Voyage en peinture
ou
Voyage au bout de la nuit
(mais c’est déjà  pris)
par Odile Dorkel
 Pour Henri Michaux,  dans un tableau tout est donné d’un coup mais « rien n’est  connu tant qu’on a pas commencé à LIRE ».
      Alors comment  accéder et habiter cet autre espace intérieur que nous donne à  voir celui de Benjamin Lévesque ?
      Comment déchiffrer  la grammaire de sa phrase picturale et se placer dans son centre  organique afin d’y déceler le germe qui va organiser tous les  possibles ?
      Pour cela nous  allons remonter le temps, nous arrêter en 1995 et nous installer  dans la série « Rave » qui nous a semblé contenir une  première clé de l’écriture picturale de Benjamin Lévesque.
      Les noirs si soyeux, si veloutés, emprunts tour à tour de  brillance et de matité nous plongent d’emblée dans un monde  nocturne où nous allons faire l’expérience du noir et de la Nuit,  la Ténébreuse aux ailes noires, celle qui préside (selon Hésiode)  au commencement et qui a souvent polarisé la répulsion. Pourtant le  nocturne est à double sens. Certes les enfants de la Nuit, les  Redoutables, le Sommeil et la Mort (Hypnos et Thanatos), participent  des grandes peurs de l’humanité. Pourtant ce nocturne redouté est  aussi convertible en merveilleux, celui qui fait place aux rêves  quand ils organisent le chaos de nos nuits, celui de la fête  nocturne, la « Rave » et ses cortèges de danses  effrénées dont l’ancêtre n’est autre que Dionysos et enfin la  nuit érotique enveloppée de nuées d’or. La nuit contient tout ce  qui est le plus terrible et le plus merveilleux.
      « Nous n’avons  que le choix du noir » écrivait Victor Hugo. Ce noir  insondable et inquiétant, Annie Lebrun nous l’a montré dans  l’exposition « Les arcs en ciel du noir », est notre  richesse, il contient une puissance génératrice dans laquelle il  nous faut sans cesse retourner pour y puiser la lumière, celle venue  des profondeurs qui redessinent notre paysage poétique.
      Ce voyage dans le  noir est celui auquel Benjamin Lévesque nous convie. Le décor ainsi  planté, nous assistons au surgissement des couleurs qui vont  organiser la composition scénique. En entrouvrant ainsi le noir dont  elles en disputent l’espace, elles se présentent et créent la  surprise, elles révèlent et manifestent au grand jour ce qu’il  contient. Echappées du noir, elles crépitent en retombées de feux  d’artifices, s’étalent en flaques rouges, se rassemblent,  esquissent des formes, et par les fentes laissent entrevoir la  brillance et le pétillement des ors. Tels des personnages entrevus  de façon fugace, elles improvisent,  irradient, se repoussent,  vibrent en points de suspension. De ces impressions fugitives,  subliminales, notre œil s’imprime en passant, comme autant de  bouts de phrases commencées…
1 2 suite
- Entretien  avec Benjamin - le 8 novembre 2012 
 par Daphné Brottet
- Quand  Benjamin fait du Fifre d'Édouard Manet le point de fuite de sa pensée sur le sujet de la  peinture.
 par Gérard-Georges Lemaire
- Voyage en peinture
 ou
 Voyage au bout de la nuit
 (mais c’est déjà pris)
 par Odile Dorkel
- Benjamin
 par Sapho
- La  théophanie
 Un homme et une femme regardent un tableau de Benjamin
 par Max Guedj
- L'art de l'effeuillage
 ou L'étoffe des libertins
 par Jean-Claude Hauc
- L'œil écrivain
 par Christophe Averty
- Deux clins d'œil :
 Gérard de Lairesse par Jean-Michel Charbonnier
 et Le costume byzantin par Eudes Panel.
- Sensus  communis. À propos des photographies de Philippe Monsel
 par Luc Ferry
- Banditi  dell’Arte, une  ontologie de l’« hors normes » ? 
 par Marie-Noëlle Doutreix
- Les tableaux Tounes Boules (turn cut) d'Arthur Aeschbacher 
 par Gérard-Georges Lemaire
- Une biennale pour l'architecture partagée : une promenade dans l'arsenal
 par Giancarlo Pagliasso
- Tatline / art et monde  nouveau
 par Giancarlo Pagliasso
- L'art et le cyclisme
 par Leonardo Arrighi
- Éloge de Simon Hantaï
 par Gérard-Georges Lemaire
- Philippe Richard
 par Vianney Lacombe


 Christophe Cartier
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