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[verso-hebdo]
09-05-2024
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La chronique de Gérard-Georges Lemaire |
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Chronique d'un bibliomane mélancolique |
Transbordeur photographie - Histoire, société, numéro 8, 224 p., 29 euro.
C'est sans conteste la meilleure revue de réflexion sur tous les aspects de la photographie dans nos sociétés, dans l'art et dans la culture en général. Cette nouvelle livraison est consacrée à l'histoire écologique de la photographie. On a cru, un peu naïvement, que le remplacement de la photographie argentique, particulièrement polluante avec tous les agents chimiques qu'elle requiert, par la photographie numérique a été un immense bénéfice. Or, il n'en n'est rien : celle-ci a besoin de lithium et de beaucoup d'énergie électrique. En somme, un mal chasse l'autre.
Depuis qu'on a pris conscience de cette question ; on a commencé à photographier toujours plus les dommages écologiques que subit la terre, le monde végétal, le monde animal et aussi les hommes. Mais est-ce là tout ce qu'elle peut faire : dresser un constat, quitte à l'exagérer ? Le premier article que nous trouvons dans cette revue, après cette longue préface peu rassurante, concerne l'écologie botanique, qui a débuté au début du siècle dernier. La photographie va jouer un rôle toujours plus important dans l'étude des plantes. Les frères Robert et William Slith ont été des pionniers dans cette matière au début du XXe siècle. Les méthodes de travail vont rapidement se transformer et l'on est passé de la méthode empire (la pure observation) à l'analyse mathématique. Un savant comme Frederic E. Clements n'abonde pas dans ce sens même s'il travaille sur des données quantitatives. En sorte que l'observation empirique accompagne toujours les travaux rationnels. Quant aux catastrophes naturelles, elles ont fait dès l'apparition de cette nouvelle technique, d'une attention toute particulière.
L'auteur s'appuie surtout sur les expériences menées en Isère et en Haute Savoie et qui ont eu des prolongements pédagogiques notables. Un autre article développe la question des explosifs et en premier l'exploitation du nitrate de sodium. L'article suivant s'intéresse à la poussière. Et un autre se focalise sur un site pétrochimique.
Plus intéressant à mon sens est la contribution de Kiveli Mavrokordopoulou, qui nous introduit à la photographie des bombes atomiques, Fritz Goro s'étant spécialisé dans ce domaine. Il a utilisé l'autoradiographie pour parvenir à ses fins. Les pages consacrées à la cause animale nous ramène à des choses plutôt mieux connues, mais représente une question qui désormais est devenue universelle et populaire. La question de la survie de l'humanité est assez bien traitée et représente aussi un champ important des travaux photographiques de ces dernières décennies. En quelque sorte, ce numéro a été la tentative d'examiner à peu près tous ce qui peut avoir trait aux questions que posent l'écologie. C'est parfois austère ou trop spécialisé, mais l'ensemble est très cohérent et devrait satisfaire la curiosité d'un lecteur passionné par la photographie sous quelque forme qu'elle se présente.
La Visita, Ariel Soulé, a cura di Stefano Cortina, Cortina Arte Edizioni, Milan, 48 p.
Il s'agit peut-être d'un petit catalogue, mais c'est aussi une pièce précieuse et rare dès qu'on aborde la question de l'art contemporain. D'abord, examinons la mise en place des choses : un photographe, Valeriano Borroni, a mis en scène une histoire minuscule : un homme se trouve devant une porte verte. Peu à peu une jolie jeune femme en sort. Le mouvement de sa venue est comme saisie au ralenti. Celle-ci s'avance vers le personnage qui paraît l'attendre ? Mais, tout d'un coup, elle imprime à sa robe bleue un mouvement brusque en direction de l'homme qui est déconcerté. Ce dernier semble peiné de ce
geste inattendu. Ensuite, elle se rapproche de lui comme pour le consoler. Il offre une fleur qu'elle accepte. Puis ils se tournent le dos, après que la femme donne l'impression d'être tombée derrière la porte entrouverte. Ils se tournent le dos et vont chacun dans le sens opposé. Puis on les voit s'embrasser. Et, l'homme s'en va en passant derrière la porte.
De cette fable, nous pourrions tirer plusieurs récits différents. Les tableaux d'Ariel Soulé sont reproduits à côté de chaque instant de l'intrigue. En commun avec eux. A l'époque (nous sommes en 2009), il était un peu plus figuratif. Peut-être il y a-t-il des clefs, mais elles ne nous sont pas données. Ce qui fait le charme et l'originalité foncière ses toiles, c'est qu'elles ne délivrent pas un message de quelle que nature que ce soit. Soin monde est énigmatique. Mais il n'en reste pas moins attirant. Des formes flottent dans un espace abstrait. Ce sont les formes de sa pensée qu'il ne délivre que sous cet aspect énigmatique. Mais ses compositions n'en demeurent pas moins équilibrées, malgré le désordre apparent, et elles nous parlent malgré le peu que nous pouvons savoir d'elle. C'est une très belle confrontation entre deux histoires énigmatiques.
Guerre, Ludwig Renn, traduit de l'allemand par Jean-Pierre Landais, Le Temps des cerises, 440 p., 18 euro.
Ce grand et puisant livre a été écrit par Von Gol Benau (1889-1977), un officier qui choisira le nom de plume de Ludwig Renn pour publier cet ouvrage, relation avec précision et sans le moindre désir de se mettre en avant, se limitant à témoigner avec précision et réalisme dans ce conflit titanesque. Il le fait d'abord publier d'abord sous forme de feuilleton dans Frankfurter Zeitung (l'un des plus importants quotidiens allemands) en 1928. Mais il ne paraît pas en volume. Cet officier qui s'était caché derrière la figure d'un modeste caporal, n'avait peut-être assez exalté la grandeur de l'armée allemande pour que son oeuvre, tiré de plus de trois mille pages de manuscrit, puisse servir le régime national-socialiste. Il est tout l'oppose d'Ernst Jünher qui, dans Orage d'acier, exalte la guerre comme des valeurs cardinales de l'humanité.
Son récit est raconté avec simplicité et sobriété, mais donne beaucoup de détails non seulement sur les combats, mais aussi sur la vie quotidienne des soldats entraînés dans cette tourmente. C'est bel et bien un roman dans la forme, avec une profonde densité mais sans le moindre pathos, et rédigé avec le souci de la clarté et de la pure vérité.
L'aventure militaire du caporal Renn débute en Belgique, et rien n'est dissimulé de ce que s'y passe, en particulier la violente répression des habitants du lieu qui osent résister à cette invasion non déclarée. Les épisodes qui suivent sont une avancée vers la frontière française, mais les soldats ignorent complètement où ils sont dirigés. La perspective que nous offre l'auteur est toujours celle du simple soldat ou du sous-officier qui sont engagés dans des combats dont ils ignorent la signification. Bien sûr, ils savent que l'objectif final est l'entrée en France.
L'engagement avec les troupes françaises ne tardent pas et les combat se font plus durs. Son régiment arrive aux abords de la Marne. Et là, il fait une description inoubliable de cette fameuse bataille telle qu'elle a été vécue et perçue par les Allemands. Il n'y a chez lui aucune volonté de magnifier l'armée à laquelle il appartient, mais pas non plus de la dénigrer. Il se contente de relater les affrontements terribles qui ont lieu à cette occasion.
En outre, il parle aussi des permissions concédées à ces hommes soumis à de grandes souffrances. Mais là encore, il a pour souci unique de rappeler comment les choses déroulaient et non de les commenter et encore moins de les critiquer. Cette offensive puissante s'arrête soudain et alors c'est le repli. Les officiers de l'état-major qui croyaient entrer victorieux à Paris doivent déchanter. Alors commence la seconde et dernière partie du livre, qui est celle de « La guerre de position ». C'est l'heure des tranchées, les pluies de bombes et de shrapnels, des attaques et des contre-attaques, des, des tentatives de percées fulgurantes, d'offensent qui donnent l'impression d'être un succès et puis de leurs échecs. Et aussi c'est une société qui se crée dans ces tranchées, avec sa routine, ses habitudes et son mode de vie qui ne ressemble plus en rien à la vie des civils, cela va sans dire.
Ludwig Renn apporte ici un témoignage passionnant pour comprendre la réalité de cette guerre, qui a été terrible. Mais il ne s'attarde pas sur l'inhumanité de la guerre. Il la vit et nous en transmet tous les aspects sans complaisance. C'est véritablement un roman à découvrir.
Advertising, Michelangelo Coviello, NPe/poesia, 60 p., 12 euro.
La poésie sera intense ou ne sera pas. Dans ce recueil, l'auteur a trouvé son mode de construction de ses poèmes : il s'agit de strophes très courtes et pas nécessairement égales. Mais compte surtout leur concision, qui leur attribue une véritable force. Chacune de ces strophes est un petit récit mettant en évidence une pensée qui l'a traversé.
Il ne se paie pas de mots : il veut que les mots manifestent pleinement ce qu'il a éprouvé et qui lui a donné le désir de déposer sur le papier. Ce qui nous apparaît comme un volume minuscule est en réalité un univers plutôt vaste et chargé de méditations résumées dans le cadre étroit de ces strophes. Nous avons affaire avec Michelangelo Coviello a une poésie à la fois moderne et antique, qui n'a pas été le fruit d'une quête de contemporanéité. Il n'a cure des modes et des courants qui, par ailleurs n'a plus beaucoup de grands représentants en Italie. Il dépeint l'univers tel qu'il le voit, sans complaisance, mais sans non plus d'animosité. Et il image ce qui pourrait un jour prochain avenir, qui n'est peut-être qu'un rêve. Mais ce n'est pas un idéaliste, ni un doux rêveur.
Il s'est fait de notre bas monde une idée qui conjugue la beauté et la tristesse des choses qui s'y déroulent. Il a choisi un titre pour ces textes : « Di cosa nasce cosa ». Ils sont une succession de méditions sur une chose, qui pourrait être matériel, mais qui pourrait également être immatériel, de l'ordre de la pensée. Cette investigation est prenante, et en même temps consolante.
Il a chez lui une formidable tension qui fait de ses nerfs autant de harpes pour son écriture. J'en recommande la lecture à qui à la faculté de lire l'italien
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Gérard-Georges Lemaire 09-05-2024 |
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Verso n°136
L'artiste du mois : Marko Velk
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