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[verso-hebdo]
12-05-2021
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La chronique de Gérard-Georges Lemaire |
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Chronique d'un bibliomane mélancolique |
Vraiment peindre, Gérard Garouste, entretien avec Catherine Grenier, « Fiction & Cie », Seuil, 160 p., 20 euro.
Au début de ses entretiens avec Catherine Grenier, Gérard Garouste parle de sa dyslexie. La cause est sans doute due à la méthode globale qui a été muse en oeuvre après la guerre et qui a causé des dégâts notoires parmi les écoliers (j'en ai été moi-même la victime et je pense que la cause est la même car je n'ai que deux ans de différence avec l'artiste ; mais on ne s'est rendu compte de ce problème que plus tard et on a modifié cette méthode d'enseignement). Mais il n'a pas eu de problème pour dessiner et, très tôt, cela est devenu pour lui une passion. Il évoque la maison familiale de Bourg-la-Reine et le caractère ombrageux de son père, qui était souvent violent dans ses colères sans fun. Sa scolarité n'a pas été simple et la décrit en dents de scie. La pension religieuse n'était pas faite pour lui ! Cela s'est bien terminé car un médecin a conseillé qu'il soit envoyé dans un autre établissement.
C'est ainsi qu'il s'est retrouvé en Bourgogne chez son oncle et sa tante. Il est allé à l'école du village et s'en est trouvé mieux. Sa tante l'encourageait à dessiner. Et son oncle faisait de l'art brut. Une autre ambiance que chez ses parents. Il s'est ensuite retrouvé dans une pension Monsel à Jouy-en-Josas où il y avait le fils de Fautrier et celui de Chagall. Il y rencontre Elisabeth, qui deviendra son épouse. Et puis son professeur de dessin a compris quelles étaient ses qualités et l'a encouragé. Quand il fut adolescent, son père lui raconta ses souvenirs de l'époque de la guerre. Il a découvert qu'il avait collaboré et avait profité de la saisie des biens juifs (il avait pris possession des magasins Lévitan, qu'il a dû restituer à la Libération). La fin de ses études a été marquée des problèmes et il a échoué à son baccalauréat. Il a fini par entrer aux Beaux-arts. Il a choisi la figuration et ne s'intéresse guère aux nouveaux courants d'avant-garde.
Mais il découvre Duchamp et ensuite Dubuffet, qui le fascine beaucoup et l'influence. Il se passionne pour la Siècle d'or et a des prédilections pour le Tintoret, le Greco et Rubens. Après la sortie de l'Ecole, il connaît des troubles sérieux et se retrouve en hôpital psychiatrique. Il peut ne songer à exposer qu'en 1979. Il a commencé à écrire une pièce, Le Classique et l'Indien. La pièce a été représentée en 1978. Il s'est aussi intéressé à la mythologie (là, la lecture de Roland Barthes a eu son rôle). Pendant qu'il réalisait les décors du Privilège avec son épouse et Mattia Bonetti, qui en ont fait le mobilier, il a présenté à cette époque sa première exposition personnelle à la galerie Travers qu'il a baptisée « Comédie policière ». Il y avait toujours dans chacun des seize tableaux deux femmes, un enfant et un chien et une table de jeu. Mais l'une des figures ou un objet disparaissait dans chaque composition. Et il y avait un manipulateur dans la dernière oeuvre qui dissimulait quelque chose. Il y avait sur la table des aiguilles en bronze. En Italie, à la galerie Cannaviello de Milan, l'exposition prend le nom de « La Règle du "je" » Il continue à réaliser des toiles sur le thème du Classique et de l'Indien et l'une d'elle est achetée par le Centre Pompidou. Dès lors la chance est de son côté et Leo Castelli l'invite à exposer dans sa galerie à New York en 1982.
Cinq ans plus tard, il exposait au CAPC de Bordeaux avec des oeuvres que lui avait inspirées Dante et il était invité au Centre Pompidou en 1988. . Puis il a réalisé « Les Indiennes », qui lui avaient été suggérées par des miniatures. Il s'est inspiré au judaïsme. Il se liait à des écrivains du passé et les interprétait : Cervantès (qui a donné lieu à un livre), Rabelais, qui lui a inspiré une installation « La Dive Bacbuc ». Il crée ne autre grande installation en 1995, « Ellipse » (Les « Saintes Ellipses » sont présentées à la chapelle de la Salpetrière). Il est devenu le peintre français le plus en vue de sa génération, mais pas le plus aimé. Son art déconcerte. Il a poursuivi ses recherches à partir de l'Ancien Testament et du Talmud, il illustre l'Haggadah. Ses figures se déforment, s'anamorphosent. Il y a en plus cette dimension drolatique et souvent grotesque qui s'instaure alors que ses toiles se font plus proches de l'onirisme. En 2000, il lui est venu l'idée de faire des portraits et aussi des autoportraits peu flatteurs.
Le Faust de Goethe s'impose comme sujet. Dans ce long entretien, on découvre ses mobiles, sa technique, ses orientations et on est sous le charme de ce récit où le peintre ne se donne pas le beau rôle. Catherine Grenier a fait du bon travail, même si on aurait aimé en savoir encore plus. Ce livre est remarquable car on découvre Gérard Garouste est vraiment, en dépit de toutes ses difficultés personnelles et toute sa singularité, pour ne pas dire son étrangeté, le meilleur artiste de sa génération. Sans l'ombre d'un doute.
Collection égyptienne, musée Granet, Christophe Barbotin, Editions Khéops, musée Granet, Aix-en-Provence, 266 p., 29 euro.
Pour nous, Parisiens, le musée Granet existe surtout à nos yeux pour les grandes et belles expositions qui y ont été présentées. Mais on ne connaît guère la nature de ses collections. L'exposition « Pharaon, Osiris et la momie » permet de prendre la mesure de la richesse de cette institution. Il a une longue histoire que son directeur actuel, Bruno Ely. Une communication faite par le 2 août 1832 à l'Académie des Sciences, Agriculture, Arts et Belles Lettres d'Aix-en-Provence met en évidence la valeur des découvertes faites par Champollion le Jeune dans les « papyrus égyptiens ». Ce magistrat éclairé et ancien maire de la ville a convaincu ses auditeurs de l'intérêt de conserver et d'étudier les traces de la grande civilisation égyptienne. Christophe Barboti s'emploie ensuite à relater l'histoire de ce musée. Les premiers grands collectionneurs aixois font leur apparition dès le XVIe siècle avec Pierre-Antoine de Rascas, puis avec Nicolas-Claude Fabri de Peirese, qui a éprouvé une grande passion pour l'Egypte ancienne.
Et il n'a pas été le seul : Pierre-Joseph de Haitze publie en 1679 un ouvrage intitulé Les Curiosités les plus remarquables de la ville d'Aix. Il y a eu aussi de grands collectionneurs tout au long du XVIIIe siècle, qui ont joué un rôle de premier plan dont il nous narre l'existence. Et en 1860, la présence dans la ville du célèbre égyptologue Théodule Devéria a permis la rédaction des notices de la collection égyptienne. L'exposition nous révèle tout l'intérêt de ce que le misée a pu engranger dans ses salles et dans ses réserves. Le catalogue nous présente d'abord les stèles et les reliefs. La plupart de ces oeuvres proviennent du sanctuaire d'Abydos dédié à Osiris (terrasse du grand dieu. On peut admirer les stèles de dieux mineurs ou de Senousret, fils de Pitet. Ou celle d'Ibitet, grand officier de la ville. Il y a aussi dans cet ensemble une remarquable fausse porte ou la stèle d'un scribe. Toutes ces stèles sont plutôt bien conservées, avec leurs figures et leurs pictogrammes lisibles. Elles ne sont pas toujours exécutées avec le plus grand style possible, mais elles n'en demeurent pas moins assez belles.
Cette suite commence par une jolie statue-cube, datant sans doute de la XIIe dynastie. On découvre ensuite le masque d'un pharaon (Apriès ?), malheureusement un peu mutilé, des têtes d'hommes ou de femmes. De nombreux ouvrages en bronze nous font voir Osiris-Lune, ou des statuettes d'Isis (souvent en train d'allaiter) ou encore d'Isis-Hathor. On ne saurait négliger la statuette d'Horus-L'Enfant, celle du faucon Horus ou celle de Thot. Nous avons également une déesse-lionne ou un enfant portant des offrandes sur la tête ou encore le taureau Apis. Le parcours se conclue avec des chattes et un lion couché. L'exposition nous montre des amulettes de toutes les formes possibles, même à forme de phallus, des pendeloques en forme de déesse à tête de lionne, ou en forme d'Isis allaitant, ou en forme de la déesse Thouéris. Leur variété est considérable.
Il y a beaucoup d'animaux, dont le crocodile, le cobra, la truie, etc. Des vases, la plupart du temps en excellent état, en pierre ou en argile peint, dont la variété des formes et des décors sont d'une incroyable diversité et aussi d'une beauté indéniable. Des cercueils intérieurs, entièrement peints, des momies, des vases canopes, le matériel funéraire, tout cela nous fait découvrir l'immense soin apporté aux défunts. Enfin les serviteurs des morts illustres, les Châbtis, terminent ce voyage passionnant dans le royaume des morts si important pour la mythologie égyptienne. On ne peut qu'être émerveillé par tout ce qui est offert au regard du visiteur dans cette exposition exceptionnelle. Et le catalogue est très bien conçu avec des descriptions très claires et précise et des analyses concises accompagnent chaque pièce. De surcroît, qui entend découvrir le monde de l'Egypte ancienne peut utiliser ce catalogue pour faire ses connaissances grâce à ces documents admirables et ces commentaires compétents et bien venus.
1 immeuble, 1 oeuvre, 2015-2020, Editions in-fine / ministère de la Culture, 144 p., 29 euro.
Cette vaste entreprise consistant à intégrer des oeuvres d'art dans les constructions urbains est un renouvellement de ce qui existait autrefois et que nous appelions le 1%. Le seul défaut de cette pratique était que, la plupart du temps, la bâtiment et l'oeuvre étaient rarement conçus de conserve : la seconde venait se rajouter au premier ou était installée dans un jardin ou sur la voirie. Dans le cas présent, avec le Club 1 immeuble 1 oeuvre présidé par Arthur Toscan du Plantier et soutenu par la Fédération des promoteurs immobiliers dirigée par Alexandra François-Cuxac, l'idée a été de rapprocher les artistes des architectes et des constructeurs. Tout n'est pas aussi idyllique qu'on le penserait car les artistes ne font souvent qu'ajouter leurs réalisations à un tout architectonique (je ne connais d'ailleurs qu'un seul artiste capable d'intégrer pleinement sa recherche artistique et l'ensemble architecturale est Santiago Arranz dans tout ce qu'il a pu réaliser à Saragosse et autres lieux de l'Aragon.
Trois personnalités ont suivi ces programmes de collaboration plus ou moins étroite : Cynthia Fleury, Dominique Jakob et Brendan McFarlane (ces deux derniers étant architectes). C'est Alexia Guggémos qui a agencé cette anthologie. Les photographies sont d'Emmanuelle Blanc. Le découpage du livre en différentes sections est amusant, mais pas très indispensable ! Mais peu importe. Après tout, on peut le consulter à sa guise, en suivant l'ordre de la pagination ou de manière aléatoire. Seule compte la découvertes de ce qui a pu être fait. Je tombe au hasard sur Un ciel perlé de lumière d'Isa Moss ; Il s'agit de galets en verre transparents qui se trouve dans le vaste hall d'un édifice de La Défense : l'artiste a été bien inspiré en ce lieu d'avoir voulu remplacé les possibles lustres ou plafonniers par ses galets aux formes sans cesse changeantes (tout comme leurs dimensions) qui voient leurs couleurs se modifier selon la lumière ambiante devant cette entrée tout en verre.
A l'inverse, « l'antenne fractale » de Stéfane Perraud du Dessin connecté placé sur le mur aveugle de l'hôtel Bristol de Paris me semble bien peu inventif et médiocre comme décor offert au regard des passant. Double frise : Tête-bêche, oeuvre réalisée par de Daniel Buren pour l'entrée d'un immeuble de Boulogne-Billancourt montre que cet artiste plus un talent de décorateur que d'authentique créateur. Et puis ses incontournables bandes de 8, 7 cm ont perdu toute pertinence. C'est une redite sans fin. Mais l'effet d'ensemble devant un miroir n'est pas pour déplaire. On sera plus séduit par La Traversée d'Eva Jospin, immense décor de caractère cinématographique, qui fait son effet car c'est énorme et fantastique. C'est une forêt imaginaire qui couvre une longue façade et qui a une dimension fantastique et onirique assez fascinante.
Pour le reste, en dehors de quelques sculptures posées sur les pelouses en bas des immeubles et d'oeuvres de toute sortes placées en vas des immeubles comme objets de décoration installés là pour « meubler » (il y a bien quelques plafonds peints ou composés d'objets, mais qui n'ont rien d'exceptionnel). Cet album montre qu'au fond n'a rien changé dans cette difficile cohabitation des arts plastique et de l'architecture et aussi que le choix des artistes et des projets n'ont pas très judicieux. Mais qui incriminer ? Les artistes ? Les architectes ? Les membres du jury ? Tous ? En tout cas, consulter ce livre qui pose une fois de plus le grand problème de l'intervention artistique in situ.
Paul Durand-Ruel et le post-impressionnisme, Albert André, Georges d'Espagnat, Gustave Loiseau, Maxime Maufra, Henry Morey, Claire Durand-Ruel & Jacques-Sylvain Klein, Editions in-fine / Propriété Caillebotte, 160 p., 29 euro.
Le marchand de tableau Paul Durand-Ruel (1831-1922) est devenu célèbre pour avoir exposé les peintres de la période romantique et surtout pour avoir su défendre les artistes de l'école de Barbizon. Il est issu d'une famille parisienne riche et très cultivée. Il s'installe d'abord dans le négoce de matériel pour artistes de son père rue Le Peletier, puis, en 1867, il ouvre sa galerie 16 rue Laffitte et cela jusqu'à la Grande Guerre. Pendant le conflit franco-prussien, il se rend à Londres et y fait la connaissance de Claude Monet. En 1870, il organise une exposition sous le nom de la Society of French Artists au sein de sa galerie anglaise de New Bond Street. De retour à Paris, fait la connaissance de Sisley, Pissarro et ouvre de v sa galerie, n'hésitant jamais à s'endetter pour mener à bien ses projets.
Il organise la seconde exposition des impressionnistes rue Le Peletier et, par la suite, s'occupera de la septième exposition de ce petit cercle de peintres. En 1886, il présente une vaste exposition de 300 oeuvres à New York, qui connaît un vrai succès. Cela l'incite à ouvrir une galerie dans cette ville américaine. A la fin de sa vie, il achète quelques 12.000 tableaux. Ce que révèle cette exposition qui a lieu à Yerres dans la maison de Caillebotte c'est l'intérêt qu'il a pu porter à une nouvelle génération d'artistes qui ont suivi les pas de Monet et de ses amis. Elle n'a rien à voir avec Paul Signac et Georges Seurat, mais à une poursuite de l'aventure débitée par ces pionniers qui ont eu du mal à se faire admettre et qui, à la fin du XIXe siècle, sont désormais reconnus. C'est une véritable découverte car la plupart d'entre eux sont peu connus. Pour ma part je ne connaissais que Maxime Maufra et encore de manière assez superficielle. Je commencerai donc par lui. Maxime Maufra (1861-1918) est le premier a être invité à entrer dans cette nouvelle écurie de Paul Durand-Ruel. Il le rencontre en 1894 et lui permettra de faire douze expositions.
Ce fils d'industriel nantais était destiné à se lancer dans les affaires, mais il a été convaincu de la valeur de l'art pictural par Charles et Alfred Leduc. En Angleterre, il découvre Turner qui l'éblouit. Il expose la première fois dans sa ville natale en 1886 et est accepté au Salon où il présente deux tableaux, dont un est acheté par l'Etat. Octave Mirbeau le remarque. En 1890, il se rend à Pont-Aven où il rencontre Paul Gauguin. Il rentre à Paris trois ans plus tard et s'installe au Bateau-Lavoir de Montmartre. S'il aime peindre Paris et sa région, il retourne souvent en Bretagne. Il visite aussi le Cotentin et Bruges. Il aime peindre les falaises, les passages de neige, à l'instar de Monet, et a fait une toile présentant les inondations de Paris en 1910. Gustave Loiseau (1865-1935) est le fils d'un commerçant de l'Ile Saint-Louis. Après son service militaire, il travaille chez un décorateur. Puis il fréquente les ateliers de Montmartre et peint dans la région de Pontoise. Il y fait la connaissance de Pissarro. Il participe pou la première fois à une exposition de groupe à Pont-Aven en 1891 et deux ans plus tard, il est présent au Salon des indépendants. Durand-Ruel l'expose en 1898. En 1903, il prend part au premier Salon d'Automne. Le registre de ses sujets est très vaste : les falaises en bord de mer (dont Etretat), les villes avec le clocher de l'église, les ponts, les paysages enneigés, les rives boisées des rivières, etc. Quant à Georges d'Espegnat (1870-1950), il est vite conquis par l'impressionnisme et expose à l'occasion de la huitième et neuvième expositions des « Peintres impressionnistes et symbolistes » à la galerie Le Barc de Boutteville (1894 et 1895).
Il entre à la galerie de Durand-Ruel en 1898. Il n'a pas suivi d'éducation artistique, mais a été l'ami de Valtat et de Laprade. Il découvre la couleur dans le Midi et séjourne à Agay et dans le Lavandou. En 1905, il participe au Salon d'Automne, mais pas avec les fauves - il voisine avec Kandinsky ! Il se sent proche de Vuillard et de Bonnard. Il fait un certain nombre de voyages (Italie, Maroc, Portugal). Il réalise des ensembles décoratifs (en particulier pour le Normandie) et, ami de Maurice Denis, il lui succède comme directeur de la société des amis d'Eugène Delacroix. Il devient professeur à l'Ecole des Beaux-arts de Paris. Plus intimiste que ses contemporains de la galerie, il aime néanmoins peindre la mer et les rivages méditerranéens. Albert André (1869-1954) rencontre Durand-Ruel en 1894, mais n'expose dans sa galerie que dix ans plus tard et y a fait seize expositions personnelles. C'est Auguste Renoir qui le fait remarquer à Durand-Ruel. Fils d'un chapelier lyonnais qui possédait des vignes dans le Gard, il a commencé par dessiner pour les soyeux. Lui aussi aime les scènes intimistes, mais il ne dédaigne les toits d--e Paris, les scènes de rues, la vie des ports. Renoir l'a incité à devenir directeur du misée de Bagnols-sur-Céze et il en fait le premier musée d'art moderne français. Enfin, voici Henri Moret (1856-1913). Fils d'un officier de marine de Cherbourg, il est entré à l'Ecole des Beaux-arts de Paris.
En 1888, il fait la connaissance de Sérusier, de Paul Gauguin et d'Emile Bernard à Pont-Aven. Il se lie avec ce petit groupe et éprouve des affinités avec lui. Puis il découvre Ouessant. Il prend part au Salon des Indépendant en 1893. Il rencontre Durand-Ruel en 1895 qui lui achète des toiles en 1895 et l'expose trois ans plus tard. Mais aucune toile n'est vendue et malgré d'autres présentations de son travail, il n'a jamais séduit les collectionneurs. Pourtant il a brossé de très beaux paysages de la campagne et aussi des rivages marins très suggestifs. En définitive, tous ces peintres méritent d'être découverts et appréciés.
Moteurs, Hervé Brunaux, Dernier Télégramme, 64 p., 10 euro.
Dans sa présentation de l'ouvrage, l'éditeur parle de « road movie » : ce terme convient mieux que celui de poésie, même si le texte se déroule pour l'essentiel comme un texte poétique. C'est en fait un récit dont chaque vers marque la respiration de la lecture. Il s'agit bien ici d'une aventure, mais dont on ne connaît pas très bien les tenants et les aboutissants. Cela n'a d'ailleurs que peu d'importance. Les personnages qui sont impliqués sont emportés par le mouvement d'un périple qui n'a rien de réel. D'ailleurs on se demande comment interpréter ces moteurs, qui jouent un rôle essentiel dans ce récit. Il est évident qu'il ne faut pas prendre le mot au premier degré. Il semble plutôt mettre en branle un voyage initiatique où apparaissent des figures récurrentes comme Akim et Nathan, pour ne citer qu'eux. Tout paraît être onirique et l'est assurément.
Et le rythme ici est une invitation à traverser ces lieux à grande vitesse où apparaissent et disparaissent insectes et animaux, d'autres personnages, en des points du globe toujours changeants. Ce qui rend ce texte chargé d'émotions, c'est sa mobilité extrême et son absence d'histoire structurée. Il y a bien des amorces de trames, des relations qui s'esquissent, des impressions qui insistent, mais c'est un manège magique qui n'arrête ni de tourner ni de se métamorphoser. Mais rien ne nous permet d'échapper à cette course in peu vertigineuses dans ce rêve d'écriture. Hervé Brunaux sait parfaitement manipuler les éléments de ce genre d'univers échappant à la raison et donc loin de toute logique. Mais ce qui ne veut pas dire que ces pages n'ont aucun sens. Elles délivrent d'autres sens et d'autres moyens d'aborder la fiction qu'est l'existence.
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Gérard-Georges Lemaire 12-05-2021 |
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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