L'exposition en cours de Colette Deblé à l'Espace des femmes-Antoinette Fouque (jusqu'au 25 février 33/35 rue Jacob) a pour titre ? Femmes. Le point d'interrogation préliminaire signifie sans doute qu'il s'agit de la poursuite d'une recherche commencée il y a trente ans. Depuis l'Antiquité, ce sont d'abord des hommes qui ont peint, sculpté, dessiné des femmes. Colette Deblé aborde l'histoire de l'art dans une démarche quelque peu iconoclaste. « Je tente de reprendre les diverses représentations de la femme depuis la préhistoire jusqu'à nos jours afin de réaliser une analyse visuelle des diverses postures, situations, mises en scène. » La figuration, chez Colette Deblé, ne part pas du sujet en soi, mais de l'interprétation qui en est déjà faite dans l'oeuvre historique, donc chargée de connotations culturelles, allégoriques, symboliques. Pour Colette Deblé, « la citation picturale ne saurait être une citation littérale comme est la citation littéraire, parce qu'elle passe par la main et la manière du citateur. D'où un léger tremblé doublement allusif entre l'oeuvre citée et le citateur. Mon projet explore ce tremblé parce qu'il suppose un exercice extrêmement long de la citation vers son usure et sa fatigue. »
Les femmes peintes de l'histoire de l'art se retrouvent dans les oeuvres de Colette Deblé comme accouchant de leur propre mystère parmi les giclures, les pertes d'eaux, en des tableaux, dessins, lavis, silhouettes incertaines et profils détourés. « Silhouettes sans doute incertaines, mais toujours capables de désigner avec précision telle ou telle face des choses qui a frappé l'artiste et dont, en la détachant du contexte, elle révèle d'une certaine façon la « face opposée » : ici le point de vue d'une femme peintre entreprenant de dialoguer avec une écrasante majorité d'hommes peintres qui, depuis toujours, livrent leur point de vue sur la femme. La variété des sujets féminins de l'histoire de l'art donne le vertige.
Ces sujets se répartissent en quatre groupes chez Colette Deblé. Le premier rassemble les saintes, les héroïnes, les martyres, les allégories et les mères. Depuis la Vierge Marie de l'Annonciation de Simone Martini jusqu'aux célèbres allégories de Lorenzetti (la Foi, la Sagesse, la Concorde et la Charité) en passant par les figures dramatiques - la Sainte Agathe de Piero della Francesca portant le plat où sont déposés ses seins coupés, les Judith de Botticelli ou Artemisia Gentileschi - comme par les figures apaisées (la Femme faisant manger son enfant par Millet), les options sont multiples. Colette Deblé a marqué un intérêt particulier pour certaines oeuvres en les traduisant seulement par la technique du lavis, mais aussi par une peinture. Ce fut le cas du Ravissement de Sainte-Marie Madeleine par Philippe de Champaigne. Les sujets d'inspiration sont innombrables pour Colette Deblé qui en a déjà retenus plusieurs milliers.
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