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La bibliothèque de l'amateur d'art
par Gérard-Georges Lemaire

Bibliothèque de l’amateur d’art par Gérard-Georges Lemaire
La Ville magique, LAM/Gallimard, 232 p., 35 €.

Ce catalogue accompagne une exposition tout à fait importante. Le sujet n’est pas d’une grande originalité, mais cela ne signifie nullement qu’on ne doive pas le traiter car, en fin de compte, il n’existe pas d’ouvrage important sur la question en dehors ce qu’a pu faire il y a quelques années Jean-Luc Chalumeau. Il est évident que la ville a été à la fois un sujet de représentation et un paradigme d’une certaine vision de la modernité (ou, plus exactement, de plusieurs visions). Il suffit de songer à la ville futuriste, celle de ses architectes, Sant’Elia ou Virgilio Marchi, mais encore plus celle de ses peintres, à commencer par La Ville qui monte d’Umberto Boccioni, jusqu’aux décors urbain de Fortunato Depero. Qu’on compare ces images à celles produites par Giorgio De Chirico, par Carlo Carrà, par Alberto Savinio dans l’optique de la « peinture métaphysique », qui est une cité de la mémoire, souvent antique, parfois inspirées par Ferrare, ou alors composée de bâtiments pris dans une perspective accélérée, avec des objets mis en exergue et souvent insolites et incongrues. Ce sont là deux mondes qui n’ont rien à partager ensemble. Et il y a la ville perçue par les expressionnistes allemands, les cubo-futuristes tchèques, les membres de l’école cubiste de Paris, Et puis il y a encore celles de la Nouvelle Objectivité de la République de Weimar et celles du surréalisme, de Magritte à Delvaux. Et qu’on n’oublie pas Balthus ou Hélion !
Je pense que cette remarquable recherche et que cette remarquable exposition au musée des Beaux-arts de Lille aurait pu être accompagné par un parcours littéraire (et même musical, pourquoi pas ?) qui aurait monté comment les villes se sont métamorphosées sous la plume de John Dos Passos, Louis Aragon, André Breton, Paul Morand, Jules Romains, Philippe Soupault.
Mais, si l’on pourra pointer des absences (absolument inéluctables dans ce cas d’espèce), voilà un document qui pourra servir à tout étudiant, à tout chercheur et à tout amateur qui veut comprendre comme l’idée de la ville est devenue non seulement un thème récurrent, mais une façon de montrer comme l’évolution de la société entre en phase (parfois décalée) avec les rapides mouvement de la pensée artistique.

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Bibliothèque de l’amateur d’art par Gérard-Georges Lemaire
Carnets de voyage, Julien Blaine, Al Dante, 230 p., 30€.

Dans quelle case, dans quel rayonnage cataloguer ce livre ? Dans la poésie ou dans l’art ? Julien Blaine est à la fois poète et artiste, mais surtout les deux à la fois ! Mais après, foin des vieilles catégories ! Dans ces Carnets de voyages, Blaine dévoile tous les aspects de sa création, ancienne et récente. Il fait des parallèles entre les cultures exotiques qu’il découvre au cours de périples lointains, mais n’oublie pas d’exploiter que ce que les paysages français peuvent lui offrir. Textes et photographies se conjuguent, se complètent et l’auteur fait des commentaires souvent caustiques sur ce qu’il voit et reproduit en regard. La dominante de ce volume est d’ordre sexuel : il s’intéresse beaucoup au lingam et à ses significations, celles qui lui sont propres dans les religions asiatiques et celles qu’il imagine avec beaucoup d’humour. Car rien ici n’est jamais pris de manière sérieuse. Il est évident qu‘il subit la fascination de ces monuments et de ces sculptures, mais il laisse son imagination, qui ne connaît pas franchement de limite, galoper avec un franc esprit rabelaisien. Les « Quatre attributs de Vishnou » ou « L’acète » sont de superbes récits car à la beauté des documents recueillis répond la fantaisie de ses écrits. En somme, Julian Blaine continue à tenir son rôle de dernier des poètes, une sorte d’Attila de l’histoire sacro-sainte de la composition poétique et même des formes les plus iconoclastes des mouvements d’avant-garde. Celui qui se prend au sérieux le détestera, mais le lecteur qui possède assez d’ironie sur lui-même et sur ce qu’il a appris ou acquis y trouvera une jubilation considérable.

 

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