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[verso-hebdo]
25-01-2018
La lettre hebdomadaire
de Jean-Luc Chalumeau
André Derain, la décennie radicale 1904-1914
Tel est le titre très clair de l'actuelle exposition du Centre Pompidou (jusqu'au 29 janvier) dont le commissariat est assuré par Cécile Debray, déjà auteure de la remarquable Matisse, Paire et séries au même endroit au printemps 2012, et très bonne connaisseuse du fauvisme. Il s'agit de remettre à sa place Derain, qui était en train d'être purement et simplement évacué de l'histoire de l'art : pas un mot sur lui dans la célèbre Histoire de l'art d'Ernst Gombrich, mais aussi dans nombre d'ouvrages sérieux et traduits en plusieurs langues comme par exemple la Petite encyclopédie de la Peinture par Stefano Zuffi (traduction Solar 2004).Par sa faute, Derain avait fourni toutes les raisons de l'oublier : notamment son hésitante volonté de revenir au classicisme entre les deux guerres et son malheureux voyage à Berlin en 1941. Il y avait aussi l'air du temps, l'évolution de la culture parfaitement résumée par Pierre Cabanne à propos du marchand du peintre, Paul Guillaume : « L'ascension de Paul Guillaume coïncide avec un affadissement de l'art, de la littérature et de la culture en général qui correspond lui-même à l'amollissement quasi général des consciences. Le nationalisme aidant on fait appel à la « tradition » et, pour tenter de résister aux « métèques », on prône ce que l'on croit français qui n'est, généralement hélas que caricature ou fadeur. «  Derain, c'est la peinture française, affirme Paul Guillaume. Il fait la peinture de son âge, normale... » Mot terrible ; et qui en dit long. » (L'avant-garde au XXe siècle, André Balland, 1969)

Cécile Debray s'en tient donc judicieusement à la « décennie radicale » au cours de laquelle Derain s'affirme surtout, en 1905, comme l'un des inventeurs du fauvisme et même le meilleur des fauves. Parmi les soixante-dix peintures présentées, il y a par bonheur Port de Collioure, le cheval blanc (huile sur toile 72 x 91 cm, Musée d'art moderne de Troyes), éclatant chef d'oeuvre de 1905 qui éclipse littéralement La plage rouge de Matisse exécutée au même moment. On sait que les deux artistes ont passé ensemble l'été de cette année décisive à Collioure et qu'ils ont rendu visite à Daniel de Monfreid, ami de Gauguin dont il possédait plusieurs tableaux. Tous deux ont été éblouis tant par la force des Gauguin que par la lumière du pays. Matisse n'a pas vraiment peint sur le motif : il a loué un atelier au deuxième étage du café Olo, d'où il voyait la plage qu'il traitait assez audacieusement en rouge. Mais la manière dont il traduisait la mer par petites touches soulignait l'influence du divisionnisme de Signac dont il ne parvenait pas encore à se débarrasser, et les mats des bateaux étaient traités avec une curieuse timidité.

André Derain, lui, est allé sur le motif. Il a choisi le port qui lui permet une construction de la toile plus solide et structurée. Il célèbre la beauté du village par des associations de formes denses et de tons purs qui baignent dans une lumière d'une extraordinaire intensité qu'il décrit comme « une lumière blonde, dorée, qui supprime les ombres. » Or, dans ce tableau, Derain est parvenu à une admirable synthèse entre maîtrise et impulsivité (il laisse cette dernière à son ami de Chatou, Vlaminck, qui n'en sortira jamais). Il réagit à la violence de la lumière sur le port en peignant sur une préparation d'un gris soutenu, visible entre les couleurs pures (voyez les mats vermillon) de manière à assourdir. Nous sommes au paroxysme de ce que l'on va appeler le fauvisme. Derain réussit à maintenir un effet d'opacité compatible avec l'énergie des couleurs pures appris de l'observation de Gauguin. Non seulement c'est beaucoup plus fort que les travaux de Manguin, Valtat et Van Dongen, mais cela dépasse Matisse lui-même. C'est ce que l'on découvre grâce à cette exposition paradoxalement signée par une admiratrice de Matisse. Cécile Debray rend ainsi un grand service à la mémoire de Derain, mais aussi aux historiens de l'art qui devront revoir grâce à elle leurs préventions à l'encontre d'un peintre qui fut génial au moins pendant une décennie. « Derain est parfois plus audacieux que Matisse et Picasso » dit-elle. Elle le prouve, et c'est l'intérêt majeur de cette exposition.
J.-L. C.
verso.sarl@wanadoo.fr
25-01-2018
 
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Verso n°136

L'artiste du mois : Marko Velk

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Christophe Cartier au Musée Paul Delouvrier
du 6 au 28 Octobre 2012
Peintures 2007 - 2012
Auteurs: Estelle Pagès et Jean-Luc Chalumeau


Christophe Cartier / Gisèle Didi
D'une main peindre...
Préface de Jean-Pierre Maurel


Christophe Cartier

"Rêves, ou c'est la mort qui vient"
édité aux éditions du manuscrit.com