plus, on a écrit un livre, De re coquinaria, qu'on lui a attribué et qui a continué de circuler pendant le Moyen Age. Les spécialistes continuent à se disputer à ce sujet. Il est donc difficile de juger de l'authenticité de l'ensemble de cette oeuvre. Mais il n'en reste pas moins qu'il doit refléter une partie de son esthétique de la nourriture. Quand on le lit, on se rend compte que rien n'est absurde dans ses recettes. Bien sûr, il y a des extravagances, mais qui ne sont pas inconcevables dans une Rome qui dominait déjà une grande partie du bassin méditerranéen et faisait venir des bêtes fauves pour les jeux de l'arène (de plus, nous nous sommes mis à manger de l'autruche et nous en élevons même en France !). Ce qui frappe dès le début, quand il expose les différentes façons de préparer le vin, c'est sa méthode, qui est somme toute très logique et démontre une grande expérience. C'est un ouvrage sérieux, avec beaucoup de recettes que nous pourrions faire de nos jours. Quelle que soir son authenticité, il semble certain que le savoir faire de ce gastronome et de cet inventeur de génie se retrouve dans ces pages sont des merveilles de clarté et de concision. Avicius ne fait pas de littérature : l'oeuvre d'art réside dans le résultat de ses recettes, qui se révèlent souvent simples et précises. C'est un régal pour toutes les fines bouches, qui sauront apprécier le génie inventif de cet homme qui reste un mystère.
Gérard-Georges Lemaire
07-12-2017
 
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Verso n°136

L'artiste du mois : Marko Velk

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