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[verso-hebdo]
23-02-2023
La chronique
de Gérard-Georges Lemaire
Chronique d'un bibliomane mélancolique

Paris Nouvelle figuration, 1957-1965, premier volet, galerie Kekeidoscope, 80 p., 20 euro.

Après la libération de Paris, c'est l'art abstrait qui domine largement. Bien sûr, il y a des artistes figuratifs qui connaissent une certaine notoriété, comme Bernard Buffet et Balthus, mais il cst évident que la majorité des peintres et des sculpteurs de cette période, comme à New York, se tourne vers la dimension abstraite. En réalité, c'est à la fin des années 60 que s'affirme une tendance qui a pris le nom de Figuration narrative, soutenue par la revue Opus international. Et puis va s'imposer à la fin des années 70 une autre forme de figuration qui a quelque parenté avec la transangardia italienne. L'artiste le plus éminent est sans nul doute Gérard Garouste.
L'époque est féconde car elle trouve aussi des points de concordance avec le Conceptual Art et le Minimal Art qui font une percée décisive aux Etats-Unis. Mais on connaît bien mal tous ces créateurs qui ont choisi la figuration à partir des années 50. Cette exposition est particulièrement intéressante car c'est un pan de notre histoire qui est dévoilée. C'est ainsi qu'on peut y voir des oeuvres d'Eduardo Arroyo, d'Antonio Recalcati, Maryan, Paul Rebeyrolle, Jacques Grinberg, Maria Lassing, Marcel Pouget, Enrico Baj, Gilles Aillaud, Bernard Rancillac, Gérard Tisserant et quelques autres encore, je ne saurai les citer tous. Les uns vont avoir une belle reconnaissance par la suite et beaucoup vont poursuivre une démarche solitaire et bien peu célébrée. Pour beaucoup, ce sont là des peintures d'une période encore probatoire, mais on peut discerner dans leurs compositions les signes avant-coureurs de leur manière picturale plus solide des années suivantes.
Pour l'essentiel, on peut discerner dans ce choix des plus intéressants la trame générale de ce qui va suivre par la suite. Ainsi peut-on faire la découverte d'une période assez peu commentée et documentée. La préface, bilingue, qui n'est pas signée, apporte pas mal d'éléments pour voir ce qui a pu se dérouler pendant cette phase de reconstruction de l'art moderne en France. Comme pendant l'âge d'or de la « tradition du nouveau » au début du XXe siècle entre Montmartre et Montparnasse, et qui a été enrichi par l'Ecole de Paris entre les deux guerres. Il ne s'est pas agi pour ces artistes de renouer le fil rompu pendant l'Occupation, ou de renouer avec Soutine ou Modigliani, mais plutôt de retrouver un état d'esprit-condamné-pendant cette période.
Il y a peu de tableaux qui puissent être considérés de purs chefs-d'oeuvre, mais toutes ces compositions ont un intérêt indéniable. Rares sont ceux ici qui sont parvenus à cerner la vérité de leurs démarches, mais déjà ils s'en rapprochent. Je mettrai Maryan un peu à part, car il est d'ores et déjà en pleine possession de ses moyens. Les autres, qui vont être connus quelques années plus tard, tâtonnent et esquissent leurs thèmes et la façon de les rendre avec un souci critique par rapport à la société sortie du conflit mondial. La politique va bientôt être au coeur de leur propos. Ils ne sont presque jamais revenus aux genres précédents. C'est une orientation qui a légitimé leur art, qui n'a rien de purement formel et esthétique. La construction des toiles dénote aussi le souci de rompre avec le passé sans ostentation ni violence. Renouer et trancher en même temps ! Cette nouvelle galerie de la rue de Seine poursuit le travail entrepris par Alain Le Gaillard en collaboration avec Le Minotaure et c'est très bon signe. Il ne s'agit pas ici de substituer les musées d'art moderne et contemporains, mais d'apporter un riche complément d'enquête. A ne pas manquer !




Domela, Christian Derouet, Editions Le Minotaure, 128 p.

César Domela Nieuwenhuis (1900-1992) est né à Amsterdam et son père a été un pasteur qui s'est consacré à la cause anarcho-syndicaliste. En 1914, le jeune homme effectue son premier voyage à Paris. Au cours duquel il fait la connaissance d'Henri Lauens avec lequel il se lie d'amitié. Deux ans plus tard, il débute une collection d'art primitif et se lance dans l'ethnologie. Il a commencé à dessiner en 1918 et, deux ans plus tard, il a peint ses premières toiles dans un esprit cubiste synthétique. Il s'est rendu à Berlin en 1923, où il a fait la connaissance de Raoul Haussmann, d'Alexander Archipenko et d'Esther Segal.
Il a adhéré au Novembergruppe. Il a rencontré Theo van Doesbourg et Piet Mondrian à son retour à Paris. Il a ensuite décidé de faire partie du mouvement De Stijl. Dans l'exposition, on peut voir une toile présentée dans cette exposition qu'il a exécutée qui s'inspire directement des principes formels de Mondrian avec d'épaisses lignes noires verticales et horizontales et puis des aplats aux tentes pures. Il n'a pas suivi longtemps cette direction. Il n'en est pas moins resté proche des néoplasticiens.
Il a collaboré à la revue De Stijl quelques années mais a recherché d'autres méthodes de production de ses tableaux. C'est vers l'époque où il a exposé au Salon des Indépendants, à l'exposition « Die Abstrakten » à Hanovre et à l'exposition « Société anonyme » au Brooklyn Museum de New York. à Hanovre et (1927), qu'il a décidé de définir des formes plus complexes où il insère des courbes. Il a aussi utilisé la diagonale, tant honnie par Mondrian. En somme, sans provoquer de ruptures avec ses compagnons de route, il a osé s'aventurer dans des régions abstraites d'une autres nature. Il n'a plus cessé dès lors d'affirmer une conception de l'art abstrait n'appartenant qu'à lui. Sa rencontre avec Vassili Kandinsky a été décisive dans cette évolution pendant la dernière guerre. Il s'est rendu à New York en 1942 et y a connu Peggy Guggenheim. C'est en tout cas pendant ces années tourmentées qu'il a découvert la typologie de sa création, avec une multiplicité de formes qui cohabitent, ou se superposent. Ce dernier préface le premier ouvrage qui lui a été consacré. S'il a tenu à donner à ses oeuvres une grande liberté formelle, il a aussi voulu y incorporer une diversité dans les matériaux divers, la seule peinture ne lui suffisant plus.
En 1945, il a eu l'idée des Reliefs, où la composition est faite en trois dimensions et où se mélanges des éléments de toutes sortes. Il est évident qu'ils sont dérivés des travaux de Jean Arp, mais ceux-ci n'ont été qu'une impulsion pour poursuivre ses recherches. Les années cinquante sont celle où son art a atteint son apogée et où il a su faire de sa pratique insolite un formidable outil pour engendrer des sensations esthétiques d'une richesse inouïe. César Domela a pu imposer une vision artistique qui a été unique et qui pourtant s'inscrit dans une perspective qui s'est développée alors (il suffit de songer à Lucio Fontana). Ce catalogue nous guide parfaitement dans ce mécanisme mental qui l'a amené à trouver un mode d'expression qui remontait aux années dix et vingt pour aborder les problématiques nouvelles qui ont donné à l'abstractions des orientations inédites au sortir de la dernière guerre. Une importante documentation complète ce parcours marqué par des oeuvres merveilleuses. De surcroît, on peut y découvrir les photographies qu'il a pu faire à la fin des années vingt et au début des années trente. C'est plus qu'un catalogue, c'est une véritable monographie indispensable à la connaissance de cet artiste hors pair.




Conversations avec les choses muettes, Jean Galard, L'Atelier contemporain, 192 p., 20 euro.

L'auteur s'est penché sur le rapport entre l'oeuvre plastique et la parole. Il la considère comme « innommable » en s'appuyant sur une réflexion de Daniel Arase. Il a ignoré cependant dans sa présentation de la fameuse considération de Léonard de Vinci sur la « poésie muette » (qu'il avait chapardé à Cicéron). Les artistes, à partir de la Renaissance italienne, ont voulu rivaliser avec la poésie et aussi ne plus être regardés comme étant inférieurs aux hommes de lettres. Il a choisi pour premier exemple une toile de Nicolas Poussin. Poussin est justement celui qui est parvenu à magnifier la dimension poétique de ses ouvrages peints. Et puis les exemples qu'il donne dans son préambule (Giorgione, Vermeer, Goya) sont, d'une part, ils échappent sans aucun doute à une traduction littérale et sans ambiguïté et, de l'autre, une élaboration dont le sujet est « lisible ».
En sorte que la question est plus complexe qu'elle ne semble de prime abord. Le discours d'un tableau a été, sauf rares exceptions, toujours transparent. C'est nous, des siècles plus tard, qui n'en connaissons pas les tenants et les aboutissants. Des codes et des allusions claires à leur époque, sont devenues obscures. Ce qui rend le propos de l'auteur obscur est aussi son désir d'établir des relations entre le passé et le présent (il inclut Kiefer, par exemple, dans sa réflexion). Et puis il reprend à son compte des lieux communs douteux, comme l'idée que les peintures médiévales dans les églises permettaient au menu peuple de voir ce qui était écrit dans la Bible. Ce n'est pas tout à fait exacte, car le clergé ne tenait pas à ce qu'on lise la Bible.
La préférence absolue était donnée aux Evangiles. De toute façon la Bible était en latin à l'époque (encore dans la traduction qu'en avait faire saint Jérôme). Je n'éprouve pas du tout le besoin de commenter tout ce que Jean Galard avance dans son ouvrage, en mêlant toujours plus art classique et art contemporain. Ce qui vaut pour l'un, n'est plus du tout de mise pour le second, qui se développe selon des critères bien différents. Il ne m'a pas convaincu. Mais je suggère que ce livre puisse très utile pour des étudiants au début de leur initiation à l'histoire de l'art. En effet, l'auteur soulève des problématiques intéressantes qu'ils iront explorer ailleurs. Je suis tout de même surpris que ce qu'il dit de la création artistique occidentale ne soit pas plus étoffée et qu'il n'ait pas pris appui sur des auteurs de méthodes d'interprétation tel qu'Erwin Panofky. Prenons donc ces pages comme objets de questionnements, en se demandant si elles reposent sur quelque chose de crédible ou non. Ce serait là un excellent exercice. Mais je m'étonne tout de même du peu connaissance de la part de l'auteur de la littérature artistique, qui demeure le soubassement de toute méditation sérieuse et crédible sur le sujet !




La folie du regard, Laurent Jenny, L'Atelier contemporain, « Essais sur l'art », 208 p., 25 euro.

Laurent Jenny s'interroge à son tour sur le prétendu mutisme de la peinture. Il est étrange de constater que des ouvrages voient le jour à peu près sur les mêmes questions ! Son intention est de comprendre les mécanismes du regard. Pour se faire, il est allé jusqu'à la préhistoire. Il observe que le regard est brouillé, sinon occulté. Aussi a-t-il choisi des exemples de genres et d'époques différents pour comprendre comment ce phénomène se propose. Il examine de manière scrupuleuse chacun de ces exemples, d'un portrait de Lucas Cranach à une photographie de Walker Evans en passant par une proposition de Giuseppe Pennone. Les analyses qu'il nous dispense sont loin d'être superficielle et sont souvent étayées par des références de valeur.
Ce qu'il dit à propos d'Henri Matisse est tout à fait pertinent et on peut en retirer une leçon bénéfique, surtout en ce qui concerne le rapport entre ce qu'il a pu écrire sur son art et sur ce qu'il a réalisé dans ses tableaux. Ce qui m'a le plus intéressé dans ce livre, c'est que l'auteur a voulu considérer que le regard est orienté par l'artiste ou le photographe selon un dessein particulier. Le regard n'est pas toujours dépendant du visible, mais de ce que les uns ou les autres ont voulu rendre tel et qui ne coïncide pas avec la réalité ou ce qui pourrait sembler l'être, l'exagérant parfois. Si son propos général prête le flanc à quelques critiques et donc si l'ensemble de son projet est discutable, chacun de ses chapitres est rédigé avec soin et discernement. Il est par conséquent plus qu'évident que ce livre mérite d'être lu et d'être étudié pour la valeur de sa démarche. Son seul véritable défaut est d'avoir voulu en faire une sorte de théorie, ce qui n'est pas avéré.
Pour le reste, il faut reconnaître une érudition solide et, encore plus, un raisonnement bien étayé. Ce qu'il a pu tirer de la contemplation de l'Ile de la Grande Jatte de Georges Seurat et des toiles qui ont un lien avec de grand projet est vraiment intéressant. En somme, La Folie du regard est une étude passionnante, même si elle n'est que fragmentaire. Sans doute Laurent Jenny a-t-il voulu trop embrasser et l'immensité vertigineuse du champ de sa recherche l'a-t-il fait perdre le sens d'une conception plus générale. Mais est-ce forcément ce que l'on doit attendre de ce genre de propos ? Tout ce qui peut enrichir notre perception d'un « objet » esthétique et autoriser sa compréhension en utilisant plusieurs angles de vue est un élément fondamental pour pouvoir aller de l'avant dans la connaissance d'un art particulier. Il faut lui reconnaître ce mérite, qui n'est pas indifférent.




Tarot, Julien Blaine, Editions Paraules, 100 p., 15 euro.

LE MOTiER, Julien Blaine, Les Presses du Réel, 64 p., 17 euro.


Il fallait s'en douter : Julien Blaine n'a pas voulu faire comme les surréalistes à Marseille : imaginer un jeu de cartes soigneusement illustré selon leurs principes esthétiques. Son idée à lui, cela été de saccager les figures de ces cartes en général d'une grande beauté. Il s'est même adjoint n acolyte pour parfaire ce jeu de massacre ! Quand il ne brouille pas l'image ou la dénature, il lui arrive de la remplacer par ce qui pourrait passer pour de la poésie visuelle ! Mais, quel que soit le point de vue qu'il adopte, le tarot en ressort profondément mutilé ! Quel que soit l'objet qui lui tombe sous la main, il ne peut s'empêcher de s'en emparer et d'en faire une chose massacrée, comme si sa vision du monde, du microcosme au macrocosme n'était qu'une dénaturation de ce qu'ils contiennent.
Et puis il s'en prend à la beauté, qu'il n'entend pas faire disparaître de la surface de la Terre, mais qu'il prétend mettre en défaut. Il relance les dés du dadaïsme, encore et encore, et se réserve le doit de trouver une source de beauté, plus tard, quand l'envie lui en viendra. Qu'on ne fasse pas de lui un prophète du malheur ou de la fin du monde, mais plus exactement de nous avertir que l'art, comme la poésie, ont fini par bifurquer dans une direction dangereuse et malsaine. Au bout du compte, c'est un moralisme qui aime aller jusqu'aux confins de l'absurde et de l'abject dans ces domaines ou plus rien n'est luxe, calme et beauté. Voilà sa stratégie et il se complait à jeu (encore un jeu !) de déconstruction où il ne cesse jamais de nous faire percevoir la réalité sous un angle néfaste. Personne n'aura l'envie de se servir de ses tarots. Mais tout un chacun en conservera la mémoire, car elle éveille une autre mémoire et nous place dans une situation de vigilance inquiète et des plus inconfortables, bien que nous nous soyons bien divertis.
Avec LE MOTiER, il prend une tonalité tout à fait différente. Il se prend à herboriser à la manière de Jean-Jacques Rousseau, enfin presque car il présente ces souvenirs dans une optique qui est blagueuse. Cela n'empêche qu'on discerne, même mal, le poète qui sommeille toujours en lui.
Et il commence exemple : écorce / fruit. Puis il sophistique ses modalités d'action et en vient à composer à notre intention un Vertigo bestiae où il énumère les conditions pour créer une typographie ad hoc, qui serait un conte ou un roman... Voilà de peu sages recommandations pour faire son entrée dans le cirque de la littérature up to date. Cet iconoclaste, énergumène par excellence, a été en veine de proposer quelques préceptes pour modeler le mot, qui n'est plus la matière première du langage commun, mais la naissance d'un creuset d'un alchimiste mal luné et corsaire, qui n'a d'autre vérité que de mouliner les mots qui servent à fabriquer la nef des fous de notre siècle si mal parti.
Gérard-Georges Lemaire
23-02-2023
 
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du 6 au 28 Octobre 2012
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Christophe Cartier / Gisèle Didi
D'une main peindre...
Préface de Jean-Pierre Maurel


Christophe Cartier

"Rêves, ou c'est la mort qui vient"
édité aux éditions du manuscrit.com