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[Visuel-News]
06-11-2025
La chronique de Pierre Corcos Si proches, si éloignés La chronique de Gérard-Georges Lemaire Chronique d'un bibliomane mélancolique
La chronique de Gérard-Georges Lemaire |
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| Chronique d'un bibliomane mélancolique |
 Man Ray, forme di luce, palazzo reale, Milan, jusqu'au 11 janvier 2026.
Man Ray, forme di Luce, sous la direction de Pierre-Yves Butzabach & Robert Rocca, bilingue, Silvana Editoriale, 246 p., 35 euro.
De tous les artistes qui ont participé aux activités du groupe surréaliste (et qui lui sont demeurés fidèles), Man Ray est certainement l'un de ceux qui figurent parmi les plus célèbres et le plus apprécié. Son oeuvre photographique est exceptionnelle, alors que son oeuvre picturale est décevante. Une grande exposition a lieu en ce moment au palais royal de Milan et un catalogue très bien fait permet de conserver le souvenir de cet événement exceptionnel.
Emmanuel Radnitzky est né à Philadelphie en 1890.Aussi curieux que cela puisse sembler, ses origines russes sont souvent indiquées dans ses biographies, mais qu'il descende d'une famille juive n'est presque jamais mentionné. Il faut dire que lui-même ne faisait pas allusion à ce passé fondateur. Il fait ses études à New York sans problèmes. Mais il refuse une bourse pour suivre des cours d'architecture. A partir de 1908, il travaille dans le monde de la publicité et du graphisme. Quatre ans plus tard, il adopte le pseudonyme de Man Ray (Manny était son petit nom quand il était enfant). Il achète son premier appareil photographique en 1914. Un an plus tard, un cher ami collectionneur, Conrad Arensberg, lui présente Marcel Duchamp. Tous les trois, ils fondent la Society of Independant Artists. Ils forment un petit groupe dadaïste à New York. C'est en 1919 qu'il réalise ses premières aérographies. Ils publient une revue baptisée New York Dada qui n'a qu'un seul numéro.
Il en conclue que cette ville n'est pas faite pour le dadaïsme. Il expédie Femme et Homme pour figurer dans l'exposition Dada de Paris. Il décide d'aller s'installer en France en 1921 quand Duchamp rentre chez lui. Il fréquente le petit cercle dadaïste, dont André Breton et Philippe Soupault qui présente sa première exposition personnelle dans sa librairie - la librairie Six. Il connaît un certain succès et vit de ses portraits. Il fait la connaissance de Gertrude Stein, de Jean Cocteau, James Joyce, Kiki de Montparnasse qui sera un de ses modèles. Il réalise un court-métrage, et prend un atelier rue Campagne-Première. Il réalise ses photogrammes qu'il appelle rayographies. Il en publie plusieurs dans la revue Feuilles libres. Il fait partie du groupe surréaliste dès sa création. La revue Littérature publie en 1924 sa photographie Le Violon d'Ingres. Robert Desnos écrit un article sur lui dans Paris Journal. Il est présent à l'exposition des Arts décoratifs dans la section de la mode et il participe à la première exposition surréaliste de la galerie Pierre.
Il travaille pour Vogue en France et aux Etats-Unis. Un an passe et il fait paraître Revolting Doors, où il reproduit dix collages des années 1916-1917. Il expose à la galerie surréaliste et ses rayographies au Brooklyn Museum de New York. Il se rend à New York en 1927 à l'occasion de l'exposition « Recent Paintings and Recent Compositions » à la Daniel Gallery. Il collabore à la revue Vu en 1928 et est invité à participer à l'exposition surréaliste de Paris à la galerie Au sacre du printemps. Il illustre les poésies érotiques de Louis Aragon et de Benjamin Péret en 1929 (le volume est censuré). Il tourne un film, Les Mystères du château, Il a une rétrospective à Rotterdam, au Danemark et au Musée d'Arte, commissionné par Charles de Noailles. Puis il a une exposition personnelle, « Photographic Compostion » à l'Art Club de Chicago. Georges Ribemont-Dessaignes fait paraître une monographie sur Man Ray. Il publie un album publicitaire pour la Compagnie Parisienne de Distribution de l'Electricité. Il est présent à l'exposition surréaliste de New York en 1932. Il écrit pour la revue Minotaure un article : « L'Âge de la lumière » en 1933. Paraît en en 1934 Photographs by Man Ray et les éditions GLM font paraître Facile en 1935. Ses oeuvres figurent au sein de 'exposition surréaliste de Londres et à l'exposition « Cubist and Abstract » et à « Fantastic, Dada Surrealism » du Museum of Modern Art de New York. En 1937 Il fait paraître un livre, Les Mains libres conjointement à son exposition à la galerie Jeanne Bucer. Il tourne un court-métrage, La Garoupe. Il expose avec Magritte et Tanguy au musée des Beaux-arts de Bruxelles « Trois peintres surréalistes ». André Breton préface La Photographie n'est pas l'art. L'année suivante, il photographie tous les modèles de l'Exposition internationale surréaliste de la galerie Beaux-arts. En 1940, il se rend à Lisbonne pour rentrer aux Etats-Unis. Il va vivre à Hollywood. Il se consacre à la peinture et aux multiples en 1944. En 1951, il se résout) à aller vivre à Paris et prend un atelier rue Férou. Il peint la série des Peintures Nature jusqu'en 1960. Il reçoit la médaille d'or de la photographie à la Biennale de Venise. Une exposition lui est consacré l'année suivante à la Bibliothèque nationale de Paris. Il publie son autobiographie en 1963. Il a par la suite une rétrospective à Rotterdam, au Danemark et au Musée national d'art moderne de Paris. Il meurt à Paris le 18 novembre 1978.
Cette remarquable exposition présentée au palais royal de Milan est très riche. Mais elle n'embrasse pas toute l'oeuvre de Man Ray. Elle a mis de côté ses peintures et une partie de ses créations expérimentales (une seule salle leur est réservée. Les commissaires se sont attachés à faire valoir ses portraits et ses nus. Il a immortalisé nombre de ses amis surréalistes - André Breton, Paul Eluard, Marcel Duchamp, Joan Mirò, et bien d'autres. Sans compter Tristan Tzara, Virginia Woolf, Gertrude Stein Giorgio de Chirico, Francis Picabia, Alberto Giacometti. Et nombre de ses modèles sont présents, comme Lee Miller avec laquelle il a eu une longue relation, Meret Oppenheim, qui était une artiste brillante, Rush Eluard, Kiki de Montparnasss et Juliet qui a été sa dernière épouse. Sa quête esthétique se confond souvent avec ses visées sentimentales. Il s'agit là en tout cas d'un événement mémorable qui permet de se faire une idée précise de l'art de Man Ray dans la sphère de la photographie.
 Estetica giapponese, Kriko Ando Mei Centro di Cultura giapponese, Milan, éditions Mudima.
Ce petit catalogue, réalisé avec beaucoup de goût et avec le souci d'initier les Occidentaux à une tradition ancienne, permet de conserver la mémoire d'une superbe exposition qui s'est tenue du 15 au 29 octobre à la célèbre Fondation Mudima de Milan. Cette merveilleuse exposition réalisée pour célébrer les cinquante années d'existence de ce centre culturel qui diffuse avec discernement les fondements de la création du Pays du Soleil Levant, dans sa tradition, mais aussi dans sa modernité.
C'est quasiment un petit événement muséographique, avec la poésie, la calligraphie, les paravents, les peinture de fleurs, l'ikebana, le Rikka-zu, les origami, en somme l'essentiel de la culture « classique » (il n'y a pas de xylographie de l'ère d'Edo). Mais le peu qu'il y avait à voir et qu'on retrouve dans ce petit catalogue d'un grand raffinement qui est destiné à faire connaître aux néophytes les formes d'une culture nouvelle qui s'est forgée entre le VIe et le VIIe siècle de notre ère, si ma mémoire est bonne, inspirée de la tradition de la Chine du temps jadis, mais qui s'est rapidement singularisée tout en préservant la force et la densité de ces références. Cette publication raffinée est un petit bijou qui marquera les esprits des personnes cultivées de la Lombardie. Le peu de commentaires qui y figurent ne peut que donner l'envie d'en savoir plus sur ces merveilles d'une civilisation qui est longtemps demeurée insulaire.
 André Pieyre de Mandiargues, Ecrire entre les arts, sous la direction d'Alexandre Castant, Pierre Taminiaux & Iwona Tokarska-Castant, « Interférences », Presses Universitaires de Rennes, 302 p., 25 euro.
Pour qui connaît un peu l'oeuvre d'André Pieyre de Mandiargues (1909-1991), il est difficile de le voir comme un descendant calviniste d'une famille de la noblesse d'Empire ! S'il ne figure pas parmi les figures les plus célèbres du siècle dernier, il n'en reste pas moins un auteur estimé et qui a un lectorat constant. Sa production a été abondante autant dans la poésie que dans le domaine de la nouvelle. Du théâtre, de l'essai (il a en particulier beaucoup écrit sur l'art, en particulier sur Léonor Fini) et il faut prendre en compte ses traductions de Yuko Mishima et de de Pisis. Sans doute faut-il prendre en ligne de compte la malheureuse affaire du prix Goncourt, qui a consacré un roman, peu représentatif de son art, La Marge, qui lui est décerné en 1967 (un film en a été tiré ainsi qu'un long métrage inspiré, lui, de La Motocyclette). Or le roman n'a jamais été son point fort. Il a excellé dans l'écriture des contes et des récits brefs. Le fait qu'il ait reçu le grand prix de la poésie de l'Académie française n'a pas suffi à renverser cette situation où il est regardé comme un écrivain mineur. Le fait qu'il ait rallié le surréalisme alors sur son déclin n'a pas joué non plus en sa faveur, d'autant plus que sa littérature est traversée de mille influences diverses que l'a empêché de s'enfermer dans un genre voué aux oubliettes après la dernière guerre. Mais son inventivité et son style lui ont épargné de tomber dans le piège d'une marque de fabrique trop appuyée.
Ce colloque qui a eu lieu en 2021 rend enfin un hommage mérité à cet auteur n'ayant pas encore eu sa place dans l'Olympe de la littérature française du XXe siècle. Dans les actes publiés par les Presses Universitaires de Rennes, le nombre des intervenants est frappant : tous les aspects de sa création son traités dans le moindre détail. Je m'arrêterai sur le bel article de Julie Bernard, qui met en relief la connivence entre son écriture et les arts plastiques modernes en Italie. Elle montre qu'il a éprouvé très tôt une attirance pour la peinture, en particulier sur celle de Giorgio de Chirico, et qu'il analyse dans un texte paru en 1963. Il d'est aussi intéressé au travail de Filippo de Pisis, qui a été lui aussi un des protagonistes de la pittura metafisica (avec lequel il a des liens de parenté : il a épousé sa nièce, Bona). Il est à souligner que ces deux grands artistes ont aussi été des écrivains de valeur. Cet ouvrage foisonnant et offre de larges perspectives pour comprendre la démarche de cet homme de lettres, mais aussi les arcs boutants de son imaginaire si singulier et envoûtant. Au-delà de la forme ingrate de ce genre de publication, tout amant des textes d'André Pieyre de Mandiargues aura la faculté de puiser des informations à foison sur son univers et aussi sur ceux qui l'ont accompagné dans son existence.
Pour ceux qui, comme moi, ont été transportés par Le Musée noir ou encore par le recueil de nouvelles de Mascarets, un recueil publié par Gallimard dans la collection « Le Chemin » en 1971. De cet homme si discret et pourtant doté d'une remarquable force dans ses écrits, toutes ces contributions contribuent à lui réattribuer sa dignité et lui rendre sa place au sein de cet après-guerre au cours duquel il a laissé tant de merveilles. Et pour ceux qui ne le connaîtraient pas, c'est un excellent instrument pour découvrir la magie de ses livres de prose ou de poésie.
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Gérard-Georges Lemaire 06-11-2025 |
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